Publicité

Pourquoi l’Irlande accumule des milliards de bons du Trésor américains

+ VIDEO. L’Irlande est le troisième créancier des Etats-Unis, selon le Trésor. Une bizarrerie qui en dit long sur le poids des investissements des grands groupes.

Par Isabelle Couet, Guillaume Benoit

Publié le 22 sept. 2017 à 10:18

Les chemins empruntés par les bons du Trésor sont parfois mystérieux. Si la Chine et le Japon, deux pays aux gigantesques réserves de changes, sont les plus gros créanciers des Etats-Unis, la position de l’Irlande comme troisième détenteur d’emprunts d’Etat américains a de quoi surprendre. C’est pourtant ce que montre la dernière photographie réalisée par le Trésor américain, qui essaie de localiser chaque mois sa dette à travers le monde.

En juillet dernier, le petit pays d’Europe détenait pas moins de 300 milliards de dollars de « Treasuries » contre seulement 90 milliards il y a cinq ans. C’est moins d’un tiers du stock chinois ou japonais, mais bien plus que celui du Royaume-Uni (230 milliards), de l’Arabie saoudite (142 milliards) ou de la France (80 milliards).

Vidéo : Pourquoi l’Irlande accumule les bons du Trésor américain

L’île d’Emeraude s’est probablement transformée en un vaste entrepôt de dette américaine grâce à son climat fiscal attrayant pour les entreprises. L’Irlande est en effet devenue la terre d’accueil d’un certain nombre de géants de la Tech américaine, qui y ont implanté leur siège social ou leur principal centre de profits européen, à l’instar de Google, Apple, Facebook ou Microsoft.

Publicité

Ces grands groupes ne rapatrient pas leurs bénéfices aux Etats-Unis - une situation qui pourrait toutefois changer si la réforme fiscale promise par Donald Trump lors de la campagne présidentielle finit par être votée. Conséquence : ils se retrouvent à gérer des montagnes de cash à l’étranger.

52 milliards de dollars pour Apple

Que font-ils de leur trésor de guerre ? Ils l’investissent essentiellement dans des portefeuilles de titres obligataires. D’après les comptes publiés à la fin du premier semestre, d’emprunts d’Etat américains, Google 37 milliards, Facebook 11 milliards et Microsoft pas moins de 111 milliards (en intégrant aussi les titres émis par les agences fédérales américaines). L’intégralité de ces montants n’est pas comptabilisée en Irlande mais une part sans doute non négligeable est enregistrée sur des comptes titres auprès du dépositaire irlandais.

L’incroyable montée en puissance de l’Irlande dans les statistiques du Trésor américain est révélatrice d’un phénomène plus profond et troublant : les grands groupes sont aujourd’hui capables de modifier la carte des flux d’investissements mondiaux. Ils sont en fait devenus de véritables gestionnaires d’actifs financiers, au même titre que Pimco, Blackrock ou Fidelity.

Plus gros que le fonds star de Pimco

Pour preuve, comme l’a révélé Bloomberg, la firme à la pomme détient un portefeuille de dette d’entreprises qui, en taille, rivalise avec les plus grands fonds, notamment le mythique « Total return » de la société californienne Pimco ! Apple possède 150 milliards de dollars d’obligations privées, comme en attestent ses états financiers. Plus modestes, les placements en titres « corporate » de Facebook s’élèvent pour leur part à 8,5 milliards, ceux d’Intel à plus de 6 milliards, tandis que Microsoft et Google ont une exposition d’environ 5 milliards.

Et en France ?

Contrairement aux géants américains, les grands groupes français n’ont pas pour pratique de détenir en direct des portefeuilles obligataires. Pour placer leur trésorerie, ils privilégient des fonds monétaires ou des billets de trésorerie.

Trente firmes américaines, dont Ford, Coca-Cola et Boeing, auraient d’ailleurs entre leurs mains 5 % de l’encours total du marché des obligations d’entreprises aux Etats-Unis, a calculé le « Financial Times ». Au total, ce groupe de trente aurait accumulé plus de 800 milliards de dollars d’obligations diverses en guise de placements. Cette impressionnante montée en puissance des entreprises dans la sphère obligataire pourrait un jour devenir un enjeu de stabilité financière. Et poser un nouveau défi pour les régulateurs mondiaux.

Guillaume Benoit

MicrosoftTeams-image.png

Nouveau : découvrez nos offres Premium !

Vos responsabilités exigent une attention fine aux événements et rapports de force qui régissent notre monde. Vous avez besoin d’anticiper les grandes tendances pour reconnaitre, au bon moment, les opportunités à saisir et les risques à prévenir.C’est précisément la promesse de nos offres PREMIUM : vous fournir des analyses exclusives et des outils de veille sectorielle pour prendre des décisions éclairées, identifier les signaux faibles et appuyer vos partis pris. N'attendez plus, les décisions les plus déterminantes pour vos succès 2024 se prennent maintenant !
Je découvre les offres

Nos Vidéos

xqk50pr-O.jpg

Crise de l’immobilier, climat : la maison individuelle a-t-elle encore un avenir ?

x0xfrvz-O.jpg

Autoroutes : pourquoi le prix des péages augmente ? (et ce n’est pas près de s’arrêter)

qfkr8v3-O.jpg

La baisse de la natalité est-elle vraiment un problème ?

Publicité