Epinay : les jeunes redonnent des couleurs au commissariat et brisent les préjugés

Pendant une semaine sept jeunes ont remis à neuf une partie du commissariat d’Epinay et changé leur regard sur la police. Samedi, ils seront reçus en mairie de Villetaneuse.

 Epinay-sur-Seine. Sept jeunes peintres en herbe ont refait à neuf couloirs et bureaux au commissariat.
Epinay-sur-Seine. Sept jeunes peintres en herbe ont refait à neuf couloirs et bureaux au commissariat. DR

    « J'avais un peu d'appréhension. J'étais entré une seule fois dans un commissariat pour une déclaration de perte », confie Bryan, 19 ans. Avec cinq autres jeunes de Villetaneuse et un d'Epinay, accompagnés par l'association de prévention spécialisée Feu Vert dans le cadre du projet « J'abuse ou j'amuse », ils ont remis à neuf 1 000 m2 de couloirs et de bureaux au commissariat d'Epinay-sur-Seine.

    En échange de 160 heures de « travaux de citoyenneté », ils bénéficient de 25 heures de cours de conduite dans une auto-école de Villetaneuse. Ils ont ainsi réalisé un chantier dans une école primaire Jules-Verne à Villetaneuse et au commissariat d'Epinay.

    Bryan, originaire de la cité Salvador-Allende à Villetaneuse confesse que, dans son quartier, entre les jeunes et la police, « C'est pas trop ça ». Après une semaine en « immersion » dans le commissariat, il est plus nuancé : « Il y a des bons et des mauvais policiers ». Il a aussi découvert des conditions de travail difficiles et des locaux en piteux état.

    Mama Sy, éducatrice spécialisée à l'initiative du projet, avoue qu'elle aussi craignait cette cohabitation. « Des jeunes des quartiers dans un commissariat. C'était un coup de poker. C'était la première fois que je tentais cela. »

    Au-delà du coup de peinture, son idée était de casser les stéréotypes de part et d'autre. « Ils se redoutent parce qu'ils ne se connaîssent pas », explique-t-elle. Les sept apprentis peintres sélectionnés ont des parcours difficiles, souvent en échec scolaire même si leur casier judiciaire est vierge.

    Néanmoins, après une semaine, les trous ont été rebouchés et les murs défraîchis ont été recouverts d'une belle couleur grise. Surtout, le regard des peintres en herbe s'est modifié. « Ça a été une véritable prise de conscience pour les jeunes, enchaîne Mama Sy. Ils se sont dit Tous les policiers ne veulent pas casser du jeune et de l'autre côté, c'est vrai aussi. » Les jeunes gens ont pu avoir un aperçu du quotidien des policiers. La petite équipe travaillait juste à côté des cellules de garde à vue. « Je ne pourrai jamais faire ce métier. Ils se font insulter toute la journée. Je deviendrai fou », ont-ils confié à l'éducatrice. Cette dernière se dit aussi que maintenant, les contrôles dans la rue se passeront mieux car ils se connaîtront.

    Au commissariat, malgré les réticences du début, on apprécie l'initiative : « Tout s'est bien passé, les échanges ont été courtois et le chantier a été bien réalisé », confie un policier. Bien que menée sur une petite échelle, l'expérience a permis de faire bouger quelques lignes. Et Mama Sy rêve maintenant d'étendre son projet à d'autres commissariats.