Laura (1), 12 ans, a ouvert un compte Facebook à l’insu de ses parents. Un homme jeune la contacte, et lui parle de ses animaux préférés. Homayra Sellier, présidente de l’association Innocence en danger (2), qui suit cette affaire, raconte : « Un dimanche, elle est seule, il lui propose de jouer avec ses bébés pandas, “Ma femme et moi allons venir te chercher.” Rendez-vous pris à côté de chez elle, elle voit débarquer un quinquagénaire à moto. Il la rassure : “C’est avec mon fils que tu parles”, puis la kidnappe et la viole. »

Avec Snapchat, un rapport différent à l’image s’instaure

Des pédophiles qui cherchent leurs proies sur Internet, ce n’est pas nouveau. « Mais aujourd’hui, les jeunes savent mieux utiliser les réseaux sociaux, et le font de plus en plus tôt. Avec Snapchat, un rapport différent à l’image s’instaure, on se montre plus qu’avant. Les photos donnent des infos sur la localisation aux prédateurs. Nous avons le cas d’une adolescente agressée par un pédophile qui a pu repérer où était son match de volleyball. » Chaque semaine 3 500 infractions – dont 50 % liées à des escroqueries – signalées sur le site du gouvernement (3) sont analysées par une quinzaine de policiers de la plateforme Pharos (Plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements « Les infractions à caractère sexuel sont notre quotidien, explique Agnès (1), enquêtrice Pharos.

Vidéo du jour

Les pédophiles infiltrent les groupes Internet comme Facebook, mais aussi les jeux en ligne, notamment Movie Star Planet. Ils piratent des photos de profil de jeunes utilisateurs, se font passer pour eux, installent une confiance avec leur victime, lui demandent : “Tu as déjà fait l’amour ?” Parfois, ils proposent de l’argent ou un IPhone 7 en échange de rapports sexuels. Une fillette de 11 ans, choquée, a dénoncé le pédophile. Les conversations en ligne existent depuis longtemps, mais aujourd’hui elles sont instantanées avec Snapchat, WhatsApp… » Et s’il n’existe pas de chiffres officiels sur ce phénomène, les moyens sont-ils à la hauteur de l’enjeu ?

Les services de la police et de la gendarmerie sont mobilisés

« Les services de la police et de la gendarmerie sont mobilisés, confirme Myriam Quemener (3), conseillère au ministère de l’Intérieur pour la lutte contre les cyber-menaces. Par ailleurs, le législateur n’a pas cessé de renforcer l’arsenal contre le cyber-harcèlement, ainsi depuis 2016, le revenge porn est puni. » Mais avant la répression, il faut miser sur la prévention : à l’école, sur les réseaux sociaux, « qui n’ont pas d’obligation générale de surveillance, juste celle de retirer les contenus illicites signalés », et à la maison. « On dit à son enfant : “N’ouvre pas la porte à un inconnu”, mais avec son IPhone ou son ordinateur, c’est le monde entier qui s’invite. Il faut lui expliquer les dangers, notamment de la géolocalisation, s’intéresser à ses 300 amis sur Facebook », conseille Homayra Sellier. Selon l’enquêtrice, il faut installer le contrôle parental sur l’ordinateur, protéger le profil Facebook et activer les paramètres de confidentialité. Et toujours garder un œil sur la vie virtuelle de ses enfants.

1. Le prénom a été modifié. - 2. innocenceendanger.org, 01 45 89 71 36. - 3. internet-signalement.gouv.fr. 4. Auteure de Le juridique face au numérique, éd. Economica