Les États-Unis ont imposé mercredi des sanctions contre le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov, accusant cet allié du président russe Vladimir Poutine d'être personnellement impliqué dans de graves violations des droits de l'Homme.

Ces nouvelles mesures, qui visent aussi des responsables russes, risquent de déplaire à Moscou, et confirment la difficulté d'un rapprochement entre les États-Unis et la Russie, pourtant voulu par Vladimir Poutine et Donald Trump avant l'arrivée de ce dernier à la Maison-Blanche il y a près d'un an.

Ramzan Kadyrov a été inscrit sur les listes noires du Trésor et du département d'État américains notamment pour des accusations d'exécutions extrajudiciaires, de torture ou de disparitions.

«Ils disent que les sanctions sont liées aux droits de l'Homme. Alors pourquoi chercher pour cette liste des personnes se trouvant à l'autre bout du monde, puisqu'elles se trouvent chez vous, à la Maison-Blanche et au Pentagone?», a réagi le dirigeant tchétchène sur son compte Instagram.

Un responsable de la sécurité en Tchétchénie, Ayub Kataev, est également sanctionné, entre autres pour son implication présumée dans des exactions contre les homosexuels cette année dans cette république du Caucase russe.

Les sanctions annoncées mercredi concernent enfin trois Russes, Alexei Sheshenya, Yulia Mayorova et Andrei Pavlov, impliqués dans l'affaire de corruption révélée par Sergueï Magnitski, ce juriste russe mort en prison en 2009.

«Magnitski Act» 

Le Trésor américain «reste engagé à poursuivre ceux impliqués dans l'affaire Sergueï Magnitski y compris ceux qui ont eu un rôle dans le complot criminel et la fraude qu'il a découverts», affirme dans un communiqué le directeur de l'agence chargée des sanctions financières John Smith.

Les nouvelles sanctions viennent compléter la liste noire actualisée chaque année dans le cadre du «Magnitski Act», source récurrente de tensions entre Moscou et Washington.

Cette loi de 2012 cible d'abord les personnes impliquées dans la vaste affaire de corruption et fraude fiscale démasquée par cet avocat russe, notamment des membres du gouvernement russe. Elle permet également de viser les responsables de la détention et de la mort de Sergueï Magnitski.

Mais au-delà, ce texte à la portée très vaste permet aussi de sanctionner toute personne responsable d'exécutions extrajudiciaires, d'actes de torture ou d'autres violations flagrantes des droits de l'Homme en Russie.

Les sanctions, qui touchent désormais 49 personnes au titre du Magnitski Act, gèlent leurs éventuels avoirs aux États-Unis et interdisent à tout ressortissant américain de faire des affaires avec ces individus. Elles sont également interdites de visa américain et d'accès au territoire des États-Unis, souligne le département d'État dans un autre communiqué.

Une autre loi de fin 2016, le «Global Magnitski Act», permet de sanctionner des personnes responsables de graves violations des droits de l'Homme dans le monde entier. Une première liste de l'administration américaine est attendue prochainement, a déclaré mercredi un responsable du département d'État.

Les relations entre Moscou et Washington sont au plus bas, sur fond d'enquête aux États-Unis sur des accusations d'ingérence russe dans l'élection présidentielle américaine de 2016 et des soupçons de collusion entre le Kremlin et l'équipe de campagne du candidat Trump. Les deux pays ont mené ces derniers mois une guerre des sanctions, avec expulsion de diplomates et fermeture de batîments officiels à la clé.

«Cette administration veut préserver une relation stable et productive avec la Russie, nous pensons que nous avons des intérêts stratégiques communs dans de nombreux parties de la planète», a assuré le responsable du département d'État, espérant que Moscou «comprenne la nature des inquiétudes» américaines en matière de droits de l'Homme.

Le mois prochain, l'administration et le Congrès américains doivent en outre trouver un accord sur la mise en oeuvre de nouvelles sanctions économiques imposées l'été dernier par les parlementaires des États-Unis et promulguées à contre-coeur par le président Trump. L'administration doit notamment fournir au Congrès une liste de riches Russes considérés comme membres du réseau de soutien politique et financier de Vladimir Poutine - ce qui risque de porter un nouveau coup aux velléités d'apaisement des deux présidents.