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GAFA

Ce qu'il faut retenir de la déclaration de guerre de la Cnil à WhatsApp

La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) a mis en demeure la messagerie électronique WhatsApp de se conformer à la loi pour transmettre des données de ses utilisateurs à sa maison-mère Facebook. WhatsApp risque une sanction de 3 millions d'euros.

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L'application WhatsApp sur l'écran d'un smartphone à Pékin le 26 septembre 2017

La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) a mis en demeure la messagerie électronique WhatsApp de se conformer à la loi pour transmettre des données de ses utilisateurs à sa maison-mère Facebook.

AFP/Archives - NICOLAS ASFOURI

La Cnil n'aime pas trop qu'on se moque d'elle (Commission nationale de l'informatique et des libertés). Dans le ton feutré du gendarme de l'utilisation des données personnelles, cela donne une mise en demeure de la messagerie électronique WhatsApp de se conformer rapidement à la loi (1 mois) afin de bien vouloir lui transmettre les données de ses utilisateurs qu'elle envoie à sa maison-mère (Facebook).

L'entreprise fondée par Marc Zuckerberg avait racheté en 2014 la messagerie cryptée. Or, WhatsApp a fait évoluer ses conditions d'utilisation afin de permettre justement ce transfert de données. Alors que la Cnil a sollicité à plusieurs reprises d'obtenir un échantillon des données des utilisateurs français transmis à Facebook, WhatsApp n'a pas voulu fournir ces informations, arguant que, dans la mesure où l'entreprise est installée aux États-Unis, elle se considère uniquement redevable de la législation américaine selon le régulateur des données.

"C'est un argument de moins en moins recevable juge Julien Le Clainche, avocat en nouvelles technologies. Il y a eu une affaire Yahoo où le site vendait des objets nazis en France. On a menacé le site de le poursuivre pour apologie des crimes de guerre. Ils disaient qu'aux États-Unis, la liberté d'expression leur permettait de faire cela. Puis on a trouvé un arrangement technique. Depuis la jurisprudence a évolué et la Cour de justice de l'Union européenne considère qu’à partir du moment où la société a un établissement dans l’UE et traite de données de citoyens européens, la loi des pays européens s’applique. L’’impérialisme juridique de WhatsApp ne s'applique donc pas."

Agacement de la Cnil

Les mots sont feutrés mais ils disent tout l'agacement de la Cnil face à cette fin de non recevoir. "La Cnil n'a donc pas été en mesure d'examiner pleinement la conformité des traitements mis en oeuvre par la société à la Loi informatique et libertés" détaille le communiqué de l'instance. Dans les faits, le régulateur des données demande à l'entreprise de recueillir explicitement le consentement des 10 millions d'utilisateurs français et de leur permettre surtout de s'y opposer en pouvant toujours utiliser le service.

Si WhatsApp transmet les informations, elle ne risque aucune sanction. Si elle persiste dans sa position, la Cnil pourra ouvrir une procédure de sanction. WhatsApp risque une sanction maximale de 3 millions d'euros dans l'affaire. Une paille vu les résultats de Facebook dans le monde (4,71 milliards de dollars de profit au troisième trimestre 2017). Avec la nouvelle réglementation européenne sur la protection des données personnelles (RGPD) qui entrera en vigueur en mai 2018, les sanctions vont être sensiblement augmentées: 20 millions d'euros maximums ou 4% du chiffre d'affaires annuel.

"Pour que le consentement soit valable au sens du RGPD, il faut qu'il soit nécessaire à l'exécution du service décrypte Julien Le Clainche. Or lorsque l'on donne son consentement à WhatsApp, c'est en réalité pour 3 finalités. La seule nécessaire et légitime est d’assurer la sécurité du service, c'est la première. La seconde concernant le ciblage publicitaire pose problème car dans WhatsApp, on doit consentir aux 3 finalités d’un coup. Enfin celle sur l'évaluation et l'amélioration des services renvoie elle à une catégorie un peu fourre tout".

Risque d'image

"Cette mise en demeure traduit la volonté des Cnil en Europe d’imposer aux GAFA un devoir d’information vis-à-vis des consommateurs sur ce qu’on fait de leurs données personnelles et à qui on les transmet", précise Fabien Honorat, avocat associé chez Péchenard & Associés. Et si pour l'instant le montant de l'amende qu'encourt WhatsApp paraît dérisoire, les régulateurs européens tentent de mener leur bataille sur le plan de l'image de marque. "Il ne faut pas négliger l’aspect mauvaise publicité pour les entreprises de la Tech, poursuit Fabien Honorat. Ils vont essayer à l'avenir le plus possible de faire sortir ces affaires publiquement, comme avec Uber il y a quelques semaines".

Et les consommateurs dans tout cela? Vont-ils arrêter d'utiliser le service de messagerie car il met en cause le respect de leurs données personnelles? Peu probable que les consommateurs décident massivement un boycott d'un service leader dans le domaine. "Je ne suis pas persuadé que les utilisateurs vont, à la suite de ce communiqué de la Cnil, supprimer Whatsapp de leurs smartphones pronostique l'avocat. Pourtant le sujet du contrôle des données personnelles concernent tous les consommateurs et est un sujet majeur".

 

Amende de 110 millions d'euros à Facebook

Techniquement, le respect des demandes de la Cnil risque de ne pas poser de problèmes insurmontables. De nombreux éditeurs de logiciels demandent lors de l'installation de ceux-ci, que les utilisateurs acceptent la transmission des données de bug ou d'utilisation du logiciel aux éditeurs. En cas de refus, il est tout de même possible d'utiliser le logiciel.

La Cnil est régulièrement en conflit avec les géants américains du net, notamment Facebook et Google. Elle rappelle dans sa délibération que la Commission européenne a condamné Facebook en mai à une amende de 110 millions d'euros pour avoir fourni des "renseignements dénaturés" concernant l'acquisition de WhatsApp. Un mémo à bon entendeur.

"La vie privée est quelque chose de très important pour WhatsApp"

La messagerie instantanée WhatsApp a réagi mardi selon l'AFP à sa mise en demeure, la veille, par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) pour transfert illégal de données personnelles vers Facebook en assurant que "très peu de données" étaient concernées.

"La vie privée est quelque chose de très important pour WhatsApp, c'est la raison pour laquelle nous collectons très peu de données, en cryptant chaque message", a déclaré un porte-parole de la messagerie instantanée. "Nous continuerons à travailler avec la Cnil pour nous assurer que les utilisateurs comprennent quelles informations nous collectons et comment nous les collectons", a par ailleurs indiqué WhatsApp.

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