LORRAINE - Demandeurs d’asile Migrants : le camp de la honte à Metz

Gérard Collomb présente mercredi son plan d’action pour l’asile. Metz, où se situe le guichet d’accueil pour la Lorraine, n’arrive plus à faire face. Les migrants y sont entassés dans un camp insalubre qualifié de « bidonville d’État ».
Philippe MARQUE - 09 juil. 2017 à 05:04 - Temps de lecture :
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Ils sont parqués avenue de Blida, une impasse méconnue des Messins, à dix minutes à pied de l’hypercentre. Leurs voisins immédiats sont l’usine d’incinération de traitement des déchets, un échangeur routier, un camp de gens du voyage, le foyer Amli et un cimetière. Voilà l’horizon offert par la préfecture de Moselle aux migrants qui échouent sur son sol. Chaque année depuis 2013 – sauf en 2015 où l’Allemagne a relâché sa politique d’accueil – l’histoire s’y répète inlassablement.

Metz abrite le dispositif de premier accueil des demandeurs d’asile pour l’ensemble de la Lorraine. Les passeurs véreux connaissent ce guichet unique. Ils y déversent en flot continu de nouveaux arrivants après leur avoir vendu du rêve et ponctionné leurs dernières économies. « Depuis le 1er janvier, nous avons recensé 2 512 arrivées, dont 414 pour le seul mois de juin. Or, nos capacités d’hébergement dans le département sont de 1 500 places. Techniquement, vous voyez bien que ce n’est pas possible », explique avec gravité Anoutchka Chabeau, directrice départementale de la Cohésion sociale. Sa priorité : héberger d’abord les plus vulnérables. Elle a réussi à le faire jusqu’au 24 mars. Depuis, c’est le chaos.

Face à l’afflux de tentes Décathlon premier prix dans des endroits emblématiques de la ville, la préfecture, en accord avec la mairie, a rouvert en avril cet ancien parking de bus. À Metz, c’est là qu’on cache la misère. Si 680 demandeurs d’asile y sont recensés, ils sont, selon l’État, 285 à y vivre actuellement jour et nuit. La société civile a fourni les tentes. L’État a installé neuf toilettes, dix douches et quelques équipements de cuisine. Le site est immense. Mais dans sa crainte d’offrir des conditions trop confortables favorisant le fameux appel d’air, l’État oblige ses occupants à s’entasser sur une minuscule partie délimitée par un grillage. Un cynisme terrible…

Il en résulte un mini-Calais, sans ombre, écrasé par la chaleur, et dégageant une odeur nauséabonde. Les tensions entre communautés y sont souvent vives, sous les effets conjugués de l’alcool et de la promiscuité. Pour éviter que des systèmes mafieux n’y fassent régner terreur, racket et prostitution, comme par le passé, l’État a réquisitionné l’Adoma (société d’économie mixte en charge de l’hébergement solidaire) pour lui confier l’entretien, la sécurité et la coordination des lieux. Une gageure à en juger par l’insalubrité rampante qui gagne ce camp d’infortune. Dernier exemple en date, ce liquide pestilentiel qui s’écoule du bloc sanitaire pour se faufiler entre les tentes.

Malika et Nadège, de Médecins du monde, ont assuré jeudi une quarantaine de consultations : « Nous constatons beaucoup de troubles liés à l’anxiété et de problèmes ORL, dermatologiques ou gastriques, avec de la constipation. Tout cela est lié aux conditions de vie, d’hygiène ou climatiques. » Ce qui les amène à cette conclusion sans concession : « Pour nous, c’est un bidonville d’État. Il n’y a là aucune norme afférente à un camp humanitaire. »

À voir notre reportage vidéo sur notre site internet.

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