Services publics

Les fonctionnaires : trop nombreux, trop chers, trop malades ?

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Manifestation de la fonction publique, le 10 octobre dernier, à Paris. PHOTO : Christophe Archambault - AFP

Le 16 octobre dernier, au sortir de sa réunion avec les syndicats de la fonction publique, le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a indiqué qu’il les avait déjà rencontrés 37 fois depuis sa prise de fonction. Le dialogue existe, mais il s’apparente surtout à un dialogue de sourds ! Parce que la position du gouvernement envers les fonctionnaires se résume à trois affirmations : il y en a trop, ils coûtent trop chers et ils sont trop souvent absents (voir notre dossier spécial sur la mobilisation du 10 octobre).

Trop nombreux ?

Emmanuel Macron a promis de réduire de 120 000 le nombre de fonctionnaires. La France en a-t-elle trop par rapport aux autres pays ? Selon les calculs de Xavier Timbeau, de l’OFCE, si l’on considère toutes les personnes offrant des services publics, quel que soit leur statut, la France comptabilise 126 « fonctionnaires » pour 1 000 habitants, soit le même niveau que l’Allemagne, le Royaume-Uni ou le Canada, mais moins qu’aux Etats-Unis.

La France comptabilise 126 « fonctionnaires » pour 1 000 habitants, soit le même niveau que l’Allemagne, le Royaume-Uni ou le Canada, mais moins qu’aux Etats-Unis

Couper dans les effectifs ne sera pas aisé : l’hôpital, l’éducation et la sécurité, en manque de personnels, représentent 60 % du total des 5,65 millions d’agents publics. Certes, les collectivités locales ont connu une forte croissance des emplois depuis le début des années 2000 (plus un tiers environ), mais les personnels administratifs ne représentent que 20 % du total. Et la population française augmente.

Trop rémunérés ?

Côté rémunération, en 2015, un fonctionnaire territorial percevait en moyenne 1 890 euros nets par mois, 2240 à l’hôpital et 2 490 pour un agent de l’Etat, contre 2 250 euros dans le privé. Un niveau proche alors que les fonctionnaires sont plus âgés et comptent proportionnellement plus de cadres. Le gel du point d’indice entre 2010 et 2016 leur a fait perdre du pouvoir d’achat et les deux hausses de 0,6 % fin 2016 et début 2017 ne représentent qu’un faible rattrapage. Depuis le pic de 1977 avec ses 27,5 % de dépenses publiques, la part des rémunérations des fonctionnaires n’a cessé de diminuer pour atteindre 23 % en 2016. Les agents publics semblent désormais considérés uniquement comme une piste d’économies potentielles.

Trop protégés ?

Tous les fonctionnaires n’ont pas le statut de fonctionnaire : il y a 17 % de contractuels, 4 % de contrats aidés et 7 % de statut particulier (médecin…). Pour calculer leur retraite, leurs six derniers mois de salaires sont pris en compte, contre les vingt-cinq meilleures années dans le privé. Mais ce calcul ne tient pas compte de leurs primes, qui représentent en moyenne un quart des rémunérations (de 5 % pour les professeurs des écoles à 45 % pour les postes de direction dans l’Etat).

Stigmatiser les fonctionnaires revient à éluder la question de fond : quels sont les services publics qui, transférés au privé, seraient plus efficaces ?

Enfin, les fonctionnaires sont-ils des tire-au-flanc, ce qui nécessiterait de rétablir le jour de carence (non remboursé) en cas de maladie comme le souhaite le gouvernement ? En 2016, le nombre de salariés absents au moins un jour au cours d’une semaine était de 4 % dans la fonction publique, contre 3,8 % dans le privé. Avec des variations importantes : 3 % pour les fonctionnaires d’Etat ; 4,7 % dans la fonction publique hospitalière, en sous-effectif ; et 5,1 % dans la territoriale, avec horaires atypiques et tensions avec le public. Le baromètre Ayming sur l’absentéisme place le taux à 4,6 % dans le secteur privé, à 5 % dans le secteur de la santé et à 5,5 % dans les services, signes de métiers difficiles quelque soit le secteur. Stigmatiser les fonctionnaires revient à éluder la question de fond : quels sont les services publics qui, transférés au privé, seraient plus efficaces ?

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Commentaires (4)
CHRISTOPHE V. 23/10/2017
suite de mon précédent commentaire (trop long) : est-ce à dire que les travailleurs du privé compense la mauvaise productivité de ces fainéants de fonctionnaire ? Merci les travailleurs du privé de mettre les bouchée double pour compenser. Trop sympas !
CHRISTOPHE V. 23/10/2017
Malgré un nombre pléthorique (selon Macron, Sarkozy et consorts) de fonctionnaires fai, la France est dans le peloton de tête des pays de l'OCDE du point de vue de la productivité horaire derrière l'Irlande et le Luxembourg (paradis fiscaux), la Norvège (pétrole), le Danemark, les USA et les Pays-Bas (pays "normaux"), devant l'Allemagne (autre pays comparable quoi qu'aux ressources charbonnières immenses). Source OCDE : http://stats.oecd.org/Index.aspx?DataSetCode=PDB_GR&lang=fr#
morand 21/10/2017
Il y a beaucoup trop de primes dans le service public ; cela donne l'illusion de bons revenus, mais en cas de maladie et à la retraite tout saute!
morand 20/10/2017
La suppression du jour de carence n'est pas "futée" pour les services où le planning n'est pas fixe; le nombre d'arrets courts a diminué mais qu'en est-il du nombre d'arret long? Au lieu de prendre 2 jours pour faire le joint avec des repos, on prend une semaine!
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