Légère, la décision de l'Anses ?
A la suite de cette vive polémique, les deux ministres Nicolas Hulot (Ecologie) et Stéphane Travert (Agriculture) ont demandé à l'Anses "d'analyser de façon prioritaire" de nouvelles données "relatives aux risques du sulfoxaflor". Ces données complémentaires, selon le gouvernement, pourraient modifier les deux autorisations de mise sur le marché "dans un délai de trois mois".
Le sous-texte du communiqué de Nicolas Hulot et de Stéphane Travert était assez limpide : l'Anses aurait fait preuve d'une certaine légèreté en disant oui au sulfoxaflor alors que l'Europe vit une terrible scène de ménage (toujours en cours) sur le sort du glyphosate . Il s'agit du principe actif de l'herbicide vedette de Monsanto dont l'autorisation doit être renouvelée avant le 15 décembre à l'échelle de l'UE.
Au gouvernement de choisir
Auditionné ce jeudi par la Mission d'information parlementaire sur l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, le directeur de l'Anses a fait entendre une toute autre musique. Selon Roger Genet, ses services ont autorisé le sulfoxaflor pour de solides raisons : les effets de cette molécule sur la santé humaine comme sur les abeilles en feraient "une alternative chimique insecticide qui présente plus d'avantages que les produits aujourd'hui utilisés" . Si ses conditions d'emploi, très restrictives, sont respectées, a ajouté le patron de l'Anses.
Après ce qui ressemblait très fort à une mise en accusation de ses équipes, Roger Genet ne s'est pas privé d'envoyer quelques cailloux de bonne taille dans le jardin du gouvernement. Le sulfoxaflor "a fait l'objet d'une autorisation avec un vote favorable de la France en 2015, précédée d'une consultation publique où toutes les parties prenantes ont pu s'exprimer", a-t-il rappelé. Surtout, il a suavement lâché que le gouvernement était parfaitement compétent pour "totalement interdire l'usage des insecticides en France" , une manière explicite de renvoyer la patate chaude à son expéditeur.
"Pas d'insecticide qui ne tue pas les abeilles"
Pour le reste, Roger Genet n'a pas manié la langue de bois. "Je ne connais pas d'insecticide qui ne tue pas les abeilles. La question c'est quelles sont les conditions d'emplois qui permettent aujourd'hui éventuellement de rendre le risque non-inacceptable" , a-t-il déclaré. La tâche de l'Anses est d'autant plus délicate sur ce chapitre que les controverses ne sont plus techniques mais sociétales, a-t-il reconnu devant les parlementaires.