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Affaire Kerviel : et maintenant, les enregistrements secrets...

L’ancienne policière chargée de l’affaire Kerviel a été mise en examen pour "atteinte à la vie privée".

Laurent Valdiguié , Mis à jour le
Jérôme Kerviel (à droite) et son avocat David Koubbi
Jérôme Kerviel (à droite) et son avocat David Koubbi © Reuters

Un sac de nœuds dans un coffre de cordes. Jérôme Kerviel et la Société générale, par avocats interposés, bataillent encore en coulisses. La dernière affaire en date concerne la plainte pour atteinte à la vie privée de Chantal de Leiris, ancienne vice-procureure au parquet de Paris. La magistrate dénonce la façon dont Nathalie Le Roy, ex-commandante de police chargée de l'enquête Kerviel, l'a enregistrée à son insu, dans une brasserie, le 17 juin 2015 à 10 heures. Dans cet enregistrement de quarante et une minutes, dont s'est servie la défense de Jérôme Kerviel lors du procès en appel à Versailles*, Chantal de Leiris assure que la banque "savait" et que les juges "étaient complètement sous la coupe des avocats de la Générale". "C'était inimaginable", dit-elle sur l'enregistrement. "L'information judiciaire étant en cours, je ne peux rien en dire compte tenu du secret de l'instruction", confie Me Olivier Baratelli, l'avocat de Chantal de Leiris, qui a déposé plainte à Lille.

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Lire aussi : Affaire Kerviel : "La banque n'aurait jamais dû toucher l'argent"

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De nouvelles actions judiciaires seraient en préparation

Dans cette dernière enquête, Nathalie Le Roy a été placée en garde à vue en mars 2017. La policière explique n'avoir eu aucune idée préalable. Elle raconte avoir réfléchi six mois avant de se décider, en décembre 2015, en tant que lanceuse d'alerte, à livrer le dictaphone à Me David Koubbi, l'avocat de Jérôme Kerviel. Au printemps dernier, une perquisition est lancée au domicile parisien de l'ex-trader. Un ordinateur MacBook est saisi. Les policiers se rendent aussi au cabinet de Me Koubbi, qui leur remet sa clé USB contenant la conversation livrée par Nathalie Le Roy en 2015.

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Des investigations techniques sont ensuite lancées sur ces supports informatiques et vont mettre à mal la version de la policière. Via la clé USB, les experts établissent que Me David Koubbi a reçu l'enregistrement le jour même de la rencontre, le 17 juin 2015, à 15h50.

Droit au silence

Sur l'ordinateur de Jérôme Kerviel, les enquêteurs font une autre découverte, un aparté entre l'ex-trader et son avocat d'une durée d'une minute et trente-cinq secondes. Les deux hommes se sont, semble-t-il, enregistrés à leur insu, juste après avoir écouté l'enregistrement de Chantal de Leiris. Sur la bande-son, Kerviel et Koubbi rient. "Ah non, c'est bon! dit Kerviel. Tu peux envoyer le SMS à Jean, c'est 100… 50… 200?" "Oui, 200!", lui répond Me Koubbi. "Non mais putain, je suis pas en train d'enregistrer, là", dit ensuite Jérôme Kerviel avant de couper. Placés en garde à vue en juin dernier, les deux hommes ont été interrogés sur ces curieux propos. "Qui est Jean?" demandent les policiers. Les deux gardés à vue invoquent leur droit au silence. "A quoi correspondent ces montants?" Double silence. "Il semble que vous soyez d'accord avec le montant de 200? Avez-vous demandé le versement de fonds en contrepartie de cet enregistrement?", questionnent les enquêteurs, qui veulent aussi savoir s'il y a eu "un début d'exécution". Ni Kerviel, ni Koubbi ne répondront.

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C'est un peu comme si on enregistrait les aveux d'un crime de sang et qu'on ne s'intéressait qu'aux conditions d'obtention des aveux

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A l'évocation de ces sommes, les deux avocats de la Société générale, qui se prénomment Jean tous deux, Mes Veil et Reynard, tombent des nues. "Je n'ai strictement jamais discuté avec Me Koubbi", certifie Jean Veil. Jean Reinhart reconnaît de son côté "plusieurs rencontres" et aussi "des discussions financières". "Koubbi disait qu'il allait faire péter une bombe, qu'il avait une bombe à déflagration, se souvient l'avocat, évoquant "des montants qui ont beaucoup varié". Sollicité hier, Me Koubbi, qui n'est plus le défenseur de Jérôme Kerviel depuis fin juillet, ne fait aucun commentaire. Son entourage fait remarquer que la justice s'intéresse "moins au contenu de l'enregistrement de la magistrate qu'aux conditions de son obtention". "Un peu comme si on enregistrait les aveux d'un crime de sang et qu'on ne s'intéressait qu'aux conditions d'obtention des aveux", s'emporte ce proche de David Koubbi. Contacté hier, Jérôme Kerviel, "se refuse à aborder le fond d'un dossier". Il admet "un désaccord stratégique avec David durant l'été" et avoir désormais confié sa défense "à un pool d'avocats". De nouvelles actions judiciaires seraient en préparation…

En attendant, Nathalie Le Roy a été mise en examen le 16 août pour atteinte à la vie privée. Elle a reconnu qu'elle s'était bien rendue au cabinet de Me Koubbi, dans l'après-midi du 17 juin 2015, pour lui remettre l'enregistrement. Les deux juges d'instruction lillois chargés de l'enquête ayant été promus début septembre, la suite du dossier appartiendra à leurs successeurs. Au parquet de Lille de décider les éventuelles suites à donner à la conversation sur les "SMS à Jean"…

*Condamné en première instance à rembourser la banque du montant de sa perte, estimée à 4,9 milliards d'euros, Jérôme Kerviel a vu, en appel, sa condamnation ramenée à 1 million d'euros.

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