Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates
Biographie

Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates

Publié le 24 novembre 2017,
par VisionsMag.
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Peter Sunde est-il un activiste désabusé, un inlassable créateur de projets, un défenseur des libertés numériques ou un délinquant du Web ? Sans doute un peu de tout cela, et plus encore. Retour sur les multiples vies du célèbre Suédois, trublion et anticonformiste notoire.

Un procès retentissant

C’est en 2009, alors que s’ouvre à Stockholm le procès très médiatisé du site de partage The Pirate Bay, que le grand public découvre le visage juvénile de Peter Sunde. Le jeune homme, qui n’a alors que 31 ans, focalise l’attention des médias par ses petites phrases percutantes et son sens de l’à-propos. Ses multiples déclarations devant les caméras et sur les réseaux sociaux donnent alors de lui l’image d’un chevalier blanc parti en croisade contre des ayants droit accusés de tous les maux.

Se voulant à la fois pirate et justicier, rêvant d’un monde où la culture serait accessible à tous, la personnalité de Peter Sunde se détache de celles, plus controversées, des trois autres inculpés. L’idéologue du groupe n’a depuis cessé de s’exprimer, tirant un constat désabusé à propos de la dérive du numérique.

Peter Sunde : pirate par conviction

Né le 13 septembre 1978 à Uddevalla, en Suède, Peter Sunde s’intéresse très tôt à l’informatique. Un refuge pour ce fils de divorcés, que les aléas professionnels de sa mère obligent à des déménagements incessants. Mais, contrairement à d’autres passionnés du codage et des réseaux, Peter Sunde conceptualise Internet et en extrait une philosophie dont il ne se départira plus. Au cœur de ses préoccupations figure le rapport aux données, englobant tant les notions de propriété que de décentralisation.

C’est donc presque naturellement que, se penchant sur la technologie du torrent qui venait d’apparaitre, lui vient l’idée d’un site tout entier dédié au partage de fichiers. Lancé en 2003, The Pirate Bay connait très vite le succès. Pourtant la figure de Peter Sunde dénote avec celle de ses deux autres comparses, vraisemblablement plus motivés par l’aspect mercantile que par une quelconque idéologie. Il faut dire qu’en l’espace de quelques années, le frêle esquif suédois s’est transformé en vaisseau amiral du téléchargement illégal. Trop tard pour faire machine arrière : les ayants droit sollicitent la justice et placent Peter Sunde dans leur ligne de mire.

Une industrie musicale abhorrée

A l’issue du procès, il sera condamné à purger une peine de huit mois, peine qu’il finira par effectuer après deux années d’exil à Berlin. Mais pas question pour lui de payer le million d’euros d’amende réclamé par la justice : « même si j’avais de l’argent, je préférerais encore brûler tout ce que je possède, et qu’ils n’aient rien, pas même les cendres. […]Cela montre à quel point je déteste l’industrie musicale » . L’expérience de la prison le marque profondément. Végétalien, il perd 16 kilos et doit recevoir une assistance médicale. Dans sa cellule, il côtoie un prêtre vaudou qui a agressé une jeune fille de 14 ans, un trafiquant de cocaïne et un assassin.

Libéré en 2014, Peter Sunde continue de mener des projets qu’il avait lancés avant son arrestation, notamment la plateforme de micro-paiement Flattr. Touche-à-tout, il effectue en 2015 une incursion dans le domaine de l’art en présentant sa « Kopimashin », petit ordinateur capable de copier indéfiniment le même morceau de musique . Présentée à une exposition, la machine entend dénoncer « la futilité de l’économie basée sur les droits d’auteur dans une économie numérique » . Dans quelques mois sortira sa nouvelle application , destinée à prévenir ses utilisateurs lorsqu’un danger est géographiquement proche.

Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates
Portrait de l’un des cofondateurs du sulfureux site The Pirate Bay.
Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates
Peter Sunde, trublion et anticonformiste notoire sous la bannière des pirates

Une vision très pessimiste

S’il continue de mener ses combats en faveur du féminisme, des migrants et de l’écologie, c’est surtout dans la défense des libertés numériques qu’il s’investit. Un combat qu’il estime pourtant déjà pratiquement perdu. Sa verve est intacte lorsqu’il s’agit de fustiger les dérives des GAFA, ces quatre acteurs majeurs du numérique que sont Google, Apple, Facebook et Amazon. Alors que l’opinion publique s’inquiète d’un avenir où toutes les données personnelles, même les plus intimes, seront détenues par une poignée d’acteurs, Peter Sunde estime, lui, que le point de non-retour est déjà atteint. Qualifiant Mark Zuckerberg de « plus grand dictateur du monde » , seul un immense effort politique de la part de l’U.E ou et des Etats-Unis pourrait selon lui modifier un tant soit peu la donne.

Autre solution qu’il juge envisageable : que le système actuel du Big Data s’effondre un jour, pour pouvoir rebâtir un monde numérique plus équitable. Peter Sunde, en plus de ses multiples activités, se transformera-t-il en prophète de l’Internet ?

Photos : times.co.uk / dailytech.com / journaldugeek.com