L'intersexe expulsé de France vers le Maroc «va se faire lyncher», craint son avocate

La France vient d'expulser vers le Maroc une personne possédant des caractéristiques physiques et génitales tant masculines que féminines. Son avocate s'indigne.

ILLUSTRATION. Condamné à 12 ans de prison pour actes de torture, viol et menaces de mort, la personne intersexe a été expulsée mercredi vers le Maroc.
 
ILLUSTRATION. Condamné à 12 ans de prison pour actes de torture, viol et menaces de mort, la personne intersexe a été expulsée mercredi vers le Maroc.   LP/M.G.

    Celui qui se fait appeler Tarek, malgré la mention «sexe féminin» sur son état civil, est reparti vers le Maroc, contraint et forcé. Cette personne intersexe, c'est-à-dire possédant des caractéristiques physiques et génitales tant masculines que féminines, a été expulsée mercredi par la France vers le Maroc, révèle l'AFP ce vendredi.

    Une décision que son avocate ne comprend pas, l'homosexualité étant pénalement réprimée dans ce pays du Maghreb. «Cela tombe sous le sens que cette personne ne peut pas survivre longtemps au Maroc. Vu son apparence, il va se faire lyncher», s'est indignée son avocate Me Séverine Rudloff, regrettant que «la protection contre les traitements inhumains et dégradants» inclus dans la Convention européenne des droits de l'homme n'ait pas été retenue au bénéfice de son client.

    Du côté du ministère de l'Intérieur, on affirme pourtant que tout a été fait dans le respect des règles. «La situation de cette personne a été examinée conformément à la réglementation en vigueur. Il a été mis en mesure de faire valoir l'intégralité de ses droits tant auprès des juridictions nationales qu'européennes. Aucun élément en notre possession ou produit par ce dernier ou son conseil n'atteste qu'il serait exposé à un risque particulier en cas de retour au Maroc», déclare-t-on, place Beauvau.

    Condamné en France à douze ans de prison

    Arrivé lundi au centre de rétention du Mesnil-Amelot, près de Roissy, Tarek, qui n'a pas demandé l'asile en France, «a été éloigné (...) à destination de Casablanca et sous escorte renforcée en raison de sa dangerosité», selon une source proche du dossier. La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait classé son dossier sans suite. Il avait été condamné en France à douze ans de prison pour actes de torture, viol et menaces de mort, selon cette source.

    Lundi, le tribunal administratif de Strasbourg, saisi en référé liberté, avait refusé de suspendre l'arrêté d'expulsion du 14 juin prononcé à son encontre, estimant notamment qu'il ne serait pas «personnellement exposé à des risques» du fait de son identité intersexuée, d'après l'ordonnance dont l'AFP a eu copie.

    «Il risque vraiment de mourir»

    Un optimisme que ne partage donc pas l'avocate de Tarek. «Le Maroc est un pays qui n'est vraiment pas accueillant pour une personne comme le requérant, a insisté Me Mila Petkova. Il risque vraiment de mourir. Ce n'est pas une fiction.» Âgé de 40 ans, Tarek, suit un traitement hormonal masculinisant mais porte la mention «sexe féminin» sur son état civil. «Tarek, qui est considéré comme une fille, a toujours eu des relations avec des filles», a souligné Me Rudloff.

    Au Maroc, l'homosexualité est considérée comme un délit passible de six mois à trois ans de prison. Les arrestations pour homosexualité y sont monnaie courante.