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Politique

Pourquoi NKM, Duflot, Hamon et les autres vont être engloutis par la Macronmania

A droite comme à gauche, des figures nationales, comme NKM ou Hamon, qui pensaient incarner le renouveau politique, peuvent être battues aux législatives par des candidats de la République en marche. Parce qu'ils sont aussi, malgré leur âge, des candidats d'un ancien monde. 

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Nathalie Kosciusko-Morizet, Cécile Duflot et Benoît Hamon

Nathalie Kosciusko-Morizet, Cécile Duflot et Benoît Hamon vont-ils être battus aux législatives?

AFP / montage Challenges

"Dans dix jours ma voix peut s’éteindre". Détresse, tendresse. En difficulté dans sa circonscription qu’elle pensait dorée, Nathalie Kosciusko-Morizet joue l’empathie. Et la compassion. Je suis jeune, j’ai de l’ambition, et me voici proche de la fin de ma vie politique et d’élue. A 44 ans à peine. Victime de l’élection d’Emmanuel Macron, et de la chambre introuvable En Marche qui vient, avec les élections législatives. Pourquoi moi ? Pourquoi vais-je disparaitre comme tant d'autres alors que j'étais promesse de changement et de renouveau il y a encore un an à peine ?

La candidate LR dans ce qui était la circonscription la plus sûre de France pour la droite (ce n’est pas pour rien qu’elle était devenue celle de Fillon, l’homme qui aimait être élu sans faire campagne) n’en peut mais. Elle sent la défaite qui vient, et que lui promet un sondage. Même ici, au cœur du cœur de la droite, des électeurs de tous bords s’apprêtent sans états d’âme à congédier une personnalité qui se pensait indispensable, compte tenu de ce qu’elle a toujours prétendu incarner, à la vie publique des deux décennies qui viennent. Et ce congé est d’autant plus violent qu’il risque d’être définitif. Refondation et recomposition sont les deux mamelles du macronisme. Un nouveau monde nait, qui exige la mort de l’ancien. NKM pleure son destin perdu dans Le Parisien, et elle n’est pas seule.

Benoit Hamon aussi se lamente devant la vague qui vient, et qui le menace autant que NKM. A l’en croire, il existerait "une sorte de Macronmania qui nous fait oublier les politiques qu'il va mettre en œuvre". La Macronmania, ce serait l’engouement de la sphère médiatique à encenser et célébrer le vainqueur de l’élection présidentielle.

On connait la chanson, même si le film de l’ancien monde n’est pas du Resnais nouvelle vague. Ce n’est pas Benoit Hamon, candidat du Parti socialiste vainqueur haut la main de la Primaire de la Belle alliance populaire, qui a perdu l’élection présidentielle, mais ce sont les médias détenus par les oligarques qui l’ont emporté. Et peu importe que l’examen attentif de la presse tout au long de la campagne démente cette légende (re)tissée chaque jour par les Pénélope vaincues de la présidentielle, l’essentiel pour elles, de NKM à Hamon en passant par Aubry, Ciotti, Vallaud-Belkacem, Duflot, Valls est de se raconter une histoire qui est une forme d’alibi à leur échec. Ils ne seront pas les vaincus de l’histoire, mais les vaincus d’un grand complot aux ramifications profondes, révélé par Michel Onfray. Il sont d'ores et déjà les victimes d’une injustice sans nom, eux qui étaient certains, forts de leur âge biologique, d’être les présidents de demain. Un jour ou l’autre. L’ancien monde leur était promis, et le voici qui va disparaitre, l’espace d’un printemps électoral et sans espoir de résurrection.

Ironie de l'histoire

Mais au fond, ces NKM, Hamon et autres, étaient-ils la promesse du renouveau ? Portaient-ils en eux l’assurance de changer le monde ancien dont les Français ne voulaient plus ? Incarnaient-ils le renouveau ? L’optimisme ? Une forme d’excellence politique appelée à remplacer une élite endogamique et fermée ? Ne leur en déplaise, la réponse est non.

Ironie de l’histoire. Voici des gens qui ont passé des mois à faire campagne contre Macron, "qui n’a été élu nulle part" et qui s’apprêtent, eux, à être battus par ce suffrage universel dont l’onction manquait au nouveau président. Et qui seront battus parce que justement, malgré leur récente chronologie politique apparente, ils sont l'essence de l'ancien monde, dévolu à une une élite politique que les Français ne supportent plus.

NKM se plaint que sa voix peut s’éteindre, elle qui se pensait neuve, alors que la façon dont elle a hérité de sa circonscription est parmi les plus antiques de la vie politique de l’ancien monde. Une concession et cooptation accordée par François Fillon, alors grand chef de Les Républicains au lendemain de la Primaire, en échange d’un soutien sans faille à la présidentielle. Un pacte à l'ancienne. Rien n’est plus ancien que les conditions dans lesquelles NKM a été propulsée dans cette circonscription, regroupant des arrondissements parisiens qui ont élu pendant 70 ans des Tibéri et des Frédéric-Dupont, plus à droite tu es élu à vie.  NKM est-elle synonyme de renouveau ?

Synonyme de renouveau?

Benoit Hamon se plaint de la Macronmania, mais se demande-t-il seulement pourquoi il n’y a pas eu de Hamonmania ? Et pourquoi il n’y en aura jamais.

Le candidat socialiste a dénoncé durant toute la campagne le côté vieille politique de Macron, lui qui a accompli le cursus honorum le plus traditionnel qui soit au sein du PS : un licence d’histoire à l’arrache, le rocardisme, l’UNEF, le MJS, le NPS, des alliances et des contre-alliances au gré des congrès, un jour avec Peillon et Montebourg, le lendemain avec Aubry, puis dans la synthèse avec Hollande, un passage au gouvernement, une alliance avec Valls, puis une rupture, et les Frondeurs et encore et encore… Un quart de siècle consciencieusement passé à saper l’héritage Mitterrand et porter la PS à 6% des voix à une élection présidentielle… Hamon est-il synonyme de renouveau ?

Idem pour Cécile Duflot, qui aura été en réalité le seul enjeu de l’interminable négociation entre Hamon et Jadot, au cœur du mois de février. Il fallait à tout prix sauver la candidature de l’ancienne ministre écologiste et frondeuse là où elle avait été élue (grâce aux voix de la gauche de gouvernement) en 2012. D’où les contorsions les plus audacieuses pour accoucher d’un accord d’appareils à la papa préservant les chances de l’ancienne ministre de rester députée. Duflot, synonyme de renouveau ?

Idem pour Najat Vallaud-Belkacem, qui renonça à se présenter aux législatives 2012 de peur de perdre et donc d’être contrainte d’abandonner son poste de ministre, ce qui lui a garanti cinq années de vie politique au chaud. Sans risque. Vallaud-Belkacem, synonyme de renouveau ?

Idem pour tant et tant de quadras ou de quinquas, de Mathias Fekl, pur produit de la Hollandie molle, à Eric Ciotti, pur produit du sarkozysme dur, de gauche et de droite, qui n’ont pas vu venir la vague du renouveau, initiée par une opinion publique qui demandait du changement pour de bon, la fin de la politique de l’ancien monde, et jugeait ses pratiques non à raison de l’âge des capitaines, mais à raison de l’antiquité des pratiques elles-mêmes.

Oui, la voix de NKM « risque de s’éteindre » dans dix jours. Et aussi celle de Hamon. Et celle de Duflot. Et celle de Vallaud-Belkacem. Et de Valls. Et de Ciotti. Et de bien d’autres. L’ancien monde pleure son extinction, mais il est le seul à la pleurer, sans se demander pourquoi il disparait sans que cela paraisse susciter des regrets éternels parmi les contemporains... Et c’est logique. On ne peut penser le monde de demain en vivant dans le monde d’hier.

 

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