À Bordeaux, la vague Macron secoue la maison Juppé

Trois adjoints au maire de Bordeaux se présentaient aux législatives, aucun n'a été élu. Le chemin de croix de l'ancien champion de la droite se poursuit.

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Alain Juppé n'est plus duc d'Aquitaine : les candidats de La République en marche l'emportent presque partout.
Alain Juppé n'est plus duc d'Aquitaine : les candidats de La République en marche l'emportent presque partout. © GEORGES GOBET / AFP

Temps de lecture : 4 min

Il s'était préparé depuis longtemps à la bataille, mais il avait vu scrutin après scrutin ses espoirs fondre comme neige au soleil. En quelques mois, Nicolas Florian, candidat (LR) dans la première circonscription de Bordeaux, a vécu une lente descente aux enfers, commencée avec l'échec du « patron » Alain Juppé, dont il est l'adjoint aux finances, à la primaire de la droite, poursuivie avec l'enlisement filloniste à la présidentielle jusqu'à la victoire d'Emmanuel Macron, sacré ici à Bordeaux comme ailleurs. Le calvaire de ce quadra de la droite girondine s'est achevé dimanche, avec le score final des législatives.

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Ce fidèle juppéiste savait qu'il ne pourrait remporter la circonscription centrale de Bordeaux – détenue par la socialiste Sandrine Doucet – qu'à une condition : le retour au bercail des électeurs de la droite et du centre séduits par les sirènes macronistes. Las, le secrétaire départemental des Républicains a été emporté par la vague La République en marche, sur laquelle a surfé une novice inconnue, Dominique David. Un scrutin plombé par une abstention massive : 60 % des électeurs ne se sont pas rendus aux urnes pour ce second tour.

La maison Juppé sort secouée et sonnée de ces législatives.

Dans la deuxième circonscription bordelaise, c'est pire encore. L'abstention est de 62 % et la candidate juppéiste Anne Walryck réalise un moins bon score que son collègue Nicolas Florian (36,2 % contre 40,41 %) face à la responsable départementale de REM, Catherine Fabre. Deuxième camouflet pour Alain Juppé, dont Anne Walryck est une protégée de longue date, élue depuis vingt-deux ans à ses côtés et aujourd'hui vice-présidente de la métropole. Ce territoire est la « circonscription du maire » depuis 1935 – essentiellement de Jacques Chaban-Delmas, qui y fut élu plus de quarante ans (par intermittence). Alain Juppé, en 2007, s'y était vu ravir son siège par la socialiste Michèle Delaunay. On pensait que l'heure de la revanche avait sonné. Là encore, c'était sans compter avec la force de la vague macroniste.

À ces échecs s'ajoute l'inattendue défaite de Marik Fetouh dans la troisième circonscription : largement en tête au premier tour (33 % contre 19 %), il est finalement battu par le candidat de La France insoumise, Loïc Prud'homme. Certes, le jeune centriste perd 131 voix sur une circonscription très à gauche, dont une partie est située sur le fief béglais de Noël Mamère – elle lui était réservée par le PS –, lequel a, entre les deux tours, appelé à voter pour le mélenchoniste. Marik Fetouh n'est pas un juppéiste – MoDem, il courait sous les couleurs de La République en marche –, mais il est l'un des adjoints au maire de Bordeaux, que ses proches mettent en avant.

« La maison Juppé sort secouée et sonnée de ces législatives, commente le politologue Jean Petaux. Mais il faut replacer ces résultats dans un contexte : la droite LR-UDI n'a plus un seul député en Gironde et même dans toute l'ex-Aquitaine. Plus globalement encore, dans la Nouvelle-Aquitaine, ils ne sont que deux : Didier Quentin à Royan et Frédérique Meunier, qui bat de 25 voix la REM Patricia Bordas à Brive. » Le PS détenait 10 des 12 circonscriptions de la Gironde (la douzième, celle du bassin d'Arcachon, où était élu Yves Foulon, était la seule à droite), il n'en a plus qu'une seule (celle du maire de Cenon Alain David, qui bat de peu le candidat macroniste) et REM s'est emparé de 10 !

Miracles

Lourdes n'est pas loin, mais, dans le camp Juppé, il y a longtemps que l'on ne croit plus aux miracles… Le « patron » a fait le job en soutenant activement Nicolas Florian et Anne Walryck, comme il s'y était engagé, mais, même quand on s'appelle Juppé, difficile de contenir une vague électorale aussi puissante… « Les électeurs ne fonctionnent plus à la consigne, constate Ludovic Martinez, directeur de cabinet du maire de Bordeaux et ancien journaliste. La dynamique annoncée a été suivie. » Le paradoxe cruel dans ce destin est qu'Emmanuel Macron est en train de mettre en œuvre des propositions juppéistes, avec des hommes qui ont contribué à les façonner – notamment l'actuel Premier ministre Édouard Philippe, qui fut le porte-parole d'Alain Juppé pendant la primaire, ou Jean-Michel Blanquer pour la partie éducation.

Ce revers électoral de plus entrave-t-il l'avenir politique du maire de Bordeaux ? « Aucun élément à partir des résultats des législatives ne permet de le dire », soutient Jean Petaux. « Nous sommes plus dans le questionnement pour construire et préparer les prochaines échéances que dans les regrets ou les affirmations, souligne Ludovic Martinez. Ces résultats, dans le contexte où ils sont arrivés, ne préjugent en rien de la suite. Si les élections municipales avaient lieu demain matin, Alain Juppé serait réélu avec 60 % des voix. »

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Commentaires (18)

  • Simple réflexion

    Parti caméléon. Étiquettes "droite" en période électorale. Énarques avant tout. Pour le reste, fascinée par le PS comme une proie par un serpent, incapable de déjouer le piège concocté par Mitterrand qui lui a lancé le FN dans les pattes comme un chien dans un jeu de quilles. Au gouvernement, décisions plus PS tendance "gouvernementale" que droite authentique. Au final, les électeurs n'y ont guère vu de différence alors logiquement, le coup de balai post-hollandien les a a aussi emportés.
    Pour la France, que reste (ra) -t-il de positif de la longue carrière de Juppé ? Je cherche...

  • JLL

    Et apparemment ils ne veulent plus des vieux briscards, comme Anne Walrick, ou de jeune arrogant comme Nicolas Florian.

  • graindesel

    Qu'on le veuille ou non c'est la marque Chirac (qui ne fonctionnait QUE pour lui... )