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Darmanin, Solère et Lecornu adhèrent à En Marche

Un mois après leur exclusion des Républicains, ils franchissent le Rubicon. Gérald Darmanin, Sébastien Lecornu et Thierry Solère annoncent leur ralliement à La République en marche.

Christine Ollivier , Mis à jour le
Sébastien Lecornu, Gérald Darmanin et Thierry Solère annoncent leur ralliement à La République en marche.
Sébastien Lecornu, Gérald Darmanin et Thierry Solère annoncent leur ralliement à La République en marche. © Bernard Bisson pour le JDD

Ils étaient encore Républicains il y a moins d’un mois, ils sont désormais "en marche". Le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin , le secrétaire d’Etat à l’Ecologie Sébastien Lecornu et le député des Hauts-de-Seine Thierry Solère ont décidé de franchir le pas, ensemble, en rejoignant le parti d’Emmanuel Macron. Ils en font l’annonce en exclusivité au JDD. Gérald Darmanin a adhéré, via Internet, samedi matin, Thierry Solère et Sébastien Lecornu dans la soirée. Ils ont prévenu le Premier ministre, leur ami Edouard Philippe, et le patron de LREM Christophe Castaner . Pas Emmanuel Macron : "Le président de la République ne tire pas les ficelles partisanes", jure Darmanin.

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Trois hommes qui se connaissent bien

Samedi, ils posaient dans les jardins du Luxembourg, à Paris, devant le photographe du JDD pour officialiser leur décision. Ces trois-là se connaissent bien. Ils appartiennent au "groupe du Bellota-Bellota ", du nom du restaurant où la bande de copains dont Edouard Philippe était aussi se réunissait pour refaire le monde sous le mandat de François Hollande. Alors forcément, quand ils se retrouvent, le ton tourne vite à la rigolade. Il ne faut pas longtemps pour que Lecornu imite Nicolas Sarkozy. "Je mets une cravate?", s'inquiète Darmanin. Et au moment d'expliquer leur décision devant un café, il n'est pas rare que l'un achève la phrase que l'autre a commencée.

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Le moment qui m'a fait basculer, c'est quand Laurent Wauquiez a évoqué le "grand remplacement culturel"

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En mai, outrés des hésitations de leur famille politique au moment d'appeler à voter Macron contre Le Pen, ils avaient fait ensemble le pari de la recomposition politique. Gérald Darmanin, proche de ­Xavier Bertrand et soutien de Nicolas Sarkozy à la primaire, ainsi que ­Sébastien Lecornu, ancien bras droit de Bruno Le Maire, étaient entrés au gouvernement. Thierry Solère organisait la rébellion à droite en créant, avec Franck Riester et une poignée de députés LR et UDI, le groupe Les Constructifs à l'Assemblée. Un mois après avoir été exclus de LR, ils franchissent le Rubicon pour donner un nouveau coup de boutoir au "vieux monde" et, surtout, à la droite version ­Wauquiez. "Le moment qui m'a fait basculer, c'est quand Laurent Wauquiez a évoqué le 'grand remplacement culturel', confie Gérald Darmanin. On ne peut pas simplement dire qu'on n'est pas d'accord avec ça. Il faut le combattre."

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Cette droite, ils n'en veulent plus. "C'est la résurgence d'une vieille droite que le gaullisme avait su tenir à l'écart pendant toute la Ve République et qui revient au galop, s'inquiète ­Sébastien Lecornu. Déjà, le Trocadéro, c'était inacceptable…", lâche-t-il au sujet du rassemblement des partisans de François Fillon pendant la campagne présidentielle. "Quand j'ai adhéré au RPR à 17 ans, c'était 'le métro à 5 heures', comme disait Malraux, se souvient le ministre des Comptes publics. C'est devenu le parti de la défense du tabac, du diesel, des maisons en pierre et des retraités à plus de 2.500 euros par mois." Pour eux, cette droite-là ne sait plus où elle habite : "Ils en sont, aux questions au gouvernement, à applaudir les questions des communistes qui réclament plus de dépenses publiques!", s'exclame Lecornu.

Une trop grande proximité avec le FN

Ils reprochent surtout à leur ancien parti de flirter d'un peu trop près avec le Front national. "Il y a une ligne dure qui caporalise le reste et les autres claquent des dents en ne disant rien, ou pire, ils attendent de voir avec un certain cynisme", s'indigne le secrétaire d'Etat. "Quand j'écoute Guillaume Peltier à l'Assemblée, je me dis : qu'est-ce qui s'est passé pour que ce soit cette voix-là qui s'exprime au nom des Républicains?", renchérit Thierry Solère, au sujet de cet ancien proche de Philippe de Villiers qui a fait ses premières armes au FN. "La droite française, et c'est l'honneur de Jacques Chirac, Alain Juppé ou Nicolas Sarkozy, a toujours édifié une barrière infranchissable avec l'extrême droite", rappelle-t-il. Et de prédire : "Le moment venu, Laurent Wauquiez se retrouvera exactement sur la même ligne idéologique que la famille Le Pen."

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Je ne veux pas mettre mon énergie à reconstituer des vieilles formations politiques. Je veux la mettre à la reconstruction du pays

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Ce sera donc sans eux. Qu'on les soupçonne de ne pas avoir choisi par hasard de se lancer publiquement à deux semaines du congrès LR, et ils protestent en chœur. "Mais c'est eux qui nous ont exclus!, s'insurge Gérald Darmanin. Ce n'est pas nous qui avons choisi l'agenda." Et puis… "'Avant Wauquiez', 'après ­Wauquiez'… Laurent Wauquiez, c'est pas Jésus-Christ. La vie politique ne s'organise pas autour de son élection", grince-t-il.

Quid de leurs amis restés à LR, Xavier Bertrand, Valérie Pécresse ou Alain Juppé? A chacun son rythme, répondent-ils, mais ils mettent en garde : "Ils ne peuvent pas rester sur la ligne de Laurent Wauquiez sans rien faire ; d'ailleurs, Alain Juppé a commencé à dire des choses", note Darmanin. "Il y a des silences qui, à terme, seront des silences coupables", glisse Lecornu.

Edouard Philippe sans parti fixe

Il y a quelques jours encore, Thierry Solère travaillait pourtant activement en coulisses à la création d'un nouveau parti de centre droit. Prévu dans les tout prochains jours, le lancement d'"Agir, la droite constructive" devrait être accéléré, et Franck Riester devra le porter seul sur les fonts baptismaux. "Je ne veux pas mettre mon énergie à reconstituer des vieilles formations politiques. Je veux la mettre à la reconstruction du pays", se justifie Solère. Depuis six mois, "ce gouvernement a lancé toute une série de réformes que ni la droite ni la gauche n'ont eu le courage ou la capacité de mettre en œuvre, dit-il. Aux législatives, j'avais dit à mes électeurs : 'Je ne suis pas en marche mais je veux que ça marche.' Aujourd'hui, je leur dis : 'Pour que ça marche, il faut être En marche.'"

Ne leur dites pas qu'ils vont constituer l'aile droite de LREM. Elu de Tourcoing, Darmanin se verrait plutôt en représentant d'une "aile populaire", quand Lecornu, ex-président du département de l'Eure, voudrait incarner une "sensibilité provinciale". Mais "on ne se fait pas virer de LR pour recomposer le vieux système dans un autre mouvement", souligne-t-il.

Ils n'ont en revanche pas convaincu le Premier ministre de les suivre. "Edouard Philippe est un homme d'Etat dont la priorité est la mise en œuvre des transformations déterminantes pour notre pays", répond Solère quand on l'interroge. Exclu lui aussi de LR, ­Edouard ­Philippe va donc rester sans parti fixe. "Le Premier ministre est le chef de la majorité. Son rôle est de la coordonner et de convaincre un maximum de gens de la rejoindre", souligne son entourage. Lors du congrès de LREM il y a une semaine, le chef du gouvernement prédisait que la recomposition était "très loin d'être achevée". La décision de ses trois amis vient confirmer sa prédiction.

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