Algérie: les appels à l'armée pour se ranger aux côtés du peuple provoquent la panique du régime

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Le ministre algérien de l'Intérieur vient d'adresser une mise en demeure aux services de sécurité leur enjoignant de s'abstenir de marquer, via les réseaux sociaux, toute expression de «solidarité avec les opposants au régime». Les raisons d'une injonction qui en dit long sur la panique du régime.

Le 09/10/2017 à 14h54

Le régime de Bouteflika veut frapper d'une main de fer les éléments des services de sécurité qui voudraient se solidariser avec la vague d'appels lancés par des intellectuels et des politiques de l'opposition pour la destitution du président Abdelaziz Bouteflika. C'est ce qui ressort de cette mise en demeure adressée par le ministre algérien de l'Intérieur, Noureddine Bedoui, intimant aux éléments des services de sécurité de s'abstenir d'exprimer la moindre "solidarité, via les réseaux sociaux, avec les opposants au régime".

Selon nos confrères algériens, qui rapportent cette information, le ministre de la police aurait affirmé: "Ceux qui portent l'uniforme et se montrent solidaires avec les opposants du régime, sur les réseaux sociaux, je dis que leurs comptes sont surveillés par nos services. Nous allons sévir contre tous ceux qui tentent de déstabiliser le pays".

L'occasion de cette menace a été l'ouverture de l'année universitaire à l'Ecole nationale d'Administration (ENA, à Alger). A cette occasion, "le ministre Bedoui a menacé de sévir contre les policiers postant sur les réseaux sociaux, des vidéos ou des images soutenant les opposants du régime algérien", précise un confrère algérien.

Répondant à une question d'une journaliste relative à ce sujet, Noureddine Bedoui a déclaré, sur le ton de la menace, que "les éléments des services de sécurité identifiés verront leurs dossiers étudiés au cas par cas, par nos services spéciaux".

Cette mise en demeure intervient alors que l'Algérie connaît une montée en puissance des intellectuels et des hommes politiques appelant à une révolution populaire pacifique tout en mettant en garde l'armée et les services de sécurité contre toute intervention répressive à l'encontre du peuple algérien frère, à l'instar de ce qui s'est passé le 5 octobre 1988, quand le pouvoir a ordonné à l’ANP et aux services de sécurité d’utiliser leurs effectifs et leurs armes contre les manifestants pour rétablir l’ordre.

Le dernier appel en date, il émane de trois influentes personnalités algériennes: l'ancien patron de la Marine de guerre, le Général Rachid Benyelles, Me Abdennour Ali Yahia, avocat, homme politique et militant des Droits de l'Homme, et Ahmed Taleb Ibrahimi, homme politique, médecin (hématologue), intellectuel et écrivain. Ils viennent de signer une déclaration appelant à la création d'un front commun pour "faire barrage à ceux qui ont confisqué notre destin et préparent la candidature pour un 5ème mandat d'un vieil homme impotent et incapable de s'exprimer", soit l'entourage du président Bouteflika qui a perdu toute capacité de motricité depuis son accident vasculaire cérébral, AVC, diagnostiqué en 2013 à l'hôpital militaire Val-de-Grâce, à Paris.

Cet appel intervient au lendemain du lancement d'une initiative citoyenne par le parti "Jil Jadid" de Soufiane Jilali appelant à l'application de l'article "102" pour destituer "le président invalide". Il intervient également dans le sillage d''autres initiatives, à l'instar de celle de l'intellectuel Noureddine Boukrouh pour une révolution pacifique du peuple algérien contre le régime de Bouteflika. 

Pris de court par cette spirale contestataire, le régime grabataire et en rupture de ban craint que cette vague ne gagne les rangs des services de sécurité et de l'armée. La mise en demeure du ministre Bedoui en dit long sur cette peur panique d'un régime au bord de l'effondrement.

Par M'Hamed Hamrouch
Le 09/10/2017 à 14h54