Solidarité. Les associations s'opposent au recensement des migrants dans les centres d'hébergements

Reçus vendredi matin au ministère de l’Intérieur, plusieurs grands acteurs de l’accueil des migrants (Médecins du monde, Cimade, Emmaüs notamment) ont préféré quitter la table après avoir entendu Gérard Collomb leur expliquer comment le gouvernement allait envoyer des “équipes mobiles” dans les centres d’hébergement d’urgence, pour procéder à un recensement.

Publié le 9 décembre 2017
“On ne donnera pas le numéro de la chambre”, s’est insurgé Louis Gallois, président de la Fédération des acteurs de la solidarités (ex-Fnars).
L’Outil d’orientation des migrants en fonction de leur situation ou prélude à l’éloignement et les recensements prévus dans les centres d’hébergement inquiètent le monde associatif, qui redoute une logique de “tri”. Pas question de rentrer dans une logique “de recensement, d’étiquetage et de triage”, a expliqué Patrick Doutreligne, le président de l’Uniopss (Union nationale d’associations sanitaires et sociales), à l’issue de la réunion.
Pour les associations, le recensement “franchit trois lignes rouges: l’accueil inconditionnel, le non-respect de la loi informatique et libertés si on nous demande de transmettre des listes, et d’éventuelles interventions de la police dans les centres”, a averti M. Doutreligne.
 
Pour le gouvernement, l’idée est de savoir qui exactement est hébergé dans ces centres saturés, afin de sortir ceux qui relèvent d’autres structures (notamment les étrangers aux statuts variés), et libérer des places pour les sans-abri. Une initiative en droite ligne de la promesse, faite en juillet par Emmanuel Macron, de n’avoir “plus personne” à la rue “d’ici la fin de l’année”. Le président de la République avait alors donné la méthode : appliquer, “dès la première minute, un traitement administratif” aux migrants, avec “derrière une vraie politique de reconduite aux frontières”. Car si les demandeurs d’asile et les réfugiés peuvent espérer une amélioration de leur sort – ils sont la priorité affichée de la politique d’accueil du chef de l’Etat -, la question se complique pour les déboutés et les “dublinés”, ces migrants enregistrés dans un autre pays européen, qui est censé traiter leur dossier. Pour eux, Emmanuel Macron a été clair, en souhaitant que la France reconduise “de manière intraitable celles et ceux qui n’ont pas de titre” de séjour.
Dans cette optique, recenser est logique. Une expérimentation d’équipes mobiles a déjà lieu depuis quelques semaines en Ile-de-France.
Au ministère de l’Intérieur, on assure que “les équipes mobiles ne comprendront pas de forces de l’ordre” et qu’”il n’y aura pas de prise d’empreintes” mais des “entretiens” avec les personnes hébergées.
 

Mais les associations ont été échaudées par les mises en gardes répétées de M. Macron, et attendent de le rencontrer “prochainement”. Une circulaire evrait être publiée d’ici la fin du week-end pour spécifier le fonctionnement et le rôle de ces équipes mobiles. Elle pourra se lire comme le pendant d’une autre circulaire, datée du 20 novembre et qui demande aux préfets de “renforcer” leur lutte contre l’immigration irrégulière à partir des centres dédiés aux migrants.  Un texte montrant que “le lien entre hébergement et contrôle est de plus en plus fort, avec la promotion de dispositifs coercitifs”, soupire Clémence Richard, de la Cimade. Pour les associations la crainte se concentre sur les déboutés qui seront orientés vers ces centres de préparation au retour, “en vue de leur éloignement”, redoute Bruno Morel, le directeur général d’Emmaüs solidarités. C’est pourquoi elles ont saisi le Défenseur des Droits ce lundi 18 décembre, Journée des Migrants.

 

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