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FRANCE - ROYAUME-UNI

Des camps de rue au Sacré-Coeur, les réfugiés de Paris montrent leur quotidien

Des migrants pris en photo par un de leurs camarades avec l'appareil distribué par notre Observatrice.
Des migrants pris en photo par un de leurs camarades avec l'appareil distribué par notre Observatrice.
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À quoi ressemble le quotidien des migrants à Paris ? Une jeune bénévole anglaise a fourni, fin 2016, une quinzaine d’appareils photos jetables à des réfugiés. Le résultat a été exposé dans une galerie d’art, à Londres, entre le 2 et le 9 juin .

Amy Lineham travaille dans la distribution. Suivant de près l’actualité des migrants, elle décide en 2016 d’effectuer un bénévolat de cinq semaines en France avec une association qui s’occupe des réfugiés à la Porte de la Chapelle, dans le nord de Paris. Confrontée à la réalité de leur quotidien, elle décide de leur donner le moyen d’évoquer eux-mêmes leur vie dans la capitale française.

Photo de l'exposition dans une galerie d'art, à l'Est de Londres.

"Mon objectif était de mettre des noms et des visages sur des chiffres"

Un jour, à l’accueil de l’association à Porte de la Chapelle, j’ai laissé un message pour dire que je donnais un appareil jetable à quiconque désirait prendre des photos de son quotidien. J’en ai distribué quinze. Beaucoup étaient intéressés par le projet, mais tous ne se sentaient pas la légitimité de franchir le pas. Ils avaient peur de la réaction des gens, ils ne se sentaient pas suffisamment en confiance dans un environnement qui leur était inconnu pour tenter ce genre d’expériences.

Ceux qui ont participé au projet viennent d’Afghanistan, du Soudan et du Pakistan. Ils avaient cinq jours pour me retourner les appareils photos. Mais le jour venu, seulement 8 appareils de retour. Ils m’ont dit que les autres avaient été perdus ou saisis par la police. J’ai tenu à mentionner cette information lors de l’exposition, car elle rend aussi compte de la réalité des réfugiés : le moindre projet, qui serait synonyme de stabilité pour eux, est impossible à concevoir, au vu de leurs conditions de vie.

Un campement de réfugiés. Une des photos prises par les réfugiés.

Un résultat inattendu

J’ai développé une centaine de photos. Je n’ai pas voulu faire une sélection, car j’estime que ce n’est pas mon rôle. Et vu le sujet, comment déterminer ce qu’est une bonne ou une mauvaise photo ?

La plupart des photos traitent de leur quotidien, ils se prennent beaucoup en photos entre eux. Mais j’ai été frappée par quelques photos qui avaient vraiment une dimension artistique, comme celle de ce campement sauvage : on a l’impression que le photographe se tient derrière un grillage, mais il s’agit en fait des rayons du soleil. Celui qui a pris cette photo m’a expliqué qu’il avait fait exprès de se placer à contre-jour pour avoir cet effet.

Le fait que ce soit des appareils jetables leur a rendu la tâche plus difficile puisqu’ils ne voyaient pas ce qu’ils prenaient en photo. Mais en même temps, je pense que cet exercice "à l’aveugle "a donné une autre dimension aux clichés qu’ils ont pris : ça en faisait des souvenirs, non quelque chose qu’ils pouvaient modifier instantanément sur leur téléphone. Cela les a aussi confirmés dans leur statut de "touristes ", car il ne faut pas oublier que malgré leur précarité, ce sont des étrangers qui découvrent un nouveau pays, une nouvelle culture. Par exemple, l’un a pris cette photo du Sacré Cœur.

En juillet 2016, une expérience similaire a été réalisée à Calais par l’ONG Refugees info Bus. Pour eux, comme pour Amy, il s’agit de redonner la parole aux migrants, qui sont souvent des sujets passifs dans les médias.

>> LIRE SUR LES OBSERVATEURS : À Calais, des réfugiés derrière l’objectif pour photographier leur quotidien.

Mon objectif derrière cette exposition était de mettre des noms et des visages sur des chiffres. Ce qui m’a frappée dans le traitement médiatique de la question des réfugiés, c’est que même lorsqu’on parle d’eux avec empathie, que ce soit pour dénoncer les politiques dont ils sont victimes ou pour appeler à un élan de solidarité à leur égard, on les présente toujours comme une masse impersonnelle. On parle toujours d’eux, mais on les laisse rarement prendre la parole. J’ai donc voulu qu’ils puissent s’exprimer d’eux-mêmes, sans filtre, sans médiateur. Qu’ils fassent leurs propres déclarations.

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