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La forêt française toujours autant sous exploitée

Une superbe forêt de hêtres en France. Les feuillus constituent 72% du massif dans l'Hexagone. DR AFEF

Les rapports sur l'avenir du massif forestier français se sont multipliés en 75 ans. Et la situation ne s'est pas améliorée. Pire on pourrait ne plus avoir de résineux exploitables en 2050.

Ce jeudi matin, Jean-Marie Ballu, ingénieur forestier membre de l'AFEF (Association Française des Eaux et Forêts) est intervenu auprès d'une trentaine de décideurs publics et privés de la filière au musée de la Chasse à Paris. Il a tiré à nouveau le signal d'alarme sur l'avenir en sursis de la forêt française. «Malgré la publication de 26 rapports officiels concordants sur le devenir de la forêt française et du bois en 75 ans, la situation n'a pas évolué favorablement pour le secteur, dénonce l'ingénieur général honoraire des Ponts des Eaux et des Forêts. Il existe un paradoxe français: nous avons une forêt sous-exploitée et un risque d'envol des constructions en bois importés».

Ce dernier qui a consacré une grande partie de sa carrière à la forêt est lui même auteur du rapport «pour mobiliser la ressource de la forêt française» remis en novembre 2007 sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Depuis, deux autres rapports ont été remis à François Hollande dont le dernier, celui de Sylvie Alexandre a été publié en mars 2017, et la situation s'est dégradée. «Alors que la forêt française est composée à 72% de feuillus, tels les hêtres ou les chênes, le sciage de ces bois n'est que 17%, souligne-t-il. En revanche, les résineux tels les Douglas, épicéas ou pins qui ne représentent que 28% de la surface de la forêt française atteignent 83% de nos sciages». La demande actuelle est très forte pour la construction de maison 100% en bois qui sont des résineux faciles à travailler et correspondant au budget des ménages.

A ce rythme faute de replanter les résineux coupés, la forêt française, déjà déficitaire dans cette catégorie d'arbres, risque de ne plus en avoir du tout d'ici 2050. «Il faut environ 35 ans pour qu'un douglas mis en terre aujourd'hui donne un arbre exploitable», insiste Jean-Marie Ballu.

Dans le domaine des feuillus, la France, pourtant l'un des premiers constructeurs de tonneaux de vin en bois de chêne, n'utilise pas l'ensemble de ses ressources, car leur usage est limité à des meubles d'ébénisterie. Ils pourraient être davantage exploités mais cela demande la modernisation des outils industriels et la sensibilisation des consommateurs à ces espèces.

Moderniser les outils de production

La ressource excédentaire est transformée hors du pays à cause d'un outil industriel vieillissant et d'une main-d'œuvre trop coûteuse. Un exemple: les grumes de chêne des forêts françaises partent en Chine et reviennent par containers sous forme de parquets dans l'Hexagone! Pourquoi ne pas faire plus simple en fabriquant du Made in France?

Pour moderniser les outils de production et repeupler la forêt avec des espèces correspondant aux attentes des consommateurs, Jean-Marie Ballu propose de mettre en place un fonds de reboisement et d'adaptation climatique (Frac). «Il serait financé par les industriels de la construction et les grands énergéticiens qui ont besoin de reverdir leur image à travers les crédits carbonne en participant à la replantation de domaines forestiers, indique l'intéressé. Il permettrait d'investir dans de nouvelles scieries».

Pour l'instant, la forêt privée (les trois quarts de la superficie de la forêt française) représente 400.000 emplois, un chiffre d'affaires de 60 milliards d'euros et une balance commerciale nettement déficitaire de plus de 5 milliards d'euros. «Il ne faudrait pas limiter le rôle de la forêt française, troisième massif européen, aux loisirs de la promenade et de la chasse et sous estimer son rôle économique en important des bois de Scandinavie, Belgique ou d'Allemagne ou de Chine», conclut l'ingénieur forestier.

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62 commentaires
  • JilletJohn

    le

    Supprimer progressivement tous les pins et les remplacer par d'autres espèces comme les chênes, etc. Dans le midi les gens commencent à comprendre pourquoi il faut le faire.

  • JEAN-CLAUDE ISTRE

    le

    Ancien spécialiste du bois, ce que ne dit pas cet ingénieur, c'est que la plupart de la forêt des résineux sans le Sud est inexploitable, pins souffreteux ou tordus, de faible diamètre, fruits de la régénération spontanée à l'issue d'incendies multiples sur des sols appauvris et de plus en plus desséchés et donc très inflammables . Résineux, oui, mais en cultivant la forêt, or peu de gens s'en occupent par manque de soins et de revenus, leur but souvent unique étant d'en faire des territoires de chasse, et en plantant des esssences utiles là où c'est possible: douglas, sapin, épicéa et en faisant de la vraie sylviculrure.

  • camax

    le

    Juste du bon sens face à une aberration : exporter du bois brut vers la Chine et importer du bois transformé du même pays! C'est une situation de pays sous-développé!

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