Publicité

Catalogne : le parquet réclame un mandat d'arrêt européen contre Carles Puigdemont

Le président indépendantiste catalan destitué par Madrid Carles Puigdemont dénonce un procès «politique». NICOLAS MAETERLINCK/AFP

VIDÉO - La juge devrait décider d'ici vendredi si elle accepte ou non cette réquisition du parquet espagnol. Dans le même temps, huit membres de l'exécutif catalan destitué ont été placés en détention provisoire, dont le vice-président de la région, Oriol Junqueras.

Le bras de fer judiciaire se poursuit entre les indépendantistes catalans et le gouvernement central espagnol. Le parquet espagnol a demandé jeudi l'émission d'un mandat d'arrêt européen contre le président catalan destitué Carles Puigdemont et quatre de ses «ministres», après leur refus de comparaître devant une juge de l'Audience nationale, juridiction spécialisée dans les dossiers complexes. La juge doit encore décider si elle accepte cette réquisition. Elle n'a toutefois pas demandé, pour l'instant, de mandat d'arrêt européen contre l'ex-président Carles Puigdemont, selon une source judiciaire à Reuters. Cette demande pourrait toutefois intervenir à partir de vendredi, d'après la même source.

Peu après, la juge a ordonné le placement en détention provisoire pour le vice-président Oriol Junqueras et sept autres des huit «ministres». Elle a également ordonné la liberté sous caution de 50.000 euros pour un neuvième ministre, Santi Vila, qui avait démissionné avant la proclamation unilatérale d'indépendance de la Catalogne le 27 octobre. Ce jugement suit les réquisitions du parquet qui avait eu lieu dans la matinée.

Les dirigeants sécessionnistes sont accusés d'avoir encouragé «un mouvement d'insurrection active» au sein de la population catalane pour parvenir à la sécession, dans la pire crise qu'ait connue l'Espagne depuis la fin de la dictature de Francisco Franco (1939-1975).

Par ailleurs, l'audition de six députés et membres du bureau du Parlement catalan par un juge de la Cour suprême espagnole a été ajournée au 9 novembre à la demande de leurs avocats. Le motif de ce report n'a pas été précisé mais les avocats s'étaient étonnés de la brièveté du délai de la convocation. En attendant, ils sont tous placés sous surveillance policière afin d'éviter une éventuelle fuite, ou la destruction de preuves. Cette procédure devant la Cour constitutionnelle est toutefois distincte de celle concernant les membres du gouvernement destitué.

De son côté, Carles Puigdemont a confirmé mercredi soir qu'il ne se présenterait pas à la convocation devant l'Audience nationale. Dans un communiqué, il a présenté la division de son propre gouvernement comme une tactique concertée. Certains iront devant l'audience nationale «dénoncer la volonté de la justice espagnole de poursuivre des idées politiques», les autres «resteront à Bruxelles pour dénoncer devant la communauté internationale ce procès politique». Carles Puigdemont a fustigé un «procès politique» conduit «sous les ordres de l'État espagnol» dans lequel les peines encourues sont «équivalentes à celles prévues pour des crimes comme l'assassinat et le terrorisme».

« Il ne va pas à Madrid, et j'ai proposé qu'on l'interroge ici en Belgique »

Paul Bekaert, avocat de Carles Puigdemont

Selon son avocat, qui a déjà évité à des membres présumés de l'organisation séparatiste basque ETA d'être renvoyés en Espagne, le leader sécessionniste destitué peut demander à être entendu en Belgique. «Il ne va pas à Madrid, et j'ai proposé qu'on l'interroge ici en Belgique», a déclaré Me Paul Bekaert mercredi à la télévision catalane TV3.

L'avocat estimait déjà le 31 octobre que «le risque était grand que son client soit arrêté» s'il retournait en Espagne. Ce jour-là, au moins deux membres destitués du gouvernement catalan de Carles Puigdemont étaient rentrés à Barcelone: Dolors Bassa, conseillère au Travail, et Joaquin Forn, conseiller à l'Intérieur. Celui-ci a d'ailleurs été chahuté à son arrivée à l'aéroport par des opposants à l'indépendance qui l'ont qualifié de «traître», brandissant des drapeaux espagnols à la main. Dans ce climat, Me Paul Bekaert juge qu'il est «prématuré» de dire si Carles Puigdemont aura un procès équitable en Espagne, «mais c'est certainement un argument que nous allons utiliser dans le cas d'une éventuelle demande d'extradition».

« Un Puigdemont libre ne génère pas de retombées électorales mais un Puigdemont en prison, si »

Oriol Bartomeus, politologue

Les analystes voient dans la manœuvre du président du gouvernement catalan une stratégie électorale à moins de 50 jours d'un scrutin où les indépendantistes espèrent reconduire la majorité qu'ils ont utilisée en novembre 2015 pour enclencher le processus de sécession.

En s'exilant à Bruxelles, Carles Puigdemont «joue plus à capter l'attention médiatique qu'à échapper à la justice», a déclaré à l'Agence France-Presse à Madrid le politologue Fernando Vallespin. À Barcelone, son collègue, Oriol Bartomeus, a vu lui aussi dans l'attitude du dirigeant indépendantiste catalan une stratégie électorale. «S'il ne se présente pas devant le juge, il deviendra un fugitif et cela pourra conduire le juge à décider sa mise en détention provisoire: or, un Puigdemont libre ne génère pas de retombées électorales mais un Puigdemont en prison, si», a-t-il estimé.

Catalogne : le parquet réclame un mandat d'arrêt européen contre Carles Puigdemont

S'ABONNER
Partager

Partager via :

Plus d'options

S'abonner
647 commentaires
    À lire aussi