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Une Française et ses 4 enfants retenus par l'armée irakienne: "Les sortir de là est une obligation morale"

INFORMATION RMC - Quelques jours après la reprise de Mossoul, les avocats d'une Française et de ses 4 enfants arrêtés par l'armée Irakienne ont interpellé mercredi les autorités pour qu'elles rapatrient au plus vite cette famille en France.  C'est la première fois que la France, qui rechigne à faire revenir sur son sol des ressortissants qui avaient rejoints Daesh, doit faire face à ce type de cas en Irak.

Cette Française de 27 ans, arrêtée samedi par l'armée irakienne, vivait recluse avec ses 4 enfants depuis 3 semaines dans un immeuble de Mossoul, miraculeusement épargné par les bombardements. Impossible de s’enfuir, car dehors elle était la cible des snipers de Daesh qui abattaient les déserteurs autant que les forces spéciales irakiennes. C'est finalement l'armée irakienne qui l'a arrêtée aux dernières heures de la bataille de la ville, avec ses quatre enfants, âgés de 5 mois à 6 ans.

Sur une photo prise par un soldat irakien, on les voit dans un char. Sur un autre cliché dans une salle, assis. Les enfants, regard dans le vide, tiennent une bouteille d’eau dans la main, le bébé lové dans les bras de sa mère. Ils paraissent affamés et très affaiblis. Ils sont encore recouverts de la poussière qui blanchit les quartiers de la ville dévastée. Le père lui, n’a pas été arrêté avec le reste de la famille, et l'on ignore aujourd’hui ce qu’il est devenu. C'est la première fois qu'une française partie en Irak se retrouve dans cette situation. 

"Une forme d'omission de porter secours à des enfants français en danger"

Originaire de Seine et-Marne le couple était parti en 2015 pour rejoindre l'Etat islamique en Syrie, puis en Irak. Mais depuis un an ils affirmaient ne plus soutenir l'organisation terroriste et souhaitaient rentrer un France. Leur famille a contacté le consulat de France à Erbil à de multiples reprises, demandant de l'aide pour les faire sortir, mais les autorités ont toujours refusé. Leur seul conseil: "mettre des bracelets aux enfants avec leur nom pour les identifier plus facilement en cas de décès".

Les avocats de cette jeune femme et de sa famille, Maitres William Bourdon et Vincent Brengarth, ont sollicité mercredi à leur tour le consul d'Erbil et le parquet de Paris. Ils demandent aux autorités françaises "de prendre des mesures immédiates pour s'assurer que les enfants sont bien traités et que cette famille puisse retourner vers la France au plus vite". Une obligation morale et juridique selon eux, compte tenu de la présence d'enfants en bas âge. "Sinon c'est une forme d'omission de porter secours à des enfants français en danger", estime William Bourdon. "Ensuite, si on estime que cette femme doit être jugée en France, elle le sera, et ses enfants devront être confiés, si possible à l'entourage familial pour limiter les immenses perturbations qu'ils ont dû endurer."

La crainte d'attentats sur le sol français

Ces derniers mois, la France tente d'éviter les retours de ressortissants français, cherchant même à éliminer sur place des combattants français de l'Etat islamique par crainte qu'ils ne reviennent pour commettre des attentats, selon plusieurs sources militaires françaises et irakiennes. "Une position cynique et une déshumanisation totale", pour William Bourdon qui estime que cette jeune femme est une victime collatérale, elle-même menacée par Daesh.

"Il y a de nombreux Français dans son cas, partis sur un coup de tête, embrigadés, avec un mélange de naïveté et qui ont été dans une désillusion absolue. Il faut faire du cas par cas".

Selon les derniers chiffres du ministère de l'Intérieur, 460 enfants français sont nés ou partis en Syrie et en Irak. 57 mineurs dont une dizaine nés sur place sont rentrés en France. Sollicité sur la coopération entre l’Irak et la France, le ministère des Affaires étrangères n'a pas répondu à nos questions. En Irak, les membres de l’État islamique risquent la peine de mort.

La réaction du ministère des Affaires Etrangères

Sollicité, le ministère des Affaires Etrangères affirme que les autorités irakiennes gardent "la possibilité de poursuivre en justice les ressortissants français impliqués dans des organisations terroristes présentes en Irak". Sans préciser s'il a été informé de la détention de cette famille, le Quai d’Orsay affirme qu’il exercerait "naturellement la protection consulaire prévue par la convention de Vienne du 24 avril 1963" dans le cas où des Français seraient détenus?

"Cette protection consisterait notamment à nous assurer des conditions de détention des intéressés ainsi que du respect des droits de la défense. Nous serions par ailleurs particulièrement vigilants sur la situation des enfants mineurs."
Claire Andrieux avec Céline Martelet (et P. G.)