Donald Trump a pris une nouvelle fois de court le Parti républicain, mercredi 13 septembre, en trouvant un terrain d’entente avec les responsables démocrates de la Chambre des représentants et du Sénat, Nancy Pelosi (Californie) et Chuck Schumer (New York). Ces derniers, qui avaient été invités à dîner à la Maison Blanche, ont en effet annoncé à leur sortie du 1600 Pennsylvania Avenue être parvenus à un accord avec le président sur l’immigration.
Une semaine plus tôt, M. Trump avait déjà frappé de stupeur le parti qui l’a soutenu pendant la campagne présidentielle en acceptant un marché proposé par les deux responsables démocrates. Il concernait le vote, consensuel, d’une aide d’urgence pour le Texas après le passage de la tempête Harvey, et deux dossiers autrement plus disputés : le relèvement du plafond de la dette américaine, nécessaire pour éviter un défaut de paiement, et le budget de l’Etat fédéral. Le chef de l’Etat avait soutenu leur projet de report jusqu’en décembre, officiellement afin de faciliter l’examen par le Congrès de la réforme fiscale qui lui tient à cœur.
Le nouvel accord annoncé mercredi est partiel. Comme les deux parties l’ont confirmé par la suite, il ne concerne pas le financement du mur que M. Trump souhaite voir érigé sur la frontière avec le Mexique, la proposition phare de sa campagne. La porte-parole de la présidence, Sarah Sanders, a d’ailleurs bien fait comprendre qu’il ne s’agissait pas d’un renoncement du président en la matière.
Une concession peu coûteuse pour les démocrates
En revanche, M. Trump, M. Schumer et Mme Pelosi se sont entendus pour tenter de parvenir à une solution pérenne à propos des sans-papiers arrivés enfants aux Etats-Unis, les « Dreamers », qui étaient protégés par un décret auquel M. Trump a mis fin le 5 septembre. Les responsables démocrates ont accepté en échange de soutenir un ensemble de mesures destinées à garantir la sécurité de la frontière sud des Etats-Unis. Une concession peu coûteuse : ces mesures ont toujours été comprises par le passé dans les projets de réforme de l’immigration soutenus par les démocrates.
Lorsque Mme Sanders avait été interrogée au cours de son briefing quotidien, plus tôt dans la journée, à propos de l’absence à ce dîner des deux responsables républicains du Congrès, le speaker (président) de la Chambre des représentants, Paul Ryan, et le chef de la majorité au Sénat, Mitch McConnell, la porte-parole de la Maison Blanche avait fait valoir que « le chef du Parti républicain », le président, serait bien présent. Il y a cependant fort à parier que le nouvel accord trouvé avec la minorité démocrate du Congrès alimente les interrogations des élus du Grand Old Party.
Au cours de la même journée, recevant des élus des deux grands partis des Etats-Unis, M. Trump a d’ailleurs mis un point d’honneur, en commentant son projet de réforme fiscale, à assurer qu’il était destiné en priorité aux classes moyennes et non aux revenus les plus élevés. « Je crois que les riches en resteront où ils sont, mais s’ils doivent aller plus haut [c’est-à-dire payer plus], ils iront plus haut », avait commenté l’occupant du bureau Ovale après avoir mentionné un plan de modernisation des infrastructures également évoqué par le camp démocrate pendant la campagne.
Consensus et compromis
Après avoir essuyé plusieurs camouflets au Congrès, notamment sur l’abrogation de la couverture santé léguée par son prédécesseur, Barack Obama, du fait des divisions internes républicaines, M. Trump a décidé de s’engager dans la voie d’une coopération avec les démocrates qui lui paraît plus fructueuse, comme l’a montré l’adoption au pas de charge de l’accord du 6 septembre, signé deux jours plus tard par le président. M. Trump n’a en effet besoin que d’une partie des voix républicaines pour obtenir une large majorité dans les deux Chambres, compte tenu de la plus grande discipline de vote des démocrates. Un calcul qui sera mis à l’épreuve sur l’immigration.
Désormais, le milliardaire ne jure plus que par le consensus et le compromis, comme il l’a assuré mercredi aux côtés des élus des deux camps reçus à la Maison Blanche. « Je pense que si nous pouvons faire des choses de façon bipartisane, ce sera génial. (…) Si vous regardez les plus grandes lois adoptées, cela a été fait de façon bipartisane », a assuré M. Trump, qui pourrait trouver ainsi le moyen de tenir une autre de ses promesses électorales : remettre en état de marche une capitale fédérale paralysée par les antagonismes politiques.
Sarah Sanders, sa très politique porte-parole, l’a affirmé mercredi, assurant que M. Trump a été élu parce qu’une majorité d’électeurs « était fatiguée de la routine ». « Ils voulaient quelqu’un qui rompe le statu quo, qui amène des gens des deux camps ensemble pour discuter. Ce président a fait plus pour le bipartisme au cours des huit derniers jours qu’Obama en huit ans », a affirmé Mme Sanders, passant sous silence le fait que M. Trump ne s’est tourné vers les démocrates qu’après les échecs subis avec le camp républicain.
Le site ultranationaliste Breitbart News, dirigé par l’ancien conseiller stratégique de M. Trump, Stephen Bannon, ne s’est pas embarrassé de nuances au terme de cette nouvelle journée de surprises. Avant même l’annonce de l’accord avec Mme Pelosi et M. Schumer, il a dénoncé, à propos du sort des Dreamers, une « amnistie » accordée par le locataire de la Maison Blanche, accusé d’avoir « cédé » sur l’un des dossiers jugés les plus importants de sa présidence.
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