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Violence, fraude au fisc, emplois présumés fictifs... les affaires judiciaires des candidats FN aux législatives
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Violence, fraude au fisc, emplois présumés fictifs... les affaires judiciaires des candidats FN aux législatives

Législatives

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Parmi les profils des 570 candidats FN investis pour les législatives, une part non négligeable d'entre eux ont des démêlés avec la justice. Présentation d'une vingtaine de ces candidats déjà condamnés, sous le coup d'une enquête ou sur le point de passer devant les juges.

Dans notre épluchage du profil des 570 candidats frontistes investis aux législatives, les démêlés judiciaires du FN sont légion. Le plus important et urgent d'entre eux concerne les activités d’une vingtaine d’assistants parlementaires des eurodéputés FN, suspectés d’avoir été payés par le Parlement européen mais de ne travailler que pour le parti. Les révélations de Marianne et Mediapart en ont détaillé une partie. Mais les candidats présentent toutes sortes de démêlés judiciaires. Tour d'horizon.

Emplois présumés fictifs au Parlement européen

Deux enquêtes sont en cours. Au niveau de l’Union européenne (UE), l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF) a déjà demandé à plusieurs eurodéputés FN de rembourser les sommes dues . En France, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire en décembre 2016, après plusieurs mois d’enquête sur la base de soupçons du Parlement européen.

De nombreux candidats FN aux législatives sont concernés par cette affaire. Un préjudice à la charge des contribuables européens, et donc français, estimé à près de 5 millions d'euros par le Parlement européen, si ces accusations se révélaient exactes. Quinze assistants se présentent ainsi aux législatives, dont la moitié ont été cités dans l'affaire OLAF : Julien Odoul (Yonne 3), Etienne Bousquet-Cassagne (Lot-et-Garonne 3), Kevin Pfeffer (Moselle 7), Loup Viallet (Doubs 3), Loïc Grimaux (Somme 5), Laurent Salles (Hauts-de-Seine 4), Timothée Houssin (Eure 3).

Neuf eurodéputés sont investis par le FN aux législatives, dont 4 sont cités dans l'affaire : Mylène Troszczynski (Oise 4), Sophie Montel (Doubs 4), Dominique Bilde (Meurthe-et-Moselle), ainsi que la présidente du parti Marine Le Pen (Pas-de-Calais 1).

L'affaire des assistants parlementaires entache en effet directement la présidente du parti. Un document récupéré au cours d'une perquisition en février laisse penser que Marine Le Pen était au courant du stratagème. Convoquée par deux fois par les juges en vue d’une mise en examen, Marine Le Pen a refusé de s’y rendre, s'appuyant sur son immunité parlementaire, tout en promettant de rencontrer les enquêteurs après la campagne présidentielle.

Coup de feu et coup de matraque

L'entreprise "familiale" FN a investi aux législatives un contingent de candidats aux multiples démêlés judiciaires. Deux candidats ont carrément été condamnés pour violence avec arme. Vincent Gérard, ex-guitariste de la bande skinhead Tolbiac Toads et candidat en Haute-Vienne, a écopé de 4 mois avec sursis pour l'agression d'un serveur. Le 2 avril 2012, une bande de 4 militants FN sortant de réunion du parti finissent dans un bar et terrorisent avec une batte de baseball la clientèle. Chassés par la police, deux d'entre eux reviennent plus tard avec une matraque et un couteau. Vincent Gérard en fait partie. Le tenancier du bar reçoit un coup de matraque, lui fracturant le nez. Marine Le Pen assurait peu de temps après qu'en cas de condamnation, Vincent Gérard serait démis de ses fonctions. Ce n'est donc pas du tout le cas 5 ans plus tard.

Le conseiller régional et municipal Frédéric Boccaletti, investi à Six-fours-les-Plages dans le Var, n'est pas en reste. Ce dernier, non content d'avoir réédité l'auteur nationaliste et antisémite Maurras, a été condamné en 2000 pour "violence en réunion avec arme". Comme le raconte Libération , un militant et lui d'un côté, un groupe de jeunes de l'autre,s'échangent des "sales fachos" et "sales nègres". Les jeunes se procurent "un bâton et une batte de baseball". Vincent Gérad passe alors son pistolet au militant, qui tire à environ 1 m 50 du sol, soit à hauteur d'homme. Vincent Gérard écopera d'un an de prison, dont 6 mois ferme.

Fraude fiscale

Dans les Landes, ce sont les concubins Christophe Bardin, secrétaire départemental, et Yveline Brun, conseillère régionale qui ont maille à partir avec la justice. Tous deux sont poursuivis par les Finances publiques pour la bagatelle de 300.000 euros. Le journal Sud-Ouest , à l'appui de sources proches du dossier, explique ainsi que les époux auraient "soustrait" 100.000 euros par an sur leur exercice comptable en 2011, 2012, et 2013. L'une aurait oublié de déclarer des revenus tirés de l'auto-école qu'elle dirige, l'autre aurait omis de déclarer la TVA de son association de sécurité routière. Ils doivent comparaître en correctionnelle fin juin.

Comptes de campagne

Autres proximités dans la vie et dans le non-respect du droit : Joseph Damour et Lucinda Carvalho.Ces "amis de longue date" se présentent tous deux dans les Pyrénées-Atlantique, vivent dans le Béarn, et sont récemment sortis d'une période d'inéligibilité de trois ans. Le Conseil constitutionnel les a épinglés pour "non-dépôt des comptes de campagne". Peu de temps après les élections départementales de 2015, l'ex-candidat à la Réunion Joseph Damour assure de son côté être "rentré en métropole une fois avoir transmis les documents au mandataire financier", chargé de la bonne tenue de ses comptes de campagne. Par "manque d'expérience", ce dernier n'aurait alors pas envoyé les justificatifs au siège du parti pour transmission au Conseil constitutionnel. Selon Joseph Damour, c'est également l'intermédiaire comptable de Lucinda Carvalho qui serait en tort. Celui-ci aurait jugé qu'en raison du faible score de la candidate à Mayotte (1,23%), le remboursement des frais de campagne par l'Etat n'étant possible qu'à partir de 5% des voix, il n'y avait aucune nécessité de clôturer les comptes comme il se doit.

Un autre candidat FN dans la Somme a également vu ses comptes de la campagne des départementales de 2015 rejetés. Loïc Grimaux reste bel et bien candidat dans la 5e circonscription, bien qu'il ait été déclaré inéligible début avril pour six mois par le tribunal administratif d'Amiens auprès duquel il a fait appel... Loïc Grimaux, plaidant "l'erreur", avait payé avec sa propre carte bleue certaines factures pour près de 3.000 euros, représentant plus d'un tiers de ses comptes de campagne, "au dessus du seuil de tolérance" avait jugé le procureur. Le code électoral ne permet en effet pas d'étaler les dépenses entre plusieurs comptes bancaires : un seul doit être ouvert par le mandataire financier, retraçant nécessairement "la totalité des opérations financières" de la campagne.

Christelle Lechevalier-Létard a pour sa part vu son élection comme conseillère municipale annulée par le tribunal administratif, ce qui ne semble pas l'empêcher d'être investie candidate FN dans la 3e circonscription du Calvados. Pour enrôler des colistiers aux municipales de 2014 à Giberville, elle a fait croire que le document à signer était une pétition... Sept personnes ont ainsi été inscrites à leur insu sur la liste du FN.

Fake news

On connaissait Florian Philippot coutumier du fait , ce dernier n'a pourtant pas condamné l'odieuse "fake news" de Françoise Grolet, qui se présente également en Moselle. Cette dernière passera bien en correctionnelle en juillet prochain pour "diffusion d'informations fausses", à deux jours de la date-anniversaire de l'attentat contre Charlie Hebdo. Le 5 janvier dernier, Françoise Grolet a déclaré sur son compte Facebook qu'un bus de l'agglomération de Metz avait été la cible de tirs à balles réelles, que le chauffeur était "sous le choc", et a même proposé l'organisation d'une grève, le tout opportunément estampillé du hashtag "Marine 2017". Cette ligne de bus relie deux communes messines qui ont la réputation d'être "sensibles".

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Une campagne de désinformation attisant les commentaires douteux sous la publication. L'un d'entre eux a par exemple fait un photomontage mettant côte à côte Hitler et le prophète musulman Mahomet.

Le maire de Metz, Dominique Gros, en sa qualité de président du réseau de transport, avait signalé cette intox au procureur. Dominique Gros explique dans un rapport qu'un "climat particulièrement tendu" s'était installé dans les rangs des chauffeurs le jour de la publication, le maire devant faire le déplacement et passer plusieurs heures avec le personnel pour "rassurer et faire taire la rumeur", et éviter le mouvement de grève proposé par un syndicat. Le 18 mai, Françoise Grolet continuait de dénoncer une "manoeuvre politique" sur son compte Facebook.

Ajoutons à ce tableau Jordan Bardella, candidat à la députation dans la 12e circonscription de Seine-Saint-Denis. Le jeune conseiller régional a été renvoyé en mars dernier devant le tribunal pour diffamation publique envers le maire LR d’Aulnay-sous-Bois : sur son blog, il avait affirmé en janvier 2016 que Bruno Beschizza était "objectivement en situation de cumul illégal des mandats depuis plus de deux mois". Raté : le maire d’Aulnay avait démissionné de son poste de conseiller départemental trois jours avant la publication du post de blog de Jordan Bardella.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne