Interview

Plan hyper-ruralité : dans la Creuse, «on peut devenir pionniers et attirer les gens»

L'exécutif veut faire de son département un laboratoire. Le député LREM Jean-Baptiste Moreau, qui remet ce vendredi ses propositions de développement, explique que le territoire pourrait par exemple être le premier à interdire le glyphosate.
par Dominique Albertini
publié le 15 décembre 2017 à 12h48

Le département n'est pas un habitué des projecteurs. Souvent prise comme symbole d'une ruralité délaissée, la Creuse s'est pourtant incrustée dans l'agenda du nouvel exécutif. L'épineux dossier GM&S et la controversée réplique d'Emmanuel Macron à l'encontre d'une partie des ouvriers avaient mis l'exécutif sous pression. Celui-ci veut désormais retourner cette exposition à son avantage : en recevant des élus creusois à l'Elysée en octobre, Emmanuel Macron a proposé de faire du département un laboratoire de l'«hyper-ruralité». Une démarche concrétisée ce vendredi par le député (LREM) de la Creuse, Jean-Baptiste Moreau, qui a remis au préfet une série de propositions pour développer le département.

Comment la Creuse s’est-elle invitée dans l’agenda de l’exécutif ?

Le dossier GM&S a joué un grand rôle : le plan social dans cette usine de La Souterraine a provoqué 157 licenciements. C'est peu à Paris, c'est énorme chez nous, où la mobilité et les créations d'emplois sont faibles. Il y a eu une manifestation à Egletons (Corrèze), où des élus creusois, après avoir décliné une rencontre avec le secrétaire d'Etat Benjamin Griveaux [passé récemment de Bercy au porte-parolat du gouvernement, ndlr], ont essayé d'approcher le Président. J'ai avec ce dernier une liaison particulière, je l'ai rencontré un an avant son élection et j'ai contribué à son programme agricole. Un dimanche matin, il m'a appelé en disant qu'il fallait trouver une solution aux problèmes des territoires «hyper-ruraux», qui représentent 2,5% de la population française et sont voués à la disparition sans mesures concrètes. Ce n'est pas tout : le secrétaire d'Etat au Numérique, Mounir Mahjoubi, a passé deux jours chez moi cet été : l'occasion de prendre conscience de ce que signifie «désert numérique»…

Que proposez-vous ?

Concrètement, dès 2019, la 4G pour tous et la fibre au moins pour les entreprises, afin que se développent les espaces partagés de télétravail. On peut attirer des gens : le solde naturel de la Creuse est négatif, mais son solde migratoire est dans le vert ! En matière de santé, nous avons des maisons de santé qui n’arrivent pas à recruter : pourquoi ne pas leur permettre de salarier des médecins ? Il y a une demande des étudiants en médecine en ce sens. En termes de transports, il faut travailler sur la desserte et le confort de la liaison Paris-La Souterraine, là aussi pour favoriser le télétravail. Quant à l’agriculture, on pourrait être pionnier en devenant le premier territoire sans glyphosate.

Est-on sûr que ces propositions seront suivies d’effets ?

Le budget sera évidemment contraint, ce n’est pas «open bar» pour la Creuse. Mais certaines mesures ne sont pas si coûteuses. Et un délégué interministériel sera nommé début 2018 pour assurer le suivi du dossier. Ces solutions ont vocation à être expérimentées chez nous, avant d’être élargies aux territoires similaires.

Le fait d’être le seul député du département est-il un handicap ou un atout ?

C’est vrai que, depuis 2012, il n’y a plus qu’un seul député pour ce département de 120 000 habitants. C’est difficile, car il faut au moins deux heures pour le traverser : quand il y a des événements à chaque bout du territoire, les week-ends se font courts. Mais cela permet aussi d’être bien identifié comme «ambassadeur» du département.

Votre activité d’éleveur est-elle compatible avec votre mandat ?

J’essaie d’être sur mon exploitation du vendredi au lundi. Depuis mon élection, j’ai embauché un salarié et adapté le travail : j’ai moins de vaches, je fais plus de cultures pour être autonome. Mais c’est important de remettre les bottes le week-end, ça permet de redescendre sur terre.

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