LES PLUS LUS
Publicité

"C'était pas beau à voir!" : les coulisses du bureau politique des Républicains

Mardi, Les Républicains devaient décider du sort des ministres LR et des Constructifs. Ils ont surtout étalé leurs divisions

Christine Ollivier , Mis à jour le
Daniel Fasquelle devant le siège des Républicains mardi.
Daniel Fasquelle devant le siège des Républicains mardi. © Sipa

C'en est trop pour Nadine Morano. Elle sort de ses gonds : "C'est n'importe quoi ! Pour qui tu te prends?" Le secrétaire général des Républicains, Bernard Accoyer, à bout de patience après plus de deux heures de débats aussi tendus que confus, vient de réclamer un vote du bureau politique (BP). "Et je vais relever les noms : chacun devra prendre ses responsabilités", ajoute-t‑il. Tollé. Sa tentative n'aboutira qu'à relancer de plus belle l'empoignade collective. "À la fin, c'était pas beau à voir!" soupire un participant, consterné.

Publicité

Lire aussi : Chez les Républicains, Laurent Wauquiez a le champ libre

La suite après cette publicité

Accoyer avait pourtant soigneusement préparé une réunion qu'il savait délicate. Ce 11 juillet, le BP doit évoquer deux sujets brûlants : la date du congrès du parti et l'exclusion – ou pas – des ministres LR et des députés "constructifs" dissidents. En moins de trente minutes, il est décidé que les ­adhérents LR éliront leur nouveau président par voie électronique les 10 et 17 décembre, avec dépôt des candidatures avant le 11 octobre. "On a vite compris que c'était déjà négocié", selon un témoin. Valérie Pécresse n'a même pas tenté de plaider pour un report en 2018. Laurent Wauquiez a ce qu'il voulait. Assis en face de lui, Jean-François Copé l'a averti : "À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire."

La suite après cette publicité

"Mais tu vas te taire, toi ?"

Reste la question des exclusions. Accoyer exhume une procédure prévue par le règlement intérieur du parti : le bureau politique doit acter la création d'une "commission spéciale" composée de trois personnes, chargée d'entendre Édouard ­Philippe, Gérald Darmanin, Bruno Le Maire Sébastien Lecornu, Thierry Solère et Franck Riester. Elle rendra ensuite son rapport au BP. De quoi renvoyer d'éventuelles sanctions au mois d'octobre. Gérard Larcher a pesé de tout son poids dans cette décision : après les sénatoriales de septembre, le président du Sénat pourrait avoir besoin du renfort des voix centristes, sensibles aux sirènes macronistes, pour garder son siège. Pas question d‘ici là d'entendre parler d'exclusion.

Seulement voilà : la plupart des membres du BP, eux, veulent la tête des Constructifs. D'autant que ceux-ci ont préféré déserter le champ de bataille. Seule la sénatrice juppéiste Fabienne Keller et la députée Marine Brenier les représentent. La députée Laure de la Raudière s'est rapidement éclipsée, d'un coup de trottinette électrique. Pendant que les cadres LR débattent de leur sort, le principal artisan du groupe Constructif à l'Assemblée nationale, Thierry Solère, enchaîne les ­directs sur les chaînes d'info. "C'est quand même dommage, ce manque de courage", s'agace Accoyer. Jean-François Copé met alors les pieds dans le plat : "Il faut arrêter avec ce feuilleton", lance-t‑il.

La suite après cette publicité
La suite après cette publicité

"On se croirait dans une cour d'école!"

Il veut que le parti acte enfin le départ des intéressés en affirmant qu'ils se sont "exclus d'eux-mêmes". Très vite, il entraîne la majorité derrière lui. Valérie Boyer, Florence Portelli, Eric Ciotti, Nadine Morano ou Guillaume Peltier : les uns après les autres, ils demandent des sanctions. Ciotti en profite pour réclamer au passage la tête de Marine Brenier, présidente des Jeunes Républicains et proche de son meilleur ennemi Christian Estrosi. "On se croirait dans une cour d'école!", proteste-t-elle. Alors que Bernard Accoyer espère encore son renfort, Valérie Pécresse lâche : "Je suis d'accord avec Jean-­François", déclenchant des applaudissements. Confiant, Gérard Larcher est parti depuis longtemps. "Tout va très bien!", a-t-il assuré aux journalistes massés à l'extérieur du siège des Républicains. En fait, la situation a échappé au secrétaire général. Dépassé, il se tourne vers le numéro deux du parti, Laurent Wauquiez, jusque-là très silencieux. "Il a fallu que Laurent reprenne le manche parce qu'Accoyer avait perdu pied", explique un cadre du parti.

Au milieu du tohu-bohu et des injonctions contradictoires, stylo en main, celui-ci s'efforce alors de rédiger un texte qui mettrait tout le monde d'accord. L'exercice est pénible : "'Exclus d'eux-mêmes', juridiquement, cela n'existe pas", insiste Patrick ­Devedjian. "Mais tu vas te taire, toi?", explose Jean-François Lamour. "Ils ont failli se battre, ces deux-là", assure un témoin. Au final, le texte, boiteux, constate que les "LR-dissidents" se sont "placés hors des règles" du parti et... renvoie bel et bien le sujet à l'automne. "On est revenu à la position d'Accoyer, constate Jean-François Copé, dépité. Tout ça, c'est une énième illustration du naufrage de ce parti". En attendant le prochain épisode : "Sitôt les sénatoriales passées, ils sont cette fois bien décidés à les foutre dehors", prévient un cadre LR.

Contenus sponsorisés

Sur le même sujet
Publicité