Consommateurs ou citoyens, faudra-t-il choisir ?

Vente de légumes bio à la ferme, Charentes, France, 25/09/2014  ©AFP - BURGER / Phanie
Vente de légumes bio à la ferme, Charentes, France, 25/09/2014 ©AFP - BURGER / Phanie
Vente de légumes bio à la ferme, Charentes, France, 25/09/2014 ©AFP - BURGER / Phanie
Publicité

A l’occasion des Etats-Généraux de l’alimentation, entretien avec Bernard Chevassus-au-Louis, biologiste. Des peurs alimentaires aux solutions durables, des circuits mondialisés à l’agroécologie, des comportements individuels au vivre ensemble, c’est toute notre histoire commune qui est interrogée

Avec
  • Bernard Chevassus-au-Louis Biologiste, ancien directeur de l’INRA et du Museum d’histoire naturelle, président de l'association "Humanité et Biodiversitéé

A l’occasion des Etats-Généraux de l’alimentation, entretien avec Bernard Chevassus-au-Louis, biologiste, ancien directeur de l’INRA, de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa devenue l'Anses) et du Muséum national d'histoire naturelle. Il est le président de « Humanité et biodiversité » (succédant à Hubert Reeves)

L’alimentation, bien plus que l’acte de se nourrir, « un fait social culturel » (Marcel Mauss), une histoire sérieuse qui implique nos relations à la nature, aux animaux, à nos choix de société. Des peurs alimentaires aux solutions durables, des circuits mondialisés à l’agroécologie, des comportements individuels au vivre ensemble, c’est toute notre histoire commune qui est interrogée...

Publicité

Annoncés par le Président de la République en juin dernier, les États généraux de l’alimentation proposent jusqu’au mois d’octobre, une vaste réflexion sur l’agriculture et se fixent plusieurs objectifs, parmi lesquels : permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail par le paiement de prix justes, accompagner la transformation des modèles de production, promouvoir une alimentation saine, sûre et durable.

L’ensemble des parties prenantes est conviée à ces discussions: monde agricole et de la pêche, industrie agroalimentaire, distribution, consommateurs, restauration collective, élus, partenaires sociaux, acteurs de l'économie sociale et solidaire, et de la santé, ONG, associations caritatives et d'aide alimentaire à l'international, banques et assurances. Une vaste consultation publique pour contribuer à l’élaboration d’une feuille de route nationale.

Bernard Chevassus-au-Louis, témoin des évolutions et des dérives de nos modes de consommation dans les pays développés s’interroge aussi sur le modèle agricole, entre une alimentation mondialisée (au XVIIème siècle l’origine des productions destinées aux Parisiens ne dépassait pas 100km !) et une vision encore « mythique » des systèmes localisés qu’il faudrait encourager mais en tenant compte des tensions et contradictions entre le consommateur, le citoyen…et le contribuable !

L’alimentation écrivait Marcel Mauss est un « fait culturel total » et Claude Lévy-Strauss : « l’aliment est bon à penser d’abord ».

Bernard Chevassus-au-Louis rappelle que les peurs alimentaires existaient déjà au Moyen-Age et la défiance envers les producteurs aussi.

Evoquant le sociologue Claude Fischler :« On est ce que l’on mange », il compare le modèle anglo-saxon : « Je mange pour retrouver de l’énergie » au modèle latin : « Je me rassemble pour faire société »

L’alimentation mondiale est aujourd’hui en pleine évolution. Les pays émergents, Chine en tête, changent leurs comportements, consomment de plus en plus de viande, ce qui pose de sérieux problèmes d’environnement. L’Inde très végétarienne est une exception notable.

Le rôle de la religion dans l’alimentation est aussi évoqué, ainsi que le rapport aux animaux, très différent d’Orient en Occident

Enfin Bernard Chevassus-au-Louis évoque les années 90, la crise de la vache folle (il était directeur de l’INRA), le scientifique aux prises avec l’urgence face au politique sommé de prendre des décisions…Situation confuse et très anxiogène. Depuis d’autres crises sont intervenues et elles devraient se répéter à l’avenir.

L’alimentation est une affaire sérieuse dont les Etats doivent se préoccuper davantage. Ils le feront sous la pression de l’opinion publique L’innovation est une réponse possible à cette situation. Bernard Chevassus-au-Louis croit beaucoup à l’innovation, à l’agroécologie, et insiste sur la nécessité de « rendre la main aux agriculteurs »

Association Humanité et Biodiversité

États généraux de l'alimentation

L'équipe