Badinter sur Inter !

Robert Badinter ©AFP
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Ses combats contre la peine de mort et l’indifférence des pouvoirs publics pour le monde carcéral ont fait de lui l’un des grands noms de notre XXème siècle. Il signe l'avant-propos de "Détenues", un livre de photographies signées Bettina Rheims qui sort jeudi. Robert Badinter est l'invité d'Augustin Trapenard.

Avec

Michel Foucault

Robert Badinter explique : "Quand Foucault dénonce la prison, il dénonce la civilisation du XIXe, de la civilisation industrielle. Le système carcéral est une invention d'à peu près de la même époque que les usines. Avant, c'est le châtiment corporel, c'est le corps qui paye pour le crime.

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La prison sert d'instrument parce qu'on lui prête des vertus qui, en réalité, sont empruntées à celles qu'ont aux couvents au Moyen Âge. On croit aux vertus de l'incarcération.

Michel Foucault était un très grand écrivain et un grand érudit. Nous étions liés par des combats identiques. Et le lendemain du jour de l'abolition de la peine de j'ai reçu une lettre de Foucault, que j'ai conservée, qui disait : "La fin de la peine de mort, c'est très bien. Ce qui compte maintenant, c'est l'abolition de la prison".

Après tant d'années de combat s'entendre dire ce qu'il fallait faire ! Mais comme je suis assez d'accord, que j'ai du mal à rédiger l'exposé des motifs et notamment par quoi, on la remplacera la prison, je lui réponds : "Vous m'envoyez l'exposé des motifs. Je suis sûr qu'il sera d'une qualité littéraire incomparable. Mitterrand sera sûrement ravi. Et puis, j'ajouterai le dispositif juridique. Il ne l'a jamais fait. Il a éclaté de son presque satanique. J'ai d'ailleurs chez moi un admirable portrait de Foucault par Fromanger, où c'est le diable qui a l'air de jaillir du tableau !

La prison, un tabou

Plus qu'un tabou, la prison est une forme de hors champ social : on ne veut plus voir les délinquants. On les met en prison. On a l'impression qu'ils sont voués à y rester. Heureusement, ils sont voués à en sortir. On a le sentiment parce qu'on ne les voit plus qu'ils ont disparu… Or, non, ils sont là, ils existent. Ils font partie du corps social dont les a temporairement retranchés, mis à l'écart. La question a toujours se poser est : Qu'est ce qui va se passer quand il va redevenir un homme parmi les autres hommes et femmes libres ?

Il faudrait toujours prévoir pour chacun des détenus et le parcours carcéral et la voie vers la sortie. Parce que c'est là que se joue l'essentiel.

Si vous préparez la sortie, si vous prenez le soin de passer par des libérations conditionnelles, des mesures d'accompagnement, la récidive est rare. Mais si, au contraire, vous faites faire la peine jour pour jour. À sa sortie, le détenu est précipité directement dans la société des hommes libres, et souvent, il n'y est pas prêt. C'est le choc et le résultat, c'est une récidive accrue."

La suite est à écouter...

Son actualité

Les portraits réalisés par Bettina Rheims seront exposés au château de Vincennes du 9 février au 30 avril 2018, puis au château de Cadillac du 1er juin au 4 novembre 2018.

Programmation musicale

Joan BAEZ, Prison Trilogy / Etienne Daho, Le jardin

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