Un parti d’extrême droite menacé d’interdiction en Slovaquie

Le timing de l'action en justice contre le parti d’extrême droite pourrait avoir des effets indésirables. [Janos Vajda/EPA]

Le parquet slovaque a demandé à la Cour suprême d’interdire un parti d’extrême droite, qualifié de groupe extrémiste dont les activités sont contraires à la Constitution. Un article d’Euractiv Slovaquie.

La porte-parole du procureur général Jaromir Cizmar a confirmé que son bureau avait demandé à la Cour suprême d’interdire le Parti du peuple pour notre Slovaquie (LSNS), qui constitue selon lui un groupe extrémiste dont les activités constituent une violation de la Constitution du pays.

Le procureur estime en effet que l’objectif du parti est de détruire le système démocratique slovaque.

Des inspirations nazies

L’entrée au parlement slovaque de LSNS, l’an dernier, a provoqué un tollé. Le parti d’extrême droite est en effet passé de l’inexistence politique à 8 % des voix, soit 14 sièges au parlement, du jour au lendemain. Les sondages indiquent qu’il attire aujourd’hui entre 10 et 11 % des électeurs.

Le parti est connu pour ses activités et prises de position controversées. Ses membres et sa direction admirent ouvertement le gouvernement fasciste qui régnait sur la Slovaquie durant la Seconde Guerre mondiale, duquel sont d’ailleurs inspirés ses symboles et logos. Les membres du parti qualifient ainsi le soulèvement national qui a eu lieu contre le régime fasciste et son alliée, l’Allemagne nazie, en 1944 de « une tragédie nationale » et « putsch communiste ».

LSNS ne se limite cependant pas à chérir le passé fasciste du pays. Avant les élections, le parti a organisé des rassemblements et manifestations dans des zones habitées par des Roms, qu’ils qualifient de « parasites » promettant de protéger le peuple contre les « extrémistes gitans ».

Le parti a également intégré plusieurs personnalités connues de la scène néonazie nationale, comme Rastislav Rogel, chanteur et leader du groupe JUDEN MORD (un nom allemand qui pourrait se traduire par « assassiner les juifs »), et Marian Magat, qui chante publiquement les louanges d’Adolf Hitler et du régime nazi.

Une image à peine adoucie

Depuis les élections de 2016, le parti tente d’adoucir son image. Les personnalités les plus polémiques l’ont quittée ou ne sont plus sous les feux de la rampe. LSNS essaie de présenter son idéologie comme « nationaliste » ou « patriote », plutôt qu’ouvertement fasciste.

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Politiquement parlant, le parti s’est lancé dans des campagnes contre l’UE, l’OTAN et les immigrants. Ses membres considèrent l’OTAN comme un groupe terroriste et ont lancé une pétition pour le retrait de la Slovaquie.

Les critiques du parti et les défenseurs des droits de l’Homme assurent qu’il ne s’agit que d’une manœuvre politicienne. Selon eux, LSNS tente seulement d’éviter le sort de son prédécesseur, le Parti national de l’Ensemble slovaque, interdit en 2006, sans que les convictions de ses élus aient changé d’un iota.

Plusieurs incidents le prouvent. Milan Mazurek, député membre de la commission des droits de l’Homme, utilise ainsi régulièrement des rhétoriques haineuses à l’encontre de l’Islam ou du « sionisme ». Il a été filmé en train d’agresser une famille musulmane comptant des enfants en bas âge à la gare de Bratislava. Il est par ailleurs poursuivi en justice pour ses propos anti-Roms.

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Mauvais timing ?

L’idée d’interdire le parti a déjà été étudiée sérieusement et la police a déjà commencé à récolter des preuves de ses activités. La demande du procureur général n’a donc rien de surprenant. Certains observateurs se demandent cependant pourquoi le parquet a attendu si longtemps et ce qu’indique le timing de l’initiative.

Des élections régionales auront lieu en novembre 2017 et Marian Kotleba, qui dirige le LSNS, semble avoir de bonnes chances de rester président de sa région, dans le centre de la Slovaquie. S’il n’a rien accompli d’extraordinaire durant ses quatre années de présidence, des poursuites judiciaires pourraient bien faire de lui un « martyr » et lui apporter des votes de contestation.

Pour certains experts, le parti récolte les voix des nombreux citoyens mécontents du paysage politique traditionnel, las de la corruption omniprésente, des inégalités et de l’absence d’opportunités économiques dans certaines régions du pays.

Le LSNS surfe également sur les tendances racistes et xénophobes endémiques de l’opinion publique. En 2016, le parti aurait ainsi bénéficié des rhétoriques très anti-immigrants des autres partis, et en particulier de celui du Premier ministre, Robert Fico.

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