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Témoignage

Obama veut inspirer les jeunes générations d’activistes

Du beau monde à Chicago, mardi soir, pour le lancement de la fondation Obama. Parmi les 500 invités, une seule Française : la militante, essayiste et journaliste Rokhaya Diallo. Elle livre ses impressions à «Libération».
par Rokhaya Diallo, militante associative
publié le 1er novembre 2017 à 17h50

«J'ai 56 ans, il n'est pas trop tard, je peux encore avoir un impact. Que devrais-je faire ?» Cette interrogation n'émanait pas d'un préretraité lambda mais de celui qui, il y a peu encore, était le président de la plus grande puissance mondiale. Barack Obama organisait mardi à Chicago la première édition du sommet de sa fondation nouvellement créée, The Obama Foundation Summit. Et signait ainsi, dans les murs d'un grand hôtel, face à une audience réduite et triée sur le volet, dont je faisais partie, son grand retour sur la scène publique. Cinq cents personnes, considérées comme des leaders civiques, ont assisté avec ferveur au discours de l'ancien président américain dont la décontraction ne s'est pas démentie.

Parmi ces militants, sélectionnées par l’équipe de la fondation Obama parmi 20 000 candidats, 400 venus des Etats-Unis, et 100 de 60 pays différents. C'est Bernadette Meehan, directrice internationale de la fondation, ancienne diplomate de l’administration Obama, qui a supervisé leur recrutement. Surprise, je suis la seule Française du lot, mon nom ayant été suggéré par le programme de leadership European Young Leaders. Et c’est mon témoignage qui est choisi pour introduire le clip diffusé en ouverture du sommet.

Barack à la salle de sport

Depuis mon arrivée à Chicago, la ville qui a vu naître politiquement Barack Obama, j’ai le sentiment d’assister à une conférence des Nations unies qui ne réunirait que des activistes. J’ai fait le chemin depuis l’aéroport avec Asmaa Abumezied, une Palestinienne qui a travaillé avec l’ONG Oxfam pour améliorer l’autonomie économique des habitants de la bande de Gaza. A mon arrivée à l’hôtel, je croise le chanteur de dancehall et rappeur zambien B Flow, ambassadeur mondial de la lutte contre le sida. Il se souvient avec enthousiasme du discours de Barack Obama qui, en 2015, rendait hommage à son usage de la musique contre les violences faites aux femmes.

Et le lendemain matin, alors que, dans la salle de sport de l'hôtel, les yeux dans le vague, je cours sur un tapis qui ne me mène nulle part, c'est Barack Obama himself qui interrompt mes rêveries, quand il vient y accomplir sa série d'exercices matinaux sous l'œil attentif de son coach.

Former la relève

Au petit-déjeuner, Ozan Yanar, député finlandais écolo élu à l'âge de 27 ans, qui se décrit comme le «seul immigré du parlement finlandais» – il est né en Turquie – m'invite à se joindre à sa conversation avec Kirsten Bosbol, ancienne ministre de l'environnement du Danemark. Non loin se trouve Dani Laurence, réfugiée hongroise élevée en Suisse, fondatrice de I Am your Protector, une campagne pour résoudre les conflits intercommunautaires dans les situations allant du harcèlement aux conflits violents. Marco Gualtieri, originaire de Milan, m'explique comment la technologie peut permettre la production de nourriture dans une réflexion visant à combattre la famine. Marko Gregovic évoque la création de son ONG Brodoto, destinée à promouvoir le tourisme équitable dans son pays, la Croatie.

Tous ces activistes ont passé une sélection drastique : la fondation Obama a reçu plusieurs milliers de candidatures ! Son but : former la relève, la génération qui demain guidera la transformation sociale. Fort de son fort capital sympathie amplifié par la présence de son épouse Michelle à ses côtés, il en est convaincu : «Les gens ordinaires mais actifs localement dans leurs communautés peuvent accomplir des choses extraordinaires si on leur en donne la possibilité.» Et pour inspirer cette génération potentiellement extraordinaire, la fondation n'a pas lésiné sur les moyens.

Soft power cool

Une succession d’intervenants et d’intervenantes de tous horizons, allant de l’ancien président du conseil des ministres italien Matteo Renzi au Prince Harry… En dehors de la scène principale, d’autres activités permettent d’accéder à des sessions plus restreintes autour de sujets allant de l’implication des femmes dans les sphères de pouvoir à la sensibilisation des jeunes et aux causes relatives aux droits humains, en passant par l’écosystème entrepreneurial dans les marchés émergents. Pour modérer ces ateliers, on trouve aussi des visages connus comme celui de l’actrice Rashida Jones, fille de Quincy et star du petit écran.

Dans le public, parmi les activistes, les regards attentifs de stars montantes et engagées telles le rappeur Young Paris signé par le label de Jay Z, l'actrice et scénariste Lena Waithe, lauréate d'un Emmy Award pour la série Master of None il y a quelques semaines, ou encore la commentatrice politique Sally Kohn.

S'il a pris sa retraite politique, Barack Obama semble bien décidé à rester présent. Pour asseoir sa sphère d'influence, il pourra sans aucun doute compter sur ces jeunes esprits, dont certains deviendront sans doute dirigeants d'ONG, d'entreprises, ou politiques. Rien de bien nouveau en somme, le soft power cool est une recette ancienne bien connue des dirigeants américains.

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