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« Le pire, c’est le vomi dans les jardinières » : Amsterdam en a assez des touristes

Après de nombreux efforts pour attirer les touristes, la « capitale culturelle » des Pays-Bas est dépassée par leur nombre. La municipalité devrait prendre des mesures.

Publié le 02 novembre 2017 à 09h33, modifié le 02 novembre 2017 à 14h17 Temps de Lecture 3 min.

Des touristes visitent le centre-ville d’Amsterdam, le 22 avril 2017.

Il y a environ dix ans, Amsterdam a tout misé sur le tourisme : se rendre accueillante devait être un moyen pour la ville néerlandaise de se relever de la crise financière de 2008. Avec ses canaux, ses vélos, ses maisons pittoresques, ses grands musées de peinture et son cannabis en vente libre, la cité avait tout pour devenir une destination prisée.

Résultat : entre 2005 et 2016, le nombre de touristes est passé de 11 millions à 18 millions par an. Et il devrait atteindre 23 millions par an en 2030… Beaucoup trop aux yeux des 850 000 résidents permanents, d’autant que le centre historique de la ville (du XVIIe siècle), formé de rues étroites et de canaux, n’est pas conçu pour absorber un tel flot de visiteurs.

Le Guardian a interrogé des Amstellodamois, témoins impuissants de la transformation de leur ville. Els Iping, 64 ans, a récemment surpris des touristes alcoolisés en train de déraciner les plantes de son jardin. Selon elle, le flot incessant de touristes laisse chaque jour un déluge d’ordures derrière lui. « Le pire, c’est le vomi dans les jardinières, dit-elle. Parce qu’on ne peut pas se contenter de rincer, il faut l’enlever à la cuillère. »

La vie de quartier disparaît

Après cette entrée en matière peu ragoûtante, elle dit au Guardian à quel point son quartier a changé en une décennie : les cris de touristes avinés du jeudi au dimanche, les commerces de proximité qui ont laissé place à des boutiques destinées aux touristes.

Les propriétaires sont également moins enclins à louer leur espace à des services destinés aux locaux. « Pour les médecins, il est de plus en plus difficile de trouver des espaces où installer un cabinet, regrette encore Els Iping. Mais je me considère comme chanceuse, au moins, je connais mes voisins. » De plus en plus d’habitants vivent entourés d’appartements disponibles sur Airbnb. Les occupants vont et viennent et la vie de quartier disparaît.

« Les visiteurs voient Amsterdam comme un parc à thème géant », ajoute Els Iping. En se mobilisant, des habitants ont toutefois réussi à avoir raison du bierfiets, une sorte de vélo collectif pouvant accueillir douze personnes, qui faisait aussi office de bar et charriait avec lui un ensemble de problèmes : bruit, bière renversée et, évidemment, une question d’hygiène qui ne manque pas de se poser lorsqu’un touriste a bu trop de bière.

« Nous devons reprendre le contrôle »

Récemment, la municipalité a pris des mesures pour mieux encadrer les locations sur Airbnb, et a décidé d’un moratoire sur la construction de nouveaux hôtels. La taxe hôtelière a été augmentée, et les nouvelles boutiques destinées aux touristes ne sont plus les bienvenues dans le centre-ville.

« Pendant des années, nous avons encouragé les développeurs immobiliers à construire des hôtels, et notre équipe marketing a fait le tour du monde pour vanter Amsterdam comme destination touristique. Nous avons conscience désormais que nous devons reprendre le contrôle, explique le conseiller municipal chargé de l’économie, Sebastiaan Meijer. Notre stratégie marketing a consisté à dire aux gens de venir à Amsterdam. Désormais, nous voulons leur dire : “Venez, mais soyez respectueux.” »

Car Amsterdam a la réputation d’être la ville où tout est possible : prendre de la drogue, mais aussi fréquenter le Quartier rouge, les quelques rues d’Amsterdam où les prostitué·e·s ont pignon sur rue. « Amsterdam a cette réputation, et c’est pour cela que de nombreux touristes se déchaînent. Ils font ici des choses qu’ils ne feraient même pas en rêve chez eux », explique un habitant de 59 ans, Bert Nap.

Venise, Rome, Barcelone…

La cité hollandaise n’est pas la seule ville européenne à connaître ces contreparties délétères du tourisme de masse. Le mécontentement des habitants monte depuis de nombreuses années en Italie, en Espagne, ou plus récemment en Croatie.

A Venise, la municipalité décrit un « état de guerre » en juillet et août, et une campagne d’affichage pour inciter les touristes à se montrer plus respectueux a vu le jour cet été, à la suite d’une manifestation réunissant deux mille habitants.

A Rome, le tarif des amendes pour les touristes qui s’installent sur les fontaines pour déjeuner a augmenté. A Barcelone, des tags ont fleuri au cours de l’été : « Le tourisme tue nos quartiers », pouvait-on lire sur le pare-brise d’un bus à impériale destiné aux visiteurs. La municipalité a promis un meilleur encadrement des locations Airbnb.

Une campagne d’affichage pour inciter les touristes à plus de respect, à Venise.

Plusieurs facteurs favorisent l’émergence d’un problème qui semble désormais difficile à surmonter : l’essor de la location saisonnière dans le parc privé (Airbnb), les vols à prix cassés qui favorisent la pratique du « week-end prolongé ». Or, si le nombre des touristes augmente, les destinations changent peu : ce sont donc d’abord les « villes d’art et d’histoire » européennes qui restent privilégiées. Et doivent assumer cette pression toujours accrue.

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