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Egalité femmes-hommes : quand l'Etat montre le mauvais exemple

Egalité femmes-hommes : quand l'Etat montre le mauvais exemple

Fonction publique

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Le 3e rapport annuel sur l'égalité femmes-hommes dans la fonction publique est paru. Constat sans appel : l'Etat reste un (très) mauvais élève en la matière. On compte seulement un tiers de femmes aux postes à haute-responsabilité. Et les écarts salariaux se comptent en centaines d'euros – quand ils ne dépassent pas le millier.

Dans l'espace public, l'égalité femmes-hommes a la vie dure - c'est aussi le cas dans la fonction publique. Le 12 juillet, le dernier rapport annuel faisant état des inégalités entre les deux sexes dans les services de l'Etat, des collectivités, et des hôpitaux en 2014 oblige à deux amers constats. Dans le secteur public, le plafond de verre freine encore et toujours les carrières des femmes, alors que leur salaire moyen reste largement inférieur à celui des hommes, jusqu'à plus d'un millier d'euros de différence dans certaines catégories.

La fonction publique classe ses agents en trois divisions hiérarchiques qui correspondent notamment au niveau de diplôme. Et c'est la catégorie A (Bac +3 et plus) qui présente les plus forts écarts de salaires. En moyenne, une femme de ce rang travaillant au service de l'Etat ou des collectivités gagnera 600 euros de moins qu'un homme. Dans le secteur social et médico-social, la différence dépasse même le millier d'euros en moyenne ! Difficile à comprendre alors même que les femmes passent avec brio les concours de catégorie A (60% des candidatures et 71% des recrutements). Les écarts salariaux des catégories B et C sont moins importants, tout en restant significatifs, oscillant entre 100 et 200 euros. Seuls les agents de catégorie C du versant hospitalier sont épargnés (environ 30 euros de différence en moyenne).

Pas de hautes responsabilités

Initié en 2013 par François Hollande, l'état des lieux annuel de l'égalité professionnelle dans le service public tend donc à démontrer que la lutte contre les inégalités de genre avance trop peu. Les femmes occupent certes plus de 60% des emplois publics, mais quand il s'agit de postes à haute responsabilité, cette proportion est divisée par deux. Si certaines petites avancées sont à relever, comme une féminisation accrue de la haute-fonction publique, l'objectif de passer à 40% d'emplois supérieurs d'encadrement et de direction (ESD) - ces "hauts-fonctionnaires" - occupés par les femmes, d'ici à 2018, semble bien difficile à atteindre. Le rapport 2017, portant sur les chiffres de 2014 (les plus récents disponibles), montre que la situation n'a pas bougé en un an, avec 34% des ESD occupés par des femmes, contre 33 % en 2013.

La fonction publique territoriale fait encore "mieux" : 28% en 2014 ! Les communes, tout particulièrement, rechignent toujours à ne pas nommer un homme au premier poste technique des villes, celui de directeur général des services (DGS). Un poil plus d'un DGS sur dix est une femme, situation quasi-stable d'une année sur l'autre. Comment s'en étonner, quand on ne compte que 16% de mairesses élues aux dernières élections municipales, selon l'Observatoire des inégalités ? Les préfets, qui ne doivent leur nomination qu'au gouvernement, ne sont pas en reste, avec 12% de femmes.

Jusqu'à 1 300 euros de moins qu'un homme

C'est la fonction publique hospitalière qui concentre les inégalités. Environ 8 agents hospitaliers sur 10 sont des femmes. Mais elles n'occupent que 46% des postes de direction. En moyenne, l'écart parmi les cadres y est astronomique : 1 300 euros en moyenne ! Une dynamique largement portée par les médecins du secteur hospitalier public avec un salaire net mensuel moyen de 4 315 euros côté femmes contre 5 430 euros côté hommes.

Si les perspectives de carrière publique sont ainsi entravées, avec de tels écarts pendant la vie active, comment s'étonner que les retraitées de la fonction publique soient moins bien loties que leurs homologues masculins ? Les pensions de retraite de l'année 2015 montrent environ 200 euros de différence en moyenne d'un sexe à l'autre, toute fonction publique confondue. Derrière ce tableau, ni le ministère de l'Action publique, qui a édité le rapport, ni même le secrétariat à l'Egalité femmes-hommes n'a souhaité donner suite à nos sollicitations. Dans le public, les inégalités salariale et professionnelle ont encore de beaux jours devant elles.

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne