Ça se passe en Europe : l’Italie, pays de transit des djihadistes

Lorsqu’il s’agit de la menace terroriste qui frappe l’Europe, tous les chemins, ou presque, semblent mener à Rome. La Péninsule, épargnée pour l’instant par la fureur criminelle djihadiste, n’en est pourtant pas complètement à l’écart : la piste italienne figure pratiquement dans chaque enquête. Neuf djihadistes, auteurs ou complices des différents attentats qui se sont succédés en Europe ces deux dernières années, avaient un lien plus ou moins étroit avec l’Italie, traditionnel pays de transit d’armes et de faux-papiers pour les différents réseaux criminels.

Mohamed Lahouaiej Bouhlel, l’auteur de l’attentat de Nice, y avait ainsi des complices et avait séjourné dans une petite ville des environs de Bari avant le fatidique 14 juillet 2016. Anis Amri , qui avait foncé dans la foule avec un camion à Berlin, a été abattu en pleine cavale à Milan en décembre dernier. Ce Tunisien de 24 ans avait pénétré en Europe en 2011 via l’île de Lampedusa et s’était radicalisé dans les prisons siciliennes, où il avait été incarcéré à la suite d’actes de délinquance.

Montée des inquiétudes

Dernier exemple en date, celui de Youssef Zaghba , le troisième assaillant des attaques perpétrées samedi dernier en plein cœur de Londres. Le jeune homme de 22 ans, né à Fez d’un père marocain et d’une mère italienne convertie à l’islam, a grandi au Maroc mais venait régulièrement dans la Péninsule ces derniers mois retrouver sa mère qui s’est installée près de Bologne. C’est d’ailleurs dans l’aéroport de cette ville qu’il est arrêté en mars 2016. Il a alors seulement un sac à dos, pas d’argent et un aller simple pour la Turquie. Il avoue au policier qu’il veut se rendre en Syrie pour « faire le terroriste ». Dans son téléphone et son ordinateur, on retrouvera des vidéos de propagande de l’ISIS. Pas assez pour que la justice l’inculpe mais suffisant pour les services de renseignement italiens le surveillent et le signalent aux autorités britanniques. Youssef Zaghba passe en effet son temps entre le Maroc et Londres où il travaille dans un restaurant pakistanais. Malgré l’alerte lancée, les forces de l’ordre britanniques ne l’arrêtent pas à la suite d’un contrôle dans un aéroport londonien.

L’Italie se félicite du bon fonctionnement de ses services de renseignement, se sent protégée par la présence sur son territoire d’une communauté musulmane plus réduite, plus récente et plus diffuse que celle de ses voisins, mais s’inquiète des éventuelles infiltrations terroristes avec l’afflux continu de migrants sur ses côtes en provenance de Libye. Les chefs des polices de huit pays du Sud de l’UE se sont réunis ce mercredi à Lampedusa pour organiser une meilleure coopération dans la lutte contre le terrorisme, l’immigration clandestine et les trafics. Franco Gabrielli, chef de la police italienne, a exhorté ses confrères à redoubler d’effort. « Il est difficile d’apprécier la dangerosité des personnes, de prédire le développement d’un parcours de radicalisation. » Il a enfin souligné « l’écart énorme » entre les milliers de signalements et la poignée de personnes passant réellement à l’acte.