Pas-de-Calais : le détenu islamiste voulait tuer ses surveillants

Christian Ganczarski devait sortir de prison dans quinze jours mais était sous la menace d’un transfert vers les Etats-Unis.

 Christian Ganczarski purgeait une peine de 18 ans de prison pour complicité dans l’attentat de Djerba, en Tunisie, en 2002.
Christian Ganczarski purgeait une peine de 18 ans de prison pour complicité dans l’attentat de Djerba, en Tunisie, en 2002. DR

    « J'ai entendu des cris, des hurlements, comme si on égorgeait quelqu'un… et, par terre, il y avait du sang partout, c'était impressionnant », raconte, encore un peu secoué, ce détenu de la prison de Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais). L'agression, survenue jeudi vers 16 heures, s'est produite presque sous ses yeux : alors qu'il avait demandé à sortir pour téléphoner, l'un de ses voisins de cellule, l'islamiste allemand Christian Ganczarski, s'en est pris à trois surveillants pénitentiaires, à l'aide d'une paire de ciseaux à bout rond et d'un couteau.

    « Il a tenté de frapper celui qui avait ouvert la porte à la carotide, puis a blessé le deuxième collègue, qui tentait de le ceinturer, à la tête. Il a été atteint au cuir chevelu, qui a beaucoup saigné. Un troisième a été touché au torse, détaille Frédéric Charlet, secrétaire régional adjoint de l'Ufap-Unsa-Justice dans les Hauts-de-France. L'agresseur a accompagné ses gestes du cri d'Allouha Akbar, et ce à au moins trois reprises », poursuit le représentant syndical. Coup de folie ou acte mûrement réfléchi ? Ganczarski, 51 ans, est l'ancien responsable de la maintenance et du cryptage des réseaux de communication d'Al-Qaïda et a vécu aux côtés de Ben Laden en Afghanistan.

    L'établissement doit accueillir Salah Abdeslam

    Considéré comme le cerveau de l'attentat contre une synagogue de Djerba (Tunisie), qui avait fait 21 morts en 2002, il avait écopé d'une peine de dix-huit ans de prison qu'il terminait de purger à Vendin-le-Vieil. Il devait sortir le 24 janvier, soit dans moins de deux semaines…

    L'annonce de sa possible extradition vers les Etats-Unis dans le cadre de l'enquête sur les attentats du 11 septembre 2001 a sans doute tout fait basculer : d'après des écoutes téléphoniques, Ganczarski semblait prêt à tout pour empêcher son transfert outre-Atlantique. Il avait de ce fait été placé à l'isolement vendredi avec des équipements spécifiques (casque, bouclier, pare-coup) pour les surveillants devant l'approcher.« Mais parce qu'il s'est tenu à carreau, les mesures d'isolement ont été réduites lundi par le chef d'établissement », regrette Jean-François Forget, secrétaire général de l'Ufap-Unsa-Justice, évoquant la colère des personnels pénitentiaires et la possibilité d'une action nationale à venir.

    D'autant que cet établissement est aussi celui qui doit accueillir Salah Abdeslam, seul survivant du commando des attentats du 13 novembre 2015 lors de son procès en Belgique début février … Ganczarski, « qui travaillait, ne posait pas de problème particulier et ressemblait plus à un grand-père », selon Frédéric Charlet, a aussi ce charisme qui lui permet d'avoir un ascendant notable sur les prisonniers. « Dès qu'il était placé à l'isolement, il y avait des mouvements de soutien des autres détenus qui parvenaient à bloquer le fonctionnement quotidien de la prison… On avait fini par renoncer », se souvient ainsi un surveillant l'ayant côtoyé lors de son passage dans une prison d'Ile-de-France, au milieu des années 2000. Discret, avenant, poli, cultivé et polyglotte (polonais, allemand, français et anglais), Ganczarski s'était pourtant fait remarquer par son prosélytisme, caractérisé par des appels à la prière et la distribution de textes religieux.

    Jeudi, la section antiterroriste du parquet de Paris a annoncé l'ouverture d'une enquête pour tentatives d'assassinat sur personnes dépositaires de l'autorité publique en relation avec une entreprise terroriste. Des faits passibles de la réclusion criminelle à perpétuité.