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"Le Parti socialiste ne s'en remettra pas"

Jean-Christophe Cambadélis dimanche soir au siège du Parti socialiste.
Jean-Christophe Cambadélis dimanche soir au siège du Parti socialiste. © GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
Interview Adrien Gaboulaud , Mis à jour le

Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion de l'Ifop, analyse pour Paris Match les résultats du premier tour des élections législatives.

Paris Match. Qu'est-ce qui est à vos yeux le fait le plus marquant du premier tour des élections législatives ?
Jérôme Fourquet. L'abstention record, environ 50%. C'est une progression forte par rapport à la présidentielle, avec 30 points supplémentaires d'abstention en quelques semaines seulement. C'est colossal. Il y a également une forte progression par rapport aux législatives de 2012, où il y avait à peu près 60% de votants. C'est un élément signifiant politiquement : toute une partie de la population s'est détournée des urnes, soit par lassitude, soit parce qu'elle pensait que la messe était dite. 

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Quel impact aura l'abstention sur l'issue du vote dimanche prochain?
Elle conditionne les configurations de second tour. Pour se maintenir au deuxième tour, un candidat doit être soit premier ou deuxième, soit avoir obtenu 12,5% des inscrits. Le nombre élevé de candidats -en moyenne 14 par circonscription- combiné à l'abstention induit un seuil de qualification pour provoquer des triangulaires à environ 25% des suffrages exprimés. Il va y avoir énormément de duels et très peu de triangulaires. 

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Emmanuel Macron a réussi à "casser la droite"

Comment qualifiez-vous le score de La République en marche?
C'est une véritable amplification par rapport à la présidentielle. Cela s'explique d'une part par le fait que, dans un contexte très abstentionniste, En Marche! a su mobiliser davantage que les autres. Deux tiers de ses électeurs sont allés voter, contre à peine 45% des frontistes et des mélenchonistes. D'autre part, la bonne performance des candidats LREM s'explique par leur capacité à capter de nouveaux électeurs. Une partie de l'électorat de droite filloniste a adhéré à l'idée selon laquelle il fallait laisser sa chance à Emmanuel Macron. Il y a une part de réflexe légitimiste -c'est lui le président- mais c'est également le résultat de la stratégie du chef de l'Etat : casser la droite en débauchant des personnalités Les Républicains et en envoyant de nombreux signaux sur les sujets régaliens et sur la politique économique et sociale. Emmanuel Macron n'a pas attendu le premier tour pour annoncer les grandes lignes de sa réforme du marché du travail.

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Est-ce un échec pour la droite traditionnelle?
Elle sauve les meubles. Les candidats Les Républicains font à peu près le même score que François Fillon. Cela s'explique parce que l'électorat de droite, qui est en moyenne beaucoup plus âgé, est resté mobilisé. Cela favorise les candidats de droite dans ce contexte de forte abstention. Néanmoins la droite est victime de l'effet de souffle de la présidentielle.

Quel est à vos yeux le bilan du premier tour pour le Front national et la France insoumise?
Les candidats de la France insoumise et du Front national font beaucoup moins bien que leurs champions il y a quelques semaines seulement. L'électorat de ces deux partis est plus jeune et plus populaire, deux catégories qui sont les premières à s'abstenir. Il y a également un effet politique : ces électeurs estiment que la bataille s'est jouée à la présidentielle et que leurs candidats ayant été battus, il n'y a plus vraiment d'intérêt à aller voter. Il y a une démobilisation. Pour la France insoumise, il y a un autre facteur. A la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon était «seul dans son couloir» à l'extrême gauche. Pour ce premier tour, il y a eu des candidats communistes et des candidats Europe Ecologie-Les Verts qui ont attiré chacun de leur côté 2 à 3% des voix.

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"Au PS, une crise de leadership, de positionnement et une crise financière"

Le Parti socialiste a obtenu environ 7,5% des voix. Est-ce la fin? 
C'est un score extrêmement faible, à peine meilleur que celui de Benoît Hamon au premier tour de la présidentielle. Une écrasante majorité de ses candidats a été envoyée au casse-pipe, y compris des personnalités très en vue. C'est du jamais-vu. Le point bas de référence est l'élection de 1993, au terme de laquelle le PS n'avait conservé qu'une cinquantaine de sièges à l'Assemblée nationale. Cette fois, ce devrait être un nombre encore bien inférieur. Vraisemblablement, le Parti socialiste ne s'en remettra pas.

En images : Les figures du Parti socialistes laminées au premier tour

Pourquoi ce score condamne-t-il le PS selon vous?
Il y a un effet quantitatif et qualitatif. La plupart des figures emblématiques du PS vont être défaites. Autour de qui va se recomposer le parti? Avec quels moyens? Quand vous passez de 300 députés à 30 ou 40, le manque à gagner va être colossal. Et enfin, sur quelle ligne? On a vu qu'une partie des candidats socialistes se sont montrés «Macron-compatibles». Il y a une crise de leadership, de positionnement et une crise financière.

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