Un homme montre son téléphone portable à la frontière belge

A partir de ce 15 juin 2017, les consommations mobiles dans les pays de l'Union européenne sont comprises dans le forfait.

afp.com/PHILIPPE HUGUEN

Dix ans de négociations, de lobbying et de discussions. Ce 15 juin 2017 est une date symbolique pour l'économie européenne. Elle marque la suppression des frais d'itinérance (roaming) pour les voyageurs dans l'Union européenne.

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"Depuis 2007 on avait obtenu des avancées sur les appels, en 2009 sur les SMS et en 2011 sur la Data. C'est une nouvelle étape importante qui est initiée car l'utilisation des smartphones, ça fait marcher les applis et les services numériques. Cela participe à l'économie et à la consommation", note une source proche du dossier au sein de la Commission européenne.

Pourquoi maintenant?

Concrètement, à compter de ce jeudi, "c'est la fin du principe d'itinérance" et des frais qui vont de pair. "A partir d'aujourd'hui vous payez en Allemagne comme si vous étiez en France", indique une source au sein de la Commission européenne qui se félicite de la concrétisation positive pour le grand public d'un travail politique titanesque, lancé en 2004 par l'ancienne commissaire Viviane Reding.

"Les grands opérateurs ont tout fait à l'époque pour m'empêcher de mettre un projet de loi sur la table. Ils ont dépensé des sommes colossales dans des bataillons de lobbyistes. Ils jugeaient inconcevable qu'un responsable politique prépare une loi pour intervenir sur le marché. Mais leurs marges atteignaient presque 100%, c'était franchement de l'arnaque", racontait après coup la commissaire dans L'Opinion cette semaine.

Comment ça marche?

Quand un voyageur français se déplace dans l'un des 27 pays membres de l'Union européenne (plus Norvège, Liechtenstein et Islande), y compris dans les DOM dorénavant et toujours dans le Royaume-Uni jusqu'à sa sortie de l'UE (en 2019), il jouira des conditions tarifaires de son contrat national. A son arrivée dans le nouveau pays, "son opérateur doit lui communiquer les conditions d'utilisation de son forfait", précise une source européenne, affichant le texto reçu personnellement sur son téléphone ce matin. "Vous disposez en France des mêmes conditions qu'en Belgique", est-il écrit.

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Exemple: un Français voyage à Rome et appelle son hôtel italien. C'est compris dans le forfait. A l'inverse, un appel depuis la France vers l'hôtel de Rome sera surtaxé. Ainsi, paradoxe européen, un Français domicilié près de la frontière italienne aura tout intérêt à franchir la bordure pour passer un coup de téléphone international s'il ne veut pas payer une surtaxe.

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© / afp.com/REMY GABALDA

D'autres exceptions sont aussi prévues par la réglementation. A commencer par la durée maximale d'utilisation qui ne doit pas dépasser quatre mois par an, afin d'empêcher tout "dumping commercial entre les pays". Ainsi, "théoriquement, les étudiants Erasmus devraient acheter une carte SIM locale ou être prêts à payer un peu plus pour l'itinérance après au moins deux mois consécutifs à l'étranger. Les nouvelles règles d'itinérance ne sont pas destinées à l'itinérance permanente", note la Commission.

C'est pourquoi de nouveaux plafonds dégressifs pour les tarifs de gros de l'itinérance ont également été fixés. Seulement, la réduction sera progressive, passant de 7,7 euros par Go (en 2017) à 6 euros par Go (en 2018) pour atteindre 2,5 euros par Go en 2022.

Pour vérifier le volume de Data que l'on peut utiliser à l'international, il faut faire un calcul un peu barbare. Par exemple, vous avez un forfait illimité pour 42 euros par mois (35 euros, hors TVA de 20%). Lorsque vous voyagez dans l'UE, vous bénéficiez d'un volume de données d'au moins 9,1 Go [2x(35/7,7) = 9,1].

Quelles conséquences pour les opérateurs?

Pendant longtemps, les frais d'itinérance ont fait figure de vache à lait pour les opérateurs. Selon une étude d'impact mentionnée par la Commission, le montant cumulé des bénéfices dégagés grâce aux frais de roaming s'élevait à 4,7 milliards d'euros en 2012. Cependant, difficile de savoir avec précision ce que la fin de l'itinérance représentera pour les opérateurs, ces derniers ne publiant plus leurs recettes en la matière.

Mais la part de l'itinérance dans l'activité a largement reculé ces dernières années car les prix des appels et SMS ont baissé de 90% depuis 2007, alors que ceux des données ont chuté de 96% depuis 2012 pour un trafic multiplié par 100, selon l'UE.

Roaming UE

Infographie sur le roaming (les frais d'itinérance) réalisée par la Commission européenne

© / UE

En fait, la situation varie fortement d'un pays à l'autre, entre ceux qui profitent des revenus liés au tourisme, principalement le sud de l'Europe (et notamment la France), quand d'autres sont moins concernés, plus au nord.

Dans l'hexagone, chaque opérateur à plus ou moins anticipé cette révolution commerciale. Free a élargi la gratuité de l'itinérance dès mars tandis qu'Orange et Bouygues ont mis fin aux frais en mai, SFR suivant le mouvement ce 15 juin. En Italie, le premier opérateur Wind-Tre assure s'être "aligné sur les demandes européennes en avance de deux mois" quand son principal concurrent, l'opérateur historique TIM, a prévu de "d'observer le nouveau règlement à partir du 15 juin", jour de son entrée en vigueur. Le début d'une nouvelle ère pour le consommateur européen.

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