La pilule abortive disponible gratuitement au Québec cet automne
L’annonce attendue depuis des mois n’est toutefois pas une solution miracle selon plusieurs professionnels
La pilule abortive sera finalement disponible gratuitement au Québec dès l’automne prochain, une décision bien accueillie par les professionnels, même s’il ne s’agit pas d’une solution magique.
« C’est une excellente nouvelle, se réjouit le Dr Jean Guimond, spécialisé dans les avortements. C’est clair que si ça n’avait pas été gratuit, tous les professionnels auraient refusé de la prescrire. »
« Les jugements de la cour sont clairs. L’avortement doit être gratuit », ajoute-t-il.
Approuvée par Santé Canada en juillet 2015 et accessible depuis janvier dernier, la pilule abortive (Myfegymiso) n’est toujours pas disponible dans la province.
Depuis quelques mois, de nombreuses discussions étaient en cours, notamment pour statuer sur la gratuité et la façon de la distribuer.
« Il me fait plaisir d’annoncer que le gouvernement du Québec rendra couverte par notre régime d’assurance maladie l’administration du Mifegymiso aux femmes du Québec », a confirmé le ministre de la Santé, Dr Gaétan Barrette, jeudi.
D’une valeur de 300 $, la pilule permet de mettre fin à une grossesse de 49 jours ou moins sans chirurgie. (Voir encadré)
« Pas une pilule miracle »
« C’est une grosse avancée, mais il faut que ce soit bien encadré, nuance le Dr Guimond, qui croit que cette option demeurera marginale au début. Ce n’est pas une pilule miracle. »
« Ce n’est pas comme si on prenait une pilule, et c’est fini, la grossesse disparaît magiquement, ajoute France Désilets, directrice de la clinique Morgentaler, à Montréal. Ça peut être douloureux, les saignements peuvent être abondants. »
Selon elle, de 15 % à 20 % des femmes admissibles pourraient choisir cette option. Mme Désilets croit aussi que les patientes d’origine étrangère (dont les Françaises) pourraient être davantage intéressées, puisque cette solution y est disponible depuis plus de 25 ans.
À noter que la femme qui prend la pilule abortive devra revoir le médecin dans les jours suivants pour assurer que l’avortement est complet.
« Ça peut causer un problème si la femme ne revient pas », s’inquiète le Dr Guimond.
Distribution
Par ailleurs, une des raisons qui explique le délai était de savoir qui distribuera la pilule. Jeudi, le ministre a souligné que les ordres professionnels des médecins et des pharmaciens devront fournir un guide de pratique avant que la pilule soit disponible.
Selon le Collège des médecins du Québec (CMQ), deux scénarios sont étudiés : soit le docteur remettra la pilule à la patiente ou cette dernière devra se la procurer à la pharmacie.
« De savoir comment [ça va être distribué], ça va se régler vite, promet le Dr Yves Robert, secrétaire du CMQ. On ne veut pas créer de délai à l’accessibilité. »
La Régie de l’assurance maladie du Québec gérera le programme d’accès.
La pilule abortive en bref
- Coûte 300 $
- Permet l’avortement jusqu’à 49 jours
- La patiente doit d’abord rencontrer un médecin pour confirmer la grossesse et assurer le consentement libre et éclairé
- Elle doit prendre deux médicaments différents, à 24 h ou 48 h d’intervalle S’ensuit l’avortement à la maison
- Utilisée dans 60 pays dans le monde depuis près de 30 ans
Coût de l’avortement*
- 300 $ Pilule abortive (plus les honoraires des professionnels)
- 327 $ En établissement public (chirurgie)
- 571 $ En clinique privée (chirurgie)
*Coût au premier trimestre (moins de 14 semaines) Les frais sont déboursés par le gouvernement dans tous les cas
Source : MSSS
Pilule abortive | Avortement chirurgical | |
Procédure | Deux médicaments pris à 24 h ou 48 h d’intervalle | Aspiration, succion et curetage par un médecin |
Durée | 4 à 6 h après le 2e médicament, jusqu’à quelques jours | 5 à 7 minutes |
Nombre de visites chez le médecin | 2 au moins | 1 seule |
Taux de réussite | 95,2 % à 98 % | Plus de 99 % |
Jours de congé | 2 à 3 jours | Journée de l’intervention |
Douleur | Modérée à forte | Légère à modérée |
Saignements | Modérés à intenses au début, légers ensuite | Aucun ou légers à modérés |
Effets secondaires de la médication | Nausée, frissons (rare : vomissement, diarrhée) | Nausée, somnolence |
Principal avantage | Plus d’intimité à domicile | Intervention rapide, personnel médical sur place |
Source : Clinique Morgentaler
- Avec la collaboration de l’Agence QMI