La naissance de Siemens-Alstom fait hurler l’opposition
Le principe d’une fusion a été approuvé mardi soir par les conseils des deux entreprises. Pour le gouvernement, le dossier vire à l’épreuve politique.
Par Lionel Steinmann
La fusion entre Alstom et les activités ferroviaires de Siemens, dont le principe a été entériné mardi soir par les conseils des deux entreprises, vire à l’épreuve politique. Activement soutenue par les pouvoirs publics, elle suscite un torrent de critiques, bien que le communiqué tombé mardi soir la détaille comme un mariage entre égaux, avec un siège du nouvel ensemble (coté en France) basé en région parisienne et « une direction par le directeur général d’Alstom avec 50 % du capital de la nouvelle entité détenus par Siemens ».
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Plus précisément, le siège des activités signalisation – l’activité la plus rentable et en forte croissance – sera basé en Allemagne et celui du matériel roulant, en France. Siemens disposera aussi de la majorité au conseil d’administration avec six des onze sièges, dont celui du président. Bouygues restera dans l’immédiat le premier actionnaire français, mais ne siégera pas au conseil. Et il s’est simplement engagé à conserver ses actions jusqu’à l’assemblée générale extraordinaire approuvant la fusion et au plus tard le 31 juillet 2018. Par ailleurs, Siemens disposera de bons de souscription d’actions Alstom qui lui permettront de monter à 52 % du capital du nouvel ensemble dans quatre ans.
« Ne nous racontons pas d’histoire : c’est Alstom qui sera avalé par Siemens », dénonce Xavier Bertrand, président LR des Hauts-de-France. « Le TGV va-t-il devenir allemand ? pourquoi le gouvernement a-t-il accepté un tel déséquilibre ? », abonde sur Twitter le député LR Eric Woerth, tandis que pour Laurent Wauquiez, vice-président de LR, qui s’exprimait sur LCI, « c’est l’Allemagne qui rachète la France et Monsieur Macron nous brade »..
Des garanties inscrites dans l’accord
L’opposition de gauche n’est pas plus tendre. Dans un communiqué, les députés de la France insoumise disent « non à la vente à la découpe d’un fleuron industriel français », et réclament d’ores et déjà une commission d’enquête.
Le gouvernement s’est efforcé de répondre à ces inquiétudes. « L’Etat veillera à une chose : que ce mariage soit un mariage entre égaux, la valorisation respective des deux entreprises étant très proche », a assuré Benjamin Griveaux, Secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Economie et des Finances.
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Le chiffre d’affaires combiné de la nouvelle entité – qui sera baptisée Siemens-Alstom – sera de 15,3 milliards d’euros, pour un résultat d’exploitation ajusté de 1,2 milliard d’euros. Des synergies annuelles de 470 millions d’euros sont attendues au plus tard quatre ans après la réalisation de l’opération. Celle-ci va maintenant devoir obtenir le feu vert de Bruxelles, qui n’a jamais eu à se prononcer sur une opération aussi lourde dans le ferroviaire.
Les actionnaires d’Alstom peuvent, eux, se frotter les mains : la perspective de la fusion a fait grimper le cours de Bourse de 10,4 % en cinq jours et ils percevront un dividende exceptionnel.
Vidéo: Alstom - Siemens, fusion à hauts risques
Lionel Steinmann