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A Berlin, sur l’Alexanderplatz, deux Allemagne se font face

Quelques centaines de militants de gauche sont venus manifester bruyamment, dimanche, devant le QG électoral du parti d’extrême droite AfD

Par  (Berlin, envoyé spécial)

Publié le 25 septembre 2017 à 06h35, modifié le 25 septembre 2017 à 10h40

Temps de Lecture 3 min.

Une manifestation contre le parti AfD, le 24 septembre à Berlin.

Il y a un moment où même le président de la branche jeunesse du parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD) s’est rendu compte qu’il se passait plus de choses dehors que dedans. Téléphone à la main, Sven Tritschler s’est alors mis à filmer et à diffuser en direct sur les réseaux sociaux les quelques centaines de militants de gauche venus protester contre la percée historique du parti aux législatives sous la terrasse de la discothèque de second rang que l’AfD avait louée pour sa soirée électorale sur l’Alexanderplatz, en plein cœur de Berlin. « Je m’attendais à tous ces opposants, Berlin a toujours été très à gauche », glisse l’élu, venu de Rhénanie-du-Nord - Westphalie, avant d’être évacué de la terrasse du Traffic Club par le service d’ordre, par crainte des projectiles.

Dehors, les « Nazis Raus » (« Les nazis dehors ») et « Tout Berlin hait l’AfD » couvrent les discussions des militants du parti. Encadrés par la police, plusieurs centaines de militants antifascistes, mais aussi beaucoup d’anonymes venus spontanément protester contre le retour de l’extrême droite au Bundestag. « On a décidé de venir immédiatement après avoir regardé les résultats », lâche Elgin, 49 ans, une designer de bijoux à Berlin, aux côtés de son mari. Encore « sous le choc », il va « falloir que je prenne quelques jours pour digérer ça », assure cette électrice des Verts, les larmes aux yeux. Plusieurs couples métis se tiennent dans les bras avec émotion devant les CRS. A l’image de Ceda, 32 ans, Brésilienne, et Stefan, 50 ans. « Nous sommes un couple multiculturel, et maintenant, nous avons peur. »

Les manifestants refusent d’accepter l’idée que l’Allemagne se normaliserait avec l’émergence d’un parti d’extrême droite au-dessus de 10 %, comme dans d’autres pays d’Europe. « L’Allemagne a une histoire très spécifique, ce n’est pas comparable », proteste ainsi Matthias Schmelzer, en évoquant, comme beaucoup, le passé nazi du pays. D’habitude, ce Berlinois refuse de voter, mais s’il s’est déplacé, c’est cette fois-ci « pour faire barrage à l’AfD ». « Cela n’a pas trop marché », constate-t-il. D’ailleurs, les manifestants de gauche et leur sono appelant à l’abolition du capitalisme ont beau être bien plus bruyants que les supporters de l’AfD, ils ne sont finalement pas si nombreux. « J’espérais que toute l’Alexanderplatz serait remplie », regrette Elgin.

Une manifestation contre l’AfD à Berlin, le 24 septembre.

Dérapages évités

Cela aura tout de même suffi à gâcher la soirée de l’AfD. A l’intérieur, Beatrix von Storch, vice-présidente du parti, fustige « un important problème d’éducation » des manifestants : « Ils devraient savoir qu’on ne peut pas traiter ainsi un parti démocratique. » L’assemblée, quasiment exclusivement blanche et masculine, à l’image de son électorat, célèbre son score sans éclat. Tout juste entend-on quelques cris de joie au moment des résultats à 18 heures, et quand les bons scores du parti en ex-Allemagne de l’Est sont annoncés.

Les deux têtes d’affiche de l’AfD, le vieux professeur eurosceptique Alexander Gauland et la jeune anti-islam Alice Weidel, évitent tout dérapage comparable à ceux qui ont fait parler d’eux dans la campagne. Le premier célèbre l’émergence d’« un vrai parti d’opposition », la seconde promet qu’elle « sera constructive » et se « battra pour l’avenir de l’Allemagne ». « Dès qu’on demande de fermer les frontières, c’est jugé comme une provocation », justifie, de son côté, Mme von Storch, qui avait été mise en cause pour avoir proposé en 2016 que les gardes-frontières tirent sur les migrants illégaux.

« Il y a certaines phrases de Gauland qui n’étaient pas très heureuses, les nazis ont commis des crimes très clairs », abonde Sven Tritschler en référence au propos du leader qui avait dit en septembre être « fier des performances des soldats allemands pendant les deux guerres mondiales ». « Franchement, la principale raison de notre percée est que tout le monde savait que Merkel allait rester chancelière », ajoute ce membre de l’aile modérée du parti, qui s’attend comme beaucoup à ce que les divisions réapparaissent rapidement au sein du parti. Frauke Petry, ancienne chef écartée de la direction au printemps parce que trop modérée, s’est d’ailleurs longuement faite attendre avant de se montrer au Traffic Club. Lundi, elle a indiqué qu’elle ne siégerait pas dans le groupe AfD.

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