Harcèlement sexuel : "Faire changer les mentalités d'un pays coûte de l'argent"
Le JDD publie dimanche une tribune de cent femmes pour réclamer à Emmanuel Macron un plan d'urgence contre les violences sexuelles. Celles qui sont à l'origine de cette initiative s'expliquent.
L'affaire Weinstein a déclenché une lame de fond mondiale. Le scandale a poussé nombre de femmes à sortir du silence, révélant l'ampleur du phénomène. Les statistiques sont pourtant connues depuis longtemps. En France par exemple, une femme sur deux a déjà été victime de violence sexuelle. Face à ce constat alarmant, cent femmes, les premières signataires d'une pétition mise en ligne samedi soir, appellent Emmanuel Macron dans le JDD à agir. Elles réclament, dans l'appel publié dans nos colonnes, "un plan d'urgence maintenant" .
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Leur tribune met en avant cinq propositions : la hausse des subventions aux associations, la systématisation des formations pour les professionnels en contact avec les victimes, la création d'un brevet de la non-violence pour sensibiliser les collégiens, le développement des formations en entreprises sur le sujet et le lancement d'une grande campagne de prévention. "Nous avons voulu nous appuyer sur la méthodologie de la lutte contre les violences routières", explique au JDD la militante féministe Caroline De Haas, l'une des quatre femmes à l'origine de l'initiative.
L'argent, le nerf de la lutte
"Après trente ans de campagne contre l'insécurité routière, nous avons appris à faire attention. Pourquoi ne pas faire la même chose contre les violences sexuelles?", renchérit la journaliste Giulia Foïs, qui développe : "Les violences sont des comportements appris. L'homme n'est pas violent, sur les routes ou envers les femmes, par nature. On peut désapprendre." Pour celles qui sont à l'origine de la tribune publiée par le JDD, l'affaire Weinstein a provoqué une forte émotion qu'"il est temps de transformer en actes concrets".
"Ce sont désormais aux politiques de prendre le relais
"
Certes, Emmanuel Macron a évoqué le problème en prime time, lors de son interview du 15 octobre sur TF1. "Qu'un président de la République nomme les choses à la télévision, à une heure de grande écoute, c'est bien sûr une bonne chose, explique la militante féministe Clara Gonzales. Pour autant, Emmanuel Macron a aussi permis une baisse du budget du secrétariat d'Etat de l'Egalité entre les femmes et les hommes." Or, sans moyens financiers, la lutte contre les violences faites aux femmes n'est rien. "Comme l'a démontré la lutte contre les violences routières, il faut beaucoup d'argent pour faire bouger les choses, que ce soit pour réprimer les mauvais comportements ou développer la prévention", note encore Clara Gonzales.
"Faire changer les mentalités d'un pays coûte de l'argent", martèle Caroline De Haas qui insiste sur l'importance de l'engagement de l'Etat : "Ce ne sont pas les entreprises qui vont sensibiliser leurs salariés au problème du harcèlement. Celles qui le font se comptent sur les doigts des deux mains. Le meilleur levier reste la puissance publique." A Emmanuel Macron de répondre à leur appel. "Ce sont désormais aux politiques de prendre le relais", conclut Giulia Foïs.
Une tribune sans homme signataire
Dans les premiers signataires de la tribune que publie le JDD, il n'y a pas d'hommes. Un choix voulu, expliquent celles qui sont à l'origine de l'appel. "L'idée n'est pas d'exclure les hommes, nuance Caroline De Haas, mais c'est légitime que les premières concernées aient d'abord la parole." "Il n'y a pas de clivage entre hommes et femmes, mais entre harceleurs et victimes", insiste encore Giulia Foïs. Pour Clara Gonzales, le sujet des violences sexuelles a trop longtemps été porté… par des hommes : "Ce sujet, on peut se le réapproprier. On a été l'objet de ce débat. A nous d'en devenir les sujets."
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