Mohammad Rasoulof, réalisateur mal vu par le pouvoir iranien, est récompensé à Cannes

Le film Un homme intègre du réalisateur iranien Mohammad Rasoulof a remporté samedi soir le prix Un certain regard, compétition parallèle à la course à la Palme d'or au Festival de Cannes. Cette récompense a une saveur politique, tant le cinéaste a dénoncé depuis plusieurs années la corruption et les atteintes aux libertés dans son pays.

Le jury présidé par l’actrice américaine Uma Thurman (Nouvelle fenêtre) a récompensé ce drame dans lequel un modeste éleveur de poissons est harcelé par une grande entreprise pour vendre son terrain. Bien que menacé de voir son monde s’effondrer, il refuse de céder à la corruption pour s’en sortir.

Un certain regard est une section séparée de la principale compétition à Cannes. Elle a pour but de célébrer les jeunes talents et les films innovants. Âgé de 45 ans, Mohammad Rasoulof n’est pourtant pas un nouveau venu dans le monde cinématographique, lui qui est connu pour son militantisme à travers ses films. Ces derniers insistent sur les problèmes de société qui gangrènent l’Iran, dénonçant notamment le règne de Mahmoud Ahmadinejad, président du pays de 2005 à 2013.

Son combat avait amené le réalisateur à être arrêté par les autorités iraniennes, en 2010, avec un autre réalisateur du pays, Jafar Panahi. Il avait été ensuite placé en résidence surveillée. Son long métrage Au revoir avait d’ailleurs été projeté en son absence, à Cannes, en 2011, déjà dans la section Un certain regard. Le film avait récolté le prix de la mise en scène (Nouvelle fenêtre).

Condamné à six ans de prison, Mohammad Rasoulof a vu sa peine réduite à une année. Elle n'a pour l’heure jamais été purgée. Toutefois, le cinéaste est encore aujourd’hui en liberté sous caution.

J’aime l’Iran, mais il est comme un père alcoolique, parfois il me frappe.

Mohammad Rasoulof semble toujours surveillé de près par le pouvoir en place. Il a été autorisé à tourner Un homme intègre en Iran seulement après signé un document dans lequel il promettait de ne pas faire un film « trop noir ».

Toutefois, il reste peu probable que les spectateurs iraniens voient l’histoire imaginée par Mohammad Rasoulof au cinéma, puisqu’aucune permission de projection ne lui a été délivrée. Les cinq précédents longs métrages du cinéaste ont subi le même sort.

Outre Un homme intègre, le jury d’Un certain regard a récompensé trois films. Le prix du jury a été décerné au Mexicain Michel Franco pour Les filles d'Avril. Wind River de l'Américain Taylor Sheridan repart avec le prix de la mise en scène. Enfin, Barbara du réalisateur français Mathieu Amalric a reçu le prix pour la poésie du cinéma.

Avec les informations de AFP et Reuters