Crèches : ce demi-milliard d’euros que l’Etat n’a pas utilisé en 2016

523M€ qui devaient servir à créer des places en crèches n’ont pas servi, faute d’une action et de projets concertés. Faute aussi, selon certains, d’un soutien plus franc de l’Etat aux collectivités locales.

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Illustration. LP/Guenaele Calant

    L'information risque d'irriter bon nombre de parents en quête de mode de garde pour leur bébé : 523 M€ destinés à la création de places en crèche n'ont pas été utilisés en 2016.

    « Ce qui est présenté au plan comptable comme une bonne nouvelle apparaît au contraire catastrophique pour la politique familiale et sociale du pays ! » s'émeut Michel Langlois, président honoraire de la Caisse d'allocations familiales de Seine-Saint-Denis et ancien administrateur à la CNAF (caisse nationale d'allocations familiales). Il vient ce lundi d'adresser une lettre ouverte à Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la santé ainsi qu'aux responsables des groupes parlementaires.

    En 2016, le fonds national d'action sociale, qui finance principalement les places en crèches, a commencé l'année avec un surplus de crédits, comme l'expliquait le quotidien les Echos le 27 juin. Le budget initial de 5,9Md€ s'est limité à 5,4Md€. Le directeur général de la Cnaf, Daniel Lenoir, qui évoquait alors une surdotation, ne souhaite manifestement plus s'exprimer sur le sujet, renvoyant vers son ministère de tutelle.

    « On a déjà connu une sous exécution (non-consommation des crédits), mais d'une telle ampleur, c'est inédit » concède Jean-Louis Deroussen. Ces moyens sont alloués dans le cadre d'une convention d'objectifs. Or les objectifs n'ont pas été réalisés. Si tel est le cas, c'est, selon plusieurs observateurs, en raison de la baisse des dotations de l'Etat pour les collectivités locales. Manquant de subsides, les acteurs locaux y réfléchissent désormais à deux fois avant d'investir dans la création de places en crèche.

    « Si l'Etat ne s'engage pas davantage dans le fonctionnement des crèches, c'est comme demander aux collectivités locales de construire des écoles ou des collèges sans y mettre les enseignants ! », réagit-on au conseil départemental de Seine-Saint-Denis.

    Alain Feretti, président du département petite enfance et parentalité à l'Unaf (Union nationale des associations familiales), dénonce un arrangement avec les comptes publics : « Pour faire baisser le déficit de la Sécurité sociale, l'Etat s'est servi de la branche famille (NDLR : dont fait partie la Caf) comme d'une variable d'ajustement. »

    Or ce demi-milliard aurait bien fait l'affaire d'autres projets, eux aussi financés par les Caf. « Les départs en vacances des plus démunis, des projets de soutien à la parentalité, pour éviter que les jeunes ne cèdent aux sirènes de Daech… », estime Jean-Louis Deroussen, président de la Cnaf depuis 2006.

    Sollicité ce jour, le ministère des solidarités et de la santé n'a pas fait connaître sa réaction.