Ministre et chef de parti : avant Castaner, la droite championne du cumul

Jacques Chirac et Alain Juppé ont été Premiers ministres alors qu’ils étaient chef du RPR, et Nicolas Sarkozy a été ministre de l’Intérieur alors qu’il était à la tête de l’UMP. Deux présidents centristes ont également cumulé leur poste avec des ministères d’importance.

 ARCHIVE. Jacques Chirac a été président du RPR et Premier ministre, Nicolas Sarkozy était chef de l’UMP lorsqu’il a été nommé ministre de l’Intérieur.
ARCHIVE. Jacques Chirac a été président du RPR et Premier ministre, Nicolas Sarkozy était chef de l’UMP lorsqu’il a été nommé ministre de l’Intérieur. LP/J.-B. Quentin

    Si Emmanuel Macron et Édouard Philippe se tiennent à leur première idée, le désormais chef de LREM, Christophe Castaner, devrait rester au gouvernement. Lassé par la polémique qui enfle à l'Assemblée, le Premier ministre a lui-même rappelé mercredi un précédent célèbre, qui n'avait à l'époque pas offusqué les rangs de la droite, première aujourd'hui à critiquer ce cumul des fonctions. Et de répondre directement au chef de file des députés LR, Christian Jacob : « Dans l'année 2006, vous avez vous-même été membre d'un gouvernement qui comptait dans ses rangs le président d'une formation politique au poste de ministre de l'Intérieur (Nicolas Sarkozy président de l'UMP, ndlr). » A y regarder de plus près et à scruter l'histoire des grands mouvements politiques français, la droite est même championne en la matière. Parmi les six précédents de ministres - chefs de parti, trois venaient du RPR puis de l'UMP, deux étaient des alliés centristes et une seule venait de la gauche.

    Deux ex-Premiers ministres et chefs de parti

    Le Rassemblement pour la République (RPR) compte même deux emblématiques Premiers ministres qui ont été en même temps chefs de parti. Son fondateur d'abord, Jacques Chirac, devenu chef du gouvernement de François Mitterrand en 1986, dix ans après avoir créé le grand parti de droite dont il n'a quitté la présidence qu'en 1994. Il est donc resté chef du RPR, et donc chef de la majorité, tout le temps de son mandat de Premier ministre.

    En 1994, Chirac laisse la tête du parti pour se concentrer sur l'élection présidentielle, qu'il remporte en 1995. Aain Juppé devient alors son Premier ministre. Or ce dernier avait déjà pris la suite de Jacques Chirac à la présidence du RPR. Il sera lui aussi chef de parti tout le temps de son mandat de chef de gouvernement.

    Philippe Séguin prend sa suite, avant de laisser de nouveau la présidence du parti à Alain Juppé. Son successeur, Nicolas Sarkozy, est élu à la tête de la désormais Union pour un mouvement populaire (UMP) de 2004 à 2007, année où il deviendra président de la République. Pendant ce laps de temps, le futur chef de l'Etat est ministre de l'Intérieur, un poste d'importance qui, selon Édouard Philippe, pouvait générer bien plus de conflits d'intérêts que le mandat de Christophe Castaner. « J'ai tendance à penser, monsieur le président Jacob, sans faire injure au secrétaire d'État en charge des Relations avec le Parlement, que ministre de l'Intérieur, on a en matière d'organisation des affaires publiques, de prise sur le débat public, de respect sur les libertés publiques, plus de prise que lorsqu'on est secrétaire d'État aux Relations avec le Parlement », a-t-il insisté mercredi.

    Deux centristes et une communiste

    Un précédent au sein même de ce gouvernement n'avait en outre provoqué aucun remous : François Bayrou, chef du MoDem, avait été nommé ministre de la Justice dès l'élection d'Emmanuel Macron. Le maire de Pau avait également été ministre de l'Education nationale de 1993 à 1997, sous l'allié d'alors Jacques Chirac, alors qu'il était également président du Centre des démocrates sociaux, puis de Force démocrate.

    Certes, les partis de François Bayrou n'ont jamais eu l'envergure du RPR ou de l'UMP mais ils ont été alliés pendant des décennies, jusqu'à la rupture de la dernière présidentielle et du soutien à Emmanuel Macron. Même schéma donc pour Hervé Morin, ministre d'importance également puisque chargé de la Défense de 2007 à 2010 sous le gouvernement de François Fillon, et président du Nouveau Centre depuis 2007.

    A gauche en revanche, un seul cas de cumul recensé. Au Parti socialiste, Premiers ministres ou ministres ont toujours quitté leur fonction de premier secrétaire du PS quelques jours après avoir été nommés au gouvernement, à l'image de Lionel Jospin ou Martine Aubry. Il n'y a jamais eu de véritable cumul. C'est au Parti communiste que l'on trouve le seul exemple de gauche, avec la ministre de la Jeunesse et des Sports de Lionel Jospin, Marie-George Buffet, alors secrétaire nationale du PCF. Mais une double casquette qui n'a duré qu'un an seulement.