Claude Guéant à sa sortie du palais de justice le 13 novembre 2015 à Paris

Claude Guéant est soupçonné d'avoir joué un rôle central dans le possible financement de la campagne de Nicolas Sarkozy de 2007 par le régime libyen.

afp.com/KENZO TRIBOUILLARD

Une enquête tortueuse et sensible, qui rassemble des éléments et témoignages accablants, mais pas de preuves matérielles. Les policiers anti-corruption (OCLCIFF), chargés d'enquêter sur le financement présumé de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy par la Libye de Kadhafi, ont rendu le 5 septembre dernier leur premier rapport d'investigations, rapporte ce vendredi Mediapart. Selon le site d'informations, ils estiment avoir mis au jour "de nouvelles qualifications pénales".

Publicité

Les soupçons des enquêteurs se sont notamment accentués à l'égard de Claude Guéant, directeur de campagne de l'ex-président à l'époque des faits. Les policiers s'interrogent notamment sur son "usage immodéré des espèces". Dans leur rapport, ils s'étonnent qu'il n'ait retiré que "800 euros" de son compte bancaire entre mai 2003 et fin 2012. Claude Guéant est soupçonné avec Nicolas Sarkozy d'avoir reçu plusieurs valises de billets émanant du régime libyen entre 2006 et 2007 par l'intermédiaire Ziad Takieddine. La somme de 5 millions d'euros est évoquée. L'ancien ministre a déjà été mis en examen en 2015 dans cette affaire, mais dans un volet annexe: celui de la vente douteuse de deux tableaux flamands pour 500 000 euros.

Un coffre fort et des enveloppes de cash

D'après Mediapart, Claude Guéant est soupçonné d'avoir "manipulé au moins 200 000 euros" en cash sans que l'on connaisse l'origine de ces fonds. Une chambre forte, louée par Claude Guéant durant la campagne présidentielle à une BNP de Paris, interroge également les enquêteurs. Ces derniers se demandent s'il n'y a pas entreposé de l'argent. L'intéressé, lui, conteste. Selon lui, cette pièce, de la taille d'un homme, ne comportait que des discours politiques de Nicolas Sarkozy.

Pourtant, d'anciens collaborateurs de l'UMP, auditionnés par les policiers, sont dubitatifs. "Cela n'a aucun sens. Les discours ont toujours transité par mail, même à l'Élysée quand il était président de la République", déclare l'un d'entre eux, selon le site d'informations. Un autre assure que c'est "un mensonge". D'autant que l'enquête a permis de déterminer que de nombreuses enveloppes d'argent en liquide circulaient à l'UMP pour payer les salariés de la campagne. Les enquêteurs se demandent si ces fonds ne pourraient pas provenir des fameuses valises de billet que Ziad Takieddine dit avoir rapportés de Libye.

Un enregistrement vidéo accablant?

"A l'époque je l'ignorais, maintenant avec ce que j'ai lu dans la presse, je m'imagine que Takieddine est à l'origine [de ces enveloppes]. J'ai souvenir d'avoir participé à deux meetings, ils étaient grandioses, le décor, les lumières [...]", s'est étonné, avec le recul, l'un des salariés de la campagne lors de son audition.

Par ailleurs, toujours selon Mediapart, le rapport des policiers anticorruption mentionne l'existence d'une note troublante de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) datée de 2013. Dans celle-ci, le service de renseignement raconte que l'une de leurs sources prétend qu'il existe "un enregistrement vidéo" prouvant que Nicolas Sarkozy a reçu 20 millions d'euros de Kadhafi par le truchement d'un proche. Sans que l'on sache si la vidéo en question est authentique. À ce stade, Nicolas Sarkozy n'a pas été entendu dans le cadre de cette enquête, mais pourrait l'être prochainement.

Publicité