Chronique «Miroir d'outre-Rhin»

Parité en entreprise : une étude allemande vante l'efficacité des quotas

Miroir d'outre-Rhindossier
Chronique, sur la vie, la vraie, vue d'Allemagne. Ce voisin qu'on croit connaître très bien mais qu'on comprend si mal. Un pays ni tout à fait le même ni tout à fait autre. Au menu de cette semaine : parité dans les entreprises et inégalités salariales.
par Johanna Luyssen, correspondante à Berlin
publié le 18 janvier 2018 à 17h04

Françaises, combien gagne votre collègue masculin ? En moyenne, si vous travaillez dans le privé, 14% de plus de l'heure que vous. Lundi, 62 journalistes de l'Obs protestaient, dans une lettre ouverte, contre les inégalités salariales au sein de leur rédaction. Elles emboîtaient ainsi le pas à leurs consœurs du Parisien, qui dénonçaient, elles, la composition très masculine de la direction de la rédaction, suivies par celles de la Provence. Inégalités salariales et absence de parité aux postes de pouvoir : un cocktail classique dans bien des pays.

En Allemagne, pays qui ne brille pourtant guère par son féminisme législatif, une loi espère changer les choses : depuis le 6 janvier, on peut demander par écrit le salaire moyen de six personnes du sexe opposé occupant le même poste. Cela ne s'applique qu'aux entreprises de plus de 200 salariés. Celles de plus de 500 salariés doivent aussi faire un point régulier sur leur politique anti-discriminations salariales. Il faut dire que l'Allemagne part de loin sur le sujet, avec des inégalités salariales importantes (22% selon Eurostat, bien au-dessus de la moyenne européenne). D'autant que, comme me l'expliquait Dierk Hirschel, chef de la politique économique du syndicat Verdi, «les femmes représentent 80% des minijobs et 80% des temps partiels».

Cadeau : cette carte Eurostat des inégalités de salaire en Europe.

Dans la foulée, l'Institut allemand de recherche économique (DIW) publiait une étude sur la parité en entreprise. Il apparaît que la part des femmes dans les conseils d'administration stagne, tandis que la part des femmes dans les conseils de surveillance augmente, pour atteindre 25% dans les 200 plus grandes entreprises allemandes. Au sein du DAX, la part des femmes dans les conseils de surveillance s'élève même à 33%.

Selon Katharina Wrohlich, coauteure de l'étude du DIW, «c'est une conséquence de la loi sur les quotas adoptée en 2015. Les sociétés cotées en Bourse et soumises au principe de codétermination sont désormais tenues d'avoir un quota de femmes de 30% dans leurs conseils de surveillance. Si elles ne s'y conforment pas, le siège doit rester vacant».

Selon elle, il faut promouvoir une politique volontariste, notamment à travers les quotas, sinon les choses ne bougent pas. Cela doit s'accompagner d'une politique familiale qui «soutienne l'expansion qualitative et quantitative des modes de garde et favorise la division égale des soins entre les partenaires, par exemple en améliorant le congé paternité». A savoir que la chose n'existe pas en Allemagne, même si les deux parents peuvent prétendre à un congé parental. Or, la chose semble intéresser de plus en plus les hommes. En juin, Der Spiegel relevait qu'en 2016, 365 000 hommes ont choisi de prendre un congé parental : une augmentation de près de 12% par rapport à 2015.

Les choses bougent en Allemagne, mais si lentement… Un comble, me direz-vous, pour un pays dirigé par une femme – qui ne s'est par ailleurs jamais tellement battue pour promouvoir l'égalité des sexes.

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