EXIL NUMERIQUEPourquoi une partie de la fachosphère migre sur le «Facebook russe»

Dieudonné, Soral, Le Lay… Pourquoi une partie de la fachosphère migre sur le «Facebook russe»

EXIL NUMERIQUES’estimant victimes de censure de la part de Facebook et Twitter, ces figures de l’extrême droite française en ligne se rejoignent sur VK…
Illustration du réseau social russe VK.
Illustration du réseau social russe VK. - M.Libert / 20 Minutes.fr
Olivier Philippe-Viela

Olivier Philippe-Viela

L'essentiel

  • Plusieurs figures de l'extrême droite française appellent leur public à ouvrir un compte sur VKontakte.
  • Ils suivent un mouvement initié par l'alt-right américaine.
  • VK est l'équivalent russe de Facebook, sous contrôle des autorités russes.

Ils sont toujours en lutte contre le « système », mais il faut déménager le camp de base. Une partie de la fachosphère, s’estimant victime de censure sur les réseaux sociaux classiques en Occident, Facebook et Twitter notamment, migre vers d’autres plateformes. Nouvelle adresse pour Alain Soral, Dieudonné & co : VK, pour VKontakte (« en contact »), le « Facebook russe ».

« Un refuge à l’abri du "politiquement correct" de l’Occident »

L’humoriste controversé et multi-condamné a indiqué sur Twitter le 6 janvier avoir ouvert un compte sur le réseau russe, la faute à la « censure ».

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Son compère Alain Soral, essayiste d’extrême droite, a également son compte personnel sur VK, où se trouve une page Egalité & Réconciliation, son site. Les deux équivalents existant sur Facebook ont été fermés par la plateforme américaine le 15 décembre 2017, ainsi que son compte Instagram. Dans un post sur VK, la page Egalité & Réconciliation explique cette suppression par le fait que « les réseaux sociaux de l’Empire se plient aux injonctions communautaires ».

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Contacté par 20 Minutes Alain Soral réitère son explication : «Je suis parti sur VK parce que j'ai été viré de Facebook et Facebook c'est l'Empire ! Alors je rebondis ailleurs». Egalement contacté, Dieudonné n’a pas réagi.

Tristan Mendès France, enseignant au Celsa et spécialiste des nouveaux usages numériques, a constaté, dans la foulée des évènements de Charlottesville aux Etats-Unis qui a poussé les géants du Web à sévir, que des invitations à rejoindre VK se multipliaient au sein de l’alt-right américaine, cousine et modèle des réseaux français de l’extrême droite en ligne. « En décembre, Twitter a fait un gros ménage en suspendant plusieurs comptes influents, et beaucoup ont vu en VK un refuge à l’abri du "politiquement correct" de l’Occident », explique-t-il.

Pour ce spécialiste de l’extrême droite en ligne, la migration actuelle vers VK est essentiellement une posture, du fait de « la fascination de ces internautes pour le régime russe et Vladimir Poutine​ ». D’autres plateformes, comme mail.ru ou RuTube (le YouTube russe) les intéressent aussi, d’autant qu’ils profitent de la « mansuétude des autorités russes, qui voient d’un bon œil l’arrivée de ces ennemis autoproclamés de l’Occident », complète l’enseignant au Celsa.

95 millions d’utilisateurs

Boris Le Lay, blogueur nationaliste résidant au Japon, également contacté, en vain, a lui aussi trouvé refuge sur VK, à la suite du déréférencement de son site par Google et de la fermeture de sa chaîne sur YouTube. Sur les réseaux « traditionnels », plusieurs comptes liés au Web d’extrême droite (la « fachosphère », ou « réinfosphère » comme ils se nomment), appellent à ouvrir un compte et recréer une communauté sur le site russe.

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En Russie, VKontakte a la même place que Facebook en Occident, proposant un service similaire. Selon le Moscow Times, le réseau comptait 95 millions d’utilisateurs mensuels début 2017, avec une croissance record de plus de 40 % de ses bénéfices en 2015 et 2016.

Particularité : il a été créé en 2006 par Pavel Durov, avant qu’il ne fonde la célèbre messagerie cryptée Telegram. Mais Durov, opposé à la politique du président russe Vladimir Poutine, en a été écarté en 2014, et le site est aujourd’hui dirigé par des proches du Kremlin. « Les renseignements russes ont un œil sur VK, où la liberté d’expression est en réalité relative. C’est la chose de l’Etat russe, qui veut un contrôle de l’Internet sur le modèle chinois », ajoute Tristan Mendès France.

Un problème quand même, pour Soral & co : l’audience. Leurs publications ne rencontrent évidemment plus le même succès, souligne Tristan Mendès France : « Ils avaient créé un capital d’audience, avec des sites implantés depuis des années et de fait bien référencés… Sur VK, l’échelle de diffusion n’est plus du tout la même. Leur eldorado de la liberté d’expression risque de ressembler à un désert aride à long terme. »

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