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Lunettes : une offre pléthorique, des prix mal maîtrisés

Augmenter les remboursements ne suffira pas. La mise en place du reste à charge zéro sur les lunettes suppose de restructurer la filière.

Par Solveig Godeluck

Publié le 14 déc. 2017 à 16:34

Des lunettes gratuites pour tous ceux qui en ont besoin, c'est la promesse d'Emmanuel Macron pour 2022 . Est-ce nécessaire ? Les 5,5 millions de bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire n'ont rien à payer. De plus, les offres low cost se sont développées chez les opticiens. « Le quart de nos clients en optique ont déjà un reste à charge zéro », explique Jean-Pierre Champion, le directeur général du groupe Krys.

Seulement, il n'existe aucune garantie de pouvoir en bénéficier. Les disparités sont géographiques, comme l'a montré une étude menée par la Mutualité française , qui pointe un reste à charge moyen de 4 euros par paire en Ariège, contre 236 euros à Paris. Elles sont aussi fonction des revenus : « Le reste à charge zéro profite surtout aux gens qui ont des complémentaires santé haut de gamme », regrette Jean-Pierre Champion, qui parle de le « démocratiser ».

Mais augmenter le niveau de remboursement n'est pas la solution. « Quand les tarifs sont libres, cela fait juste augmenter les prix », rappelle Thierry Beaudet , le président de la Mutualité française. Les assureurs complémentaires financent déjà 72 % des 6,1 milliards d'euros du marché des lunettes. Pour freiner l'inflation, le montant remboursable par les assureurs privés est plafonné par la loi depuis 2015.

Des marges consistantes

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Malgré cette contrainte, la dépense demeure mal maîtrisée, car l'offre, pléthorique, pousse à la consommation. Il y a 12.000 magasins d'optique à travers le pays et 53 opticiens pour 100.000 habitants, contre 26 en Allemagne et 10 au Royaume-Uni. En moyenne, chaque boutique vend 2,3 paires de lunettes par jour. Comment gagner de l'argent avec si peu de clients ? En poussant des modèles plus chers. L'opticien peut acquérir un verre unifocal pour 1 euro, un verre progressif pour de 5 à 30 euros, une monture de base pour 2 euros, ou 50-60 euros si une marque connue y a été apposée. Une paire à 400 euros procure donc une marge consistante.

« Il faut réfléchir au nombre d'opticiens que l'on forme et plutôt former des audioprothésistes, car on en manque », suggère Thierry Beaudet, qui demande aussi, comme Jean-Pierre Champion, une baisse de la TVA sur les lunettes. Sachant que la filière va devoir faire des efforts pour modérer ses prix, le directeur général de Krys souhaite que les opticiens soient rémunérés lorsqu'ils mesurent l'acuité visuelle des clients : « Incorporons au forfait Macron une prestation d'examen de la vue qui améliore l'accès aux soins, pour la moitié du prix moyen d'une consultation, soit 25 euros au lieu de 50 euros », plaide-t-il. Les délais d'attente chez l'ophtalmologue dépassent trois mois ; il s'agit de sauter cette étape quand cela est possible.

Disruption numérique

Mais pour les entrepreneurs d'Internet, et notamment pour Fadi Farah, fondateur de la start-up Easy-verres, la solution est ailleurs : « On peut faire du zéro reste à charge avec des lunettes d'excellente qualité sans avoir besoin de faire baisser la TVA », assure-t-il. Chez lui, la paire coûte 250 euros. Ses clients ont en moyenne un reste à charge de 10 euros, et 80 % ne sortent jamais leur Carte Bleue. Ils renseignent leur numéro de Sécurité sociale en ligne et, si leur mutuelle est partenaire (20 millions de Français couverts), leurs droits sont immédiatement calculés, afin de leur proposer un catalogue zéro débours, en tiers payant intégral.

« Si toutes les complémentaires faisaient comme nos partenaires, cela ferait beaucoup baisser les coûts pour tout le monde, souligne l'entrepreneur. Cela serait plus efficace que les éternelles stratégies de prix d'appel à 20 ou 30 euros, pour un prix moyen qui se monte en fin de compte à 500 euros. » A terme, la disruption sera peut-être le meilleur allié du reste à charge zéro, mais au prix d'une restructuration brutale du réseau d'opticiens.

Solveig Godeluck

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