Le don des langues : épisode • 2/4 du podcast Romain Gary, l'obstiné

Romain Gary chez lui. Roman Kacew (1914-1980)  - ULF ANDERSEN / AURIMAGES
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S’il y a bien une "langue de Romain Gary" et une "langue d’Émile Ajar", on peut en réalité compter plus d’une quinzaine d'idiomes dans l’œuvre de cet auteur cosmopolite. Du scandinave au tahitien, du yiddish à l’espagnol, Jean-François Hangouët nous plonge dans cette mosaïque linguistique.

Avec
  • Olivier Mony Critique littéraire
  • Jean-François Hangouët Chercheur indépendant en littérature

Nous connaissons tous cette anecdote étonnante de la carrière de Romain Gary : il n'avouera qu'à l'extrême fin de sa vie que c'est en réalité lui qui se cache derrière l'écrivain "Émile Ajar". S'il a réussi à n'être jamais démasqué, c'est bien parce que la langue d'Émile Ajar n'a rien à voir avec celle de Romain Gary. Jean-François Hangouët nous explique pourquoi :

Il écrit dans un style très nouveau pour lui. Je pense qu'il a dû être même surpris, submergé par ce style. C'est un style qui par rapport aux autres livres de Romain Gary est un peu préfiguré par certains endroits, par exemple dans "Adieu Gary Cooper" (1968), et même très très en amont dans "Tulipe" (1946), il y a des petits passages et certaines formulations qui ressemblent aux formules d'Ajar. Mais effectivement, dans le style de "Gros-Câlin", qui est un style très neuf, il arrive à avoir une langue complètement nouvelle, avec à mon sens deux caractéristiques : le fait qu'il commente son récit - il y a une certaine méta-énonciation - [...], il y a un recul sur la langue [...] ; et le fait que tous les référents ne sont pas explicités.

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En savoir plus : Un certain Romain Gary
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Véritable caméléon de la langue, Gary est aussi polyglotte. C'est ce qui fait, selon Jean-François Hangouët, l'unicité de sa littérature :

Gary convoque des mots de 16 ou 17 langues différentes. [...] La particularité de Gary, c'est qu'il conserve les langues qu'il a acquises, elles s'accumulent.

C'est une performance assez extraordinaire. Je ne connais pas d'autres écrivains qui soient des écrivains à succès en France et aux États-Unis sans qu'aucune de ces deux langues ne soient leur langue maternelle.

Je pense qu'on pourrait l'interpréter en termes de stratégies de territorialisation. Non seulement il arrive dans un lieu, mais il s'approprie aussi la langue du lieu ; il domine le lieu et sa langue par la création.

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Avec Jean-François Hangouët (ingénieur cartographe de formation, fondateur de l'association Les Mille Gary, auteur d'articles et d'ouvrages sur Romain Gary, notamment Romain Gary : À la traversée des frontières, éditeur et préfacier Gros Câlin).

Extraits audio :

  • Romain Gary sur son métier d'écrivain, interrogé par André Bourin en 1969
  • Romain Gary interviewé par Jacques Chancel
  • Tzvetan Todorov sur la place de Romain Gary dans la littérature française

Extrait lu : Gros-Câlin, Romain Gary.

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