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Attentat de Nice : « Paris Match » reste en kiosques

Le parquet de Paris demandait en urgence le retrait de l’hebdomadaire, qui a publié des images issues de la vidéo de surveillance du 14 juillet 2016.

Par  (avec AFP)

Publié le 12 juillet 2017 à 22h33, modifié le 13 juillet 2017 à 22h27

Temps de Lecture 4 min.

Des messages déposés sur le mémorial de Nice en mémoire des victimes, le 11 juillet.

Paris Match restera en kiosques. Le tribunal de grande instance de Paris a décidé, jeudi 13 juillet, de ne pas interdire la vente de l’hebdomadaire contenant des images issues de la vidéosurveillance de l’attentat de Nice, qui suscite la colère des victimes et de leurs proches. En revanche, toute nouvelle diffusion des photos incriminées est interdite, y compris sur Internet.

La justice a relevé la « recherche évidente de sensationnel » de deux des photos, qui selon elle « portent atteinte à la dignité humaine » et « n’apportent rien de nouveau au droit à l’information légitime du public sur les faits ». Mais « le retrait des kiosques du numéro litigieux ne saurait constituer une mesure efficiente, dès lors que le numéro litigieux est déjà en vente », ont estimé les juges.

Malgré ce commentaire relativement sévère, Paris Match s’est « félicité », jeudi soir, de la décision du tribunal. « Paris Match défend le droit des citoyens à être informés et à connaître la vérité, et le droit des victimes que nous avons rencontrées à témoigner pour qu’on ne les oublie pas », a précisé l’hebdomadaire du groupe Lagardère.

Le parquet de Paris avait assigné en référé Hachette Filipacchi Médias et la directrice de la publication de Paris Match, « demandant au tribunal d’ordonner le retrait de la vente » du magazine et « l’interdiction de diffusion sous tous formats, notamment numérique ».

Joint par Le Monde, le directeur de la rédaction de Paris Match, Olivier Royant, a dénoncé une demande « sans fondement ». « [Paris Match] exercera avec responsabilité mais avec fermeté sa liberté d’informer, qui est un fondement de la démocratie », déclare-t-il.

« Ces captures d’écran portent atteinte à la dignité des victimes »

Des associations de victimes avaient protesté mercredi contre cette publication. Les photos « extraites des bandes de vidéosurveillance de la ville de Nice et placées sous scellés (…) portent atteinte à la dignité des victimes et de leurs proches », avait estimé l’avocat de la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (Fenvac), Eric Morain.

L’avocat avait appelé le parquet antiterroriste de Paris « à faire cesser ce trouble manifestement illicite ». Cette requête était aussi soutenue par l’association Promenade des anges, qui rassemble les proches des victimes de l’attentat au camion bélier qui a ensanglanté la promenade des Anglais le 14 juillet 2016.

« Ces captures d’écran, publiées sans précaution aucune, portent atteinte à la dignité des victimes et de leurs proches » et sont publiées « uniquement pour faire du sensationnel » et « créer une atmosphère morbide et voyeuriste », ont dénoncé les associations. Christian Estrosi, le maire de Nice, a, lui aussi, critiqué la publication d’images « insoutenables et abjectes ».

Les médias appelés à « la retenue » après l’attentat

Mais pour l’avocate du journal, Me Marie-Christine Percin, « le sujet de Paris Match sur le 14 juillet est au contraire un hommage aux victimes et aux rescapés ». Dans un texte publié sur Parismatch.com, le directeur de la rédaction de l’hebdomadaire, Olivier Royant, assure qu’« il s’agit de vues de loin, de plans larges, sans identification possible des victimes ni atteinte à leur dignité. Elles sont publiées dans un souci de compréhension des événements ».

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« Nous traitons l’anniversaire de l’attentat de Nice comme celui du 11-Septembre, a expliqué au Monde M. Royant. Va-t-on commémorer le 11-Septembre sans montrer les avions qui entrent dans les tours ? Cette scène du camion rappelle ce qu’a été le 14 juillet 2016 et montre toute l’absurdité du terrorisme. Les gens concernés peuvent avoir l’impression que cette histoire leur appartient, mais c’est aussi une histoire collective dans un pays qui reste en état d’urgence. Les images de commémoration, ça ne peut pas être que des hommes politiques et des forces de l’ordre au garde-à-vous, il ne faut pas infantiliser l’opinion publique. »

Liberté d’informer, société démocratique

Jeudi, la société des journalistes de Paris Match a publié un communiqué rappelant que « la rédaction de Paris Match a donné la parole à de nombreuses victimes de cette tragédie. Nous publions leurs récits dans un souci d’hommage et de vérité, et celles-ci ont accepté de poser pour nous. » Elle ajoute que « les journalistes de Paris Match ne sauraient être soupçonnés de vouloir raviver la peine des victimes, encore moins de leur porter préjudice ». Elle conclut : « La SDJ de Paris Match s’inquiète de cette pression sur les pouvoirs publics. L’interdiction de la parution de notre journal nous semble disproportionnée. Une décision en ce sens serait inédite et remettrait en cause le droit de la presse à informer librement. »

Dans un communiqué, le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) affirme pour sa part : « Si la légitimité de l’action des associations de victimes ne peut être, par nature, contestée, il n’en demeure pas moins que la défense de la liberté d’informer demeure une priorité absolue pour toute société démocratique. Elle exige que soient dépassés le réflexe compassionnel et la tentation d’une appréciation en opportunité. » Le SEPM « tient à rappeler le risque que fait peser sur nos libertés fondamentales la menace de la mesure exceptionnelle de saisie proposée, dans le cadre d’urgence du référé, et dont l’histoire de la presse compte peu d’exemples. Son caractère disproportionné s’impose comme une évidence. »

Après l’attentat de Nice, plusieurs médias avaient déjà été mis en cause pour avoir notamment diffusé des images de victimes sur la promenade des Anglais, et l’un d’eux, France 2, a été sanctionné par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Ce dernier – qui n’est pas compétent en matière de presse écrite – avait appelé l’ensemble des médias audiovisuels « à la prudence et à la retenue, protectrices de la dignité humaine et de la douleur des personnes ».

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