Partager
Santé

Alimentation : les graisses réhabilitées

Les lipides, indispensables à l’organisme, devraient apporter 35 à 40 % des calories quotidiennes chez un adulte. Mais attention à équilibrer les acides gras oméga 3 et oméga 6.

1 réaction
Huile d'olive

L'huile d'olive, pilier du régime méditerranéen, est riche en acide oléique (oméga 9) et polyphénols qui contribue à la prévention des maladies cardiovasculaires.

© DAZAY/SIPA

Ennemies publiques numéro un ! Honnies depuis plus d’un demi-siècle, les graisses ont été considérées comme les adversaires de nos artères et les responsables de la prise de poids. Début de réhabilitation ? Les avis des spécialistes sont désormais beaucoup moins tranchés. Au point que le postulat qui a conduit à les bannir de nos assiettes pourrait bien être au final… responsable de l’épidémie actuelle d’obésité et de maladies cardiaques aux États-Unis ! "Lorsqu’elles ont été réduites dans l’alimentation, l’obésité a augmenté car les gens ont consommé plus de sucres. C’est ce qui s’est passé aux États-Unis à partir des années 1980", explique Philippe Legrand, directeur du Laboratoire de biochimie-nutrition humaine à l’Inra.

Ces nouveaux éléments ont poussé l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) à revoir à la hausse la part des lipides recommandée dans l’alimentation : 35 à 40 % des apports caloriques de la journée pour un adulte consommant 2000 kcal, contre 30 à 35 % avant 2010. Les lipides sont, en effet, indispensables à l’organisme. Ils assurent la fluidité des membranes cellulaires et constituent une réserve d’énergie. Le cholestérol est lui aussi essentiel ! Il intervient en particulier dans le fonctionnement et le développement du cerveau, notamment au niveau des cellules nerveuses, et dans la production d’hormones sexuelles (testostérone, œstrogènes…) et de cortisol. S’en priver constitue donc un risque pour l’organisme. Désormais, aucune graisse alimentaire n’est plus à proscrire totalement, hormis celles dites trans artificielles (acides gras trans) dont la nocivité est avérée.

À chaque acide gras, ses propriétés spécifiques

Pourtant, toutes ne se valent pas et il faut bien se repérer dans les grandes familles de lipides. Point commun : elles sont toutes composées de triglycérides, des acides gras aux propriétés spécifiques dont aucun n’est inutile. Néanmoins, certains sont meilleurs que d’autres, à commencer par les acides gras polyinsaturés qui méritent une attention particulière. Les plus connus sont l’acide linoléique ou oméga 6 (O6) et l’acide alpha-linolénique ou oméga 3 (O3). Ils sont dits essentiels car l’organisme, qui ne sait pas les fabriquer, les puise dans l’alimentation pour fluidifier le sang, prévenir l’infarctus et lutter contre la dépression grâce à son action sur le cerveau (pour l’O3) et produire des composés inflammatoires nécessaires au système immunitaire (pour l’O6). Les O3 se retrouvent dans les poissons gras, les épinards, la mâche… et les O6 dans les huiles végétales et certaines graisses animales. Attention : leurs apports doivent être équilibrés car ce sont les mêmes enzymes qui les métabolisent.

Ainsi, trop d’O6 favorise l’inflammation et annihile l’action bénéfique des O3. Le rapport idéal étant d’un O3 pour moins de cinq O6. Or, aujourd’hui, l’alimentation d’origine industrielle est très riche en O6 et le ratio se situe plutôt autour de un O3 pour 12, voire 15 O6 ! L’Anses recommande donc d’augmenter sa consommation d’O3 (exemple : 200 g de sardines en boîtes en apportent 2 g). Ces recommandations s’appuient notamment sur l’étude de Lyon (1999), la première à démontrer au plan international l’effet protecteur pour le cœur du régime méditerranéen. Dans cet essai clinique, les personnes ayant le plus faible risque de maladies cardio-vasculaires étaient celles qui avaient le moins consommé d’O6 au profit des O3.

Les oméga 3 protègent des maladies chroniques

D’autres études ont confirmé qu’un rapport élevé d’O6 sur les O3 augmente le risque de maladies chroniques (pathologies cardiaques, cancer, polyarthrite rhumatoïde, maladies auto-immunes…) alors qu’un taux important d’O3 les réduit. De même, des chercheurs français ont montré qu’un excès d’O6 et un manque d’O3 chez des souris encourageaient l’obésité. En contribuant à la prévention des maladies cardio-vasculaires et de l’hypertension artérielle, les acides gras mono-insaturés (AGMI) sont également plutôt protecteurs. Le principal est l’acide oléique ou oméga 9. Pilier de l’alimentation méditerranéenne, l’huile d’olive en contient environ 70 %. Il est également présent dans l’huile de colza, les avocats et certains fruits secs et peut constituer 15 à 20 % des apports énergétiques quotidiens.

Les scientifiques vont-ils cependant jusqu’à réhabiliter les acides gras saturés (AGS), longtemps accusés de favoriser les maladies cardio-vasculaires ? Ceux-ci sont majoritairement présents dans les aliments d’origine animale (viande, produits laitiers, beurre) et dans certaines huiles végétales (coco, palme). Là encore, leur exclusion à tout prix n’est plus de mise tant ils sont différents les uns des autres. Une revue de 72 études scientifiques publiée en 2014, portant sur 600 000 personnes dans 18 pays, a en effet démontré qu’ils n’étaient pas tous à risques. "Il ne faut pas les éliminer de ses menus, souligne Philippe Legrand. Les acides gras saturés ne provoquent pas de maladies cardio-vasculaires tant qu’ils ne sont pas consommés en excès." Selon l’Anses, ils sont sans risque quand ils apportent jusqu’à 12 % des calories journalières (soit environ 26 g pour 2000 kcal) et 8 % pour les acides palmitique, myristique et laurique, principales graisses saturées du beurre, par exemple. Soit en pratique moins de 15 g par jour de beurre, juste de quoi tartiner son pain le matin ou agrémenter ses haricots verts. À condition de bien le choisir car tout commence… dans le pré ! La composition en acides gras saturés et insaturés étant plus équilibrée chez les animaux qui mangent de l’herbe.

Par Brigitte Bègue

1 réaction 1 réaction
à la une cette semaine

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite recevoir toutes les alertes infos de la rédaction de Sciences et Avenir

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Santé
Nature
Archéo
Espace
Animaux
Je ne souhaite plus recevoir de notifications