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Crise en Allemagne : "il n'y aura pas de gouvernement avant février ou mars"

INTERVIEW Député libéral au Bundestag, membre de l’équipe de négociation pour une coalition gouvernementale Jamaïque et ancien vice-Président du Parlement européen, Alexander Graf Lambsdorff n’est pas inquiet pour son pays. Il refuse de parler d’une crise institutionnelle en Allemagne. Berlin ne devrait pas avoir de gouvernement avant février ou même mars. Et alors ?

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Angela Merkel le 20 novembre à Berlin.

Angela Merkel le 20 novembre à Berlin.

Tobias SCHWARZ / AFP

Etes-vous inquiet de la situation politique de l’Allemagne?

Non, même si la formation d’un gouvernement de coalition est plus compliquée que prévu. Mais le cadre institutionnel est stable, les marchés confiants et l’économie forte.

Certains journalistes allemands ont pourtant parlé de « crise institutionnelle ». Ont-ils tort?

Absolument tort ! Je sais que de nombreux experts à l’étranger scrutent ce qui se passe ici, mais il n’y a pas de quoi s’alarmer. Nous avons un gouvernement qui s’occupe des affaires courantes, une administration qui travaille, 16 régions, les Länder, qui assument leurs compétences.

Selon le microcosme berlinois, il n’y aurait pas de gouvernement allemand avant février. Cela vous paraît-il possible?

Oui, pas avant février ou même mars. Le délai me paraît réaliste. Et on sera encore bien loin des mois de négociation qu’ont connus la Belgique ou les Pays Bas! Notez toutefois qu’il n’est pas absolument certain que les conservateurs trouvent un accord avec les socio-démocrates. N’oubliez pas que le soir des législatives, le SPD a annoncé qu’il avait décidé de passer à l’opposition. Beaucoup de militants s’en sont réjouis. Aujourd’hui, la direction du parti doit opérer un changement à 180° et convaincre sa base, avec un projet fort et inspirant.

Selon vous que peut-elle proposer de crédible à ses partisans?

Si elle rejoint une coalition, elle va en faire payer le prix fort aux conservateurs. Trois pistes sont avancées actuellement par le SPD : augmenter les impôts pour les plus riches ; réformer l’assurance maladie pour la rendre universelle; obtenir le droit pour tout salarié à temps partiel de pouvoir travailler à plein temps, s’il le souhaite.

Un programme qui est un vrai cauchemar pour vous les libéraux?

Nous ne sommes pas d’accord avec ces idées. Nous nous opposerons à ce qui ne nous convient pas, de façon constructive au Parlement.

Ces nouvelles négociations avec les socio-démocrates ne vous donnent-elles pas de regret d’avoir rompu les pourparlers de coalition le 20 novembre?

Aucun regret. Nous n’avons pas senti pendant les discussions la volonté que nous avions de changer l’Allemagne de manière moderne, accélérée, en orientant notre économie vers un futur digital.

Aucune entente n’aurait donc été possible pour former une coalition Jamaïque?

Aucune, en effet. Beaucoup de projets étaient incompatibles, notamment entre les Verts et les conservateurs Bavarois. Il régnait par ailleurs un climat de trop grande méfiance entre négociateurs. Or les accords de coalition en Allemagne ont beau prévoir énormément de situations, on n’est jamais à l’abri d’une crise grave, comme cela a été le cas avec la crise grecque, sous la première grande coalition ou la crise des réfugiés, sous la coalition entre conservateurs et libéraux. Dans ces cas-là, il est impératif de pouvoir se faire totalement confiance au sein d’un gouvernement. Nous n’y sommes pas arrivés. Il y avait trop de défiance.

Peut-on imaginer, en cas de nouvel échec, qu’Angela Merkel essaie, dans un troisième temps, de former un gouvernement minoritaire avec votre parti?

Non c’est inimaginable. Nous serons au Bundestag dans  un rôle constructif et nous soutiendrons les projets positifs pour le développement du pays.

Pour l’Europe, il vaut mieux qu’Angela Merkel s’allie au SPD plutôt qu’aux libéraux, non?

Le SPD est en effet davantage en phase que nous avec la CDU sur les questions de dette européenne et d’union bancaire. Nous l’avons dit à Bruno Le Maire, lorsqu’il est venu à Berlin, après nos législatives. Il nous a rendu visite et nous lui avons répété notre désir de ne pas fermer la porte à des réformes de la zone euro, mais aussi notre méfiance face à la mise en place de pots communs européens, dans lequel il y aurait beaucoup d’argent, et pour lesquels il y aurait de la part des pays membres une forte tentation de puiser, sitôt la première crise venue.

A part cette réserve de taille, vous avez plutôt une bonne opinion de la politique d’Emmanuel Macron, notamment en France?

Oui, très positive. Que ce soit sa réforme du marché du travail, la direction de sa politique budgétaire ou son attitude positive vis-à-vis des entrepreneurs, connaissant les résistances qui peuvent exister en France, j’ai énormément de respect pour ce qu’il fait.

Propos recueillis par Sabine Syfuss-Arnaud

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