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Raymond Depardon : « J’ai toujours le regret de ne pas avoir photographié mon père »

Photographe et documentariste, il expose cinquante ans d’images à la Fondation Henri-Cartier-Bresson, avant la sortie de son film « 12 jours ».

Propos recueillis par 

Publié le 08 octobre 2017 à 06h34, modifié le 30 novembre 2017 à 14h40

Temps de Lecture 13 min.

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Je ne serais pas arrivé là si…

… Si je n’avais pas rencontré un vieux monsieur, M. Bolle, chez Dalmas, la première agence où j’ai travaillé. Il s’occupait des quotidiens de province et m’envoyait sur des petits événements – des prix littéraires, des salons des arts ménagers, des avant-premières, etc. – que les autres photographes du staff ne voulaient pas couvrir. Moi, jeune pigiste, c’est ainsi que j’apprenais.

Et puis il y a eu M. Louis Foucherand, reporter-photographe. J’avais trouvé son adresse dans l’annuaire. A 16 ans, je lui avais écrit puis montré des photos des petits veaux de mes parents. Il m’avait demandé : « Que font-ils dans la vie ? » J’étais devenu tout rouge et avais répondu : « Cultivateurs », car j’avais le complexe du mot « paysan ». Il m’a pris comme apprenti, m’a logé dans son atelier rue Saint-Louis-en-l’Ile, à Paris. Ces deux hommes ont été comme des papas de substitution.

Pourquoi ce complexe du mot « paysan », lorsque vous étiez jeune ?

J’étais le seul fils de paysans à l’école de Villefranche-sur-Saône. Les cours de récréation peuvent parfois être violentes : un jour, un élève m’a traité de « fils de paysan ». Je lui ai foncé dessus et lui ai répondu : « S’il n’y avait pas de paysans, tu mangerais des clous. »

Vos parents ne vous ont jamais fait de reproche, jamais obligé à rien… Ils vous ont appris la liberté ?

Oui, c’est certain. Ce besoin de liberté vient de là, de cette indépendance paysanne, de cette absence de liens de subordination. Mes parents étaient des gens très doux. Mon père est né en 1903, la même année que Yasujiro Ozu et que Walker Ewans. Ils étaient les enfants d’un siècle nouveau. Mes parents ne m’ont jamais donné de gifle et ont compris bien avant moi que je n’allais pas reprendre la ferme.

J’avais du mal avec l’école, des difficultés pour passer mon certificat d’études, et mon goût pour la photo est venu à cause de l’appareil qu’on avait offert à mon frère. Mon père a eu un geste juste : « Je ne veux pas qu’il reste là à rien faire. » Il a demandé à M. Briolle, photographe-opticien à Villefranche-sur-Saône, de me prendre comme stagiaire.

Enfant, quand j’allais chercher les bêtes, je rêvais sur les chemins, la tête dans les nuages. Mais ce n’est pas par hasard. Les paysans sont assez cosmiques. Ils parlaient beaucoup de la lune qui pouvait influencer les cultures, ils n’étaient jamais contents du réel. C’est aussi la constance du photographe.

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